TÎMa
.»i
m.
¥
\
Digitized by the Internet Archive
in 2011 with funding from
University of Toronto
http://www.archive.org/details/lamisreenagenaOOcouy
LA MISÈRE
EN AGE NAIS
De 1^)00 il 1629
ET
Lifl Gf^RflDE FAjVIII^E
De 1630-1631
PAR LE Docteur L. COUYBA
VILLEXEUVE-SUR-LOT
IMPRIMERIE RENAUD LEYGUES
Cours Victor Huço, n;
MDCDII
^?^y
OTH^^'
LraV'
»^^
yj"/^^ ô
PRÉFACE
Le titre que nous avons adopté pour ce travail est
peut-Ctre trop ambitieux. Il devrait, semble-t-il, y
être également traité de la misère et de la famine dans
toutes les juridictions de V Amenais. Malheicrcuse-
ntent cette histoire est impossible à exécuter, à cause
de la disparition et de l'absence de documents. Il
fallait s'en tenir à ce que nous possédions et par
l'étude des pièces sauvées du naufrage conclure de
quelques juridiction^ à Vetiscmble.
Les mêmes causes politiques ou météorologiques
sévissaient sur tout l'Agenais. On peut légitimement
déduire des mêmes causes les mêmes effets.
Dans les Pièces justificatives que nous avons an-
nexées à cette œuvre, le lecteur trouvera des docu-
ments qui lui permettront de pénétrer dans la vie
quotidienne et économique des populations et des
administrations qui les opprimaient plus qu'elles ne
les servaient.
LA MISÈRE EN AGEN Aïs
DK iCtOO A 1629
ET
LA GRANDE FAMINE
DE 1630-1631
CHAPITRE PREMIER
La Misère en l'Agenais de 1600 à 1629
La guerre, la famine, la peste, inséparables compa-
gnes tournant dans le même cercle fatal des siècles
écoulés, étaient, comme les trilogies du théâtre antique,
enchaînées par la même fatalité.
Même destinée implacable. Ces temps noirs du
moyen âge, prolongés jusqu'ù la tin du XVII'' siècle,
avaient été symbolisés par ces danses macabres que
tant d'artistes ont dessinées et peintes jusqu'à Hans
Holbein.
Dans ces siècles passés, on entend la plainte lamen-
table des populations et surtout des paysans attachés à
la glèbe : « La famine et la guerre, disait Omer Talon,
engendrent le troisième des fléaux de Dieu, qui est la
peste » .
La guerre, la grande mangeuse d'hommes, unie aux
8
intempéries, préparait la disette dans les années les
moins malheureuses et la famine dans les autres.
Sur ces populations affamées, décharnées,' squeletti-
ques, s'abattait le fléau de la peste qui achevait de
coucher en terre les populations, comme les blés après
la grêle.
Par dessus tous ces maux, le mauvais gouvernement
suçait encore ces populations exsangues, comme le
vampire.
Sans remonter trop haut, le XV!»-^ siècle, gouverné
par ces fastueux Valois, les amis et les protecteurs des
Arts, se traîne au milieu des orgies d'une cour dépra-
vée et les fureurs d'une guerre civile, qui dura qua-
rante ans.
Pendant huit ans, de 1524 à 1532 environ, Hélyot de
la Ville Vielhe, bourgeois de Gontaud, dit que « sont
« morts en ce pays d'Agenais cent mille personnaiges
« tant de faim que de mauvais gouvernement et ainsy
« l'ai veu et oy dire communément (i) ».
Faute de pain et d'abri, dit un déposant à l'enquête
de 1532, « sont morts cent mille personnaiges tant par
« les rues que les champs (2) ».
L'année de la vSt-Barthélemy (1572), nouvelle famine.
Il y eut encore la grande misère de i577-
Les paysans de l'Agenais, ces pauvres paysans « vêtus
« de toile, comme un moulin à vent », se jetaient alors
aux pieds du duc de Montpensier s'en allant en cour et
le suppliaient de dire au Roi, si la guerre devait conti-
(i) Documents inédits pour servir à l'Histoire de la ville de
Gontaud. (Recueil delà Société des Sciences, Lettres et Arts d'Agen.
T. XIII, 1" série, p. 371. Com. de G. Tholin d'après les Archives
d'Agen. EE. 6j.
(2) Arch. d'Agen. EE. 6. L'enquête de 1532, fut instruite par un
bachelier en droit, Raymond de Gasqui, enquêteur en la sénéchaussée
d'Agenois. (Ibid.)
nuer, de leur faire couper la gorge (i). Et quelle
guerre ! la guerre civile, les guerres de religion !
Feu le père du Koi Louis XIII, Henri IV, dans son
ordonnance de 1595, avouait que <.< le peuple était pres-
« que à sa dernière minute ».
L'an 1600-iGoi avait été une année de famine. L'an-
née 1602, de même, avec sa compagne, la peste.
Dans les minutes de 1602 du notaire Royal, Jehan
Papon de là juridiction de Dolmayrac en Agenois (2),
dans un procès entre Jelianne Imbert et Pierre
Colombie, la veuve Imbert réclamnit à Colombie le
prix de trois « boysselats » de terre qu'elle lui avait
vendus au lieu dit « del Barrailhou » en la juridiction
royale de Lacenne. Colombie affirmait avoir payé feu
son mari, Pierre Gary, dit Castan « et qu'ils (le mari et
« la femme) auroient converti (le prix) de ladite vandi-
« tion à leur norriture et entretainement dans la famine
« qui pour lors estait en ce puis, sans lequel prix ils
« n'avoient moyen de vivre et seroient péris de
« faing (3) » .
L'année que les vieux registres appellent « l'an de la
« mortalitat » s'applique vraisemblablement à l'année
de 16:2 où la peste ajouta ses ravages à ceux de la
famine.
Des bandes de voleurs allâmes pillaient les campa-
gnes.
Les Consuls de Montianquin écrivaient aux Consuls
d'Agen, en cette même année 1602, pour les prier de
poursuivre les voleurs avec toute leur vigueur accoutu-
mée. « Nous sommes retombez à l'antienne misère. Le
(i) Revue de l'Agenais. T. XII p, 262.
(2) Dolmayrac, canton de Ste-Livrade d'A^enais.
(3) Minutes de Jehan Papon 1602, p, XXXVIII. (Etude de M-^^ R.
Dalidou). Ces minutes rapportent cà et là de nombreuses preuves de
cette famine.
lo
vK pauvre peuble qui s'en sant estremement affligé nous
« bat tous les jours de ses plainctes à nos oreilles (i) ».
Aux Etats Cicncraux de 1614, on avait entendu la
o-rande voix de Miron, l'orateur du Tiers Etat, criant
au Roi et aux grands de la terre, d'une voix angoissée
et pleine de sanglots : « Que diriez-vgus, sire, si vous
« aviez vu dans vos pays de Guyenne et d'Auvergne
« les -hommes paistre avec les bestes ? »
Les bêtes étaient plus heureuses, puisqu'elles avaient
un estomac approprié à la digestion des herbes et des
racines !
Les révoltes des grands recommencèrent en 1614 et
1615. En 161 5, Damazan et le Mas d'Agenais furent
ravagés. Nouvelle cause de misère.
En 1617, nouvelle année de disette.
En 1620, pendant la révolte de Marie de Médicis, qui
se termina par la victoire du Roi aux Ponts de Gé (1620),
Henri de Mayenne, baron de xMonpezat, Ste-Livrade,
Dolmayrac et autres lieux, promena une armée de
23,000 hommes de Bordeaux à Agen (Août 1620) et
de là à Puy-l'Evêque, où il apprit la conclusion de la
paix.
En 1621, les Huguenots reprirent les armes. On se
battait partout à Lavardac, aux Tours de Barbaste, à
Nérac, à Monclar, à Glairac, Tonneins, Montauban où
on fit un épouvantable «dégast», et à Monheurt.
L'année 1622, quoique moins agitée, fut à peine moins
désastreuse pour les populations foulées de l'Agenais.
L'année 162 1 fut encore une année de disette. Des
pluies continuelles noyèrent les moissons. Les rivières
débordèrent.
L'hiver de 1623-24 fut excessif. La Garonne, le Lot,
toutes les rivières restèrent gelées jusqu'en Février
(i) Arch. d'Agen. FF. 222.
II
il)2.[. Vax l-'cvricr, le froid redoubla. Tous les arbres
fruitiers, les vij^nes, les blés gelèrent, comme près de
cent ans plus tard, dans le terrible hiver de 1709.
Le Registre Juiroissiul de Cuq, rédigé par le curé
Jean Drappié, raconte ainsi ce désastre :
« L'année 1624 a faicl un ;;rand et horrible hiber
<f tellement cpie a cause de la rij^ur d'icelluy le bin pur
« se gelet dans les bariques et faisoict la dicte glasse
« sauter les bondes des dictes bariques et en divers
« endroicts les fons sautoit et le bin se bersoit dans les
« chais ; davantaige les (iguiers sont aussy morts,
« ensemble les ronses, lauriers, sipres et partie des vois
« et des vignes, notamaut les plantes aux lieux bas ou
« n'y est presque denuire. Les rivières aussy gelées,
« notamment celle de Garone, que Ion ne pouvoit
« passer a cause de la glasse. Les oliviers aussy sont
« mortz. Ledict hiber a comanse environ la Toussainct
« et iinit environ le 15^ apvril de la dicte année (i) ».
Cette même année, poussés encore par la misère,
sortant de leurs chaumineset de leurs bois, comme des
loups allâmes, reparurent, les yeux allumés par la faim,
les croquants qui couraient sus aux nobles et allèrent
assiéger le Maréchal de Thémines en son château fort
du Quercy.
En Janvier 1627, les pluies amenèrent de nombreux
débordements. La Garonne fit de grands dégâts (2).
La misère s'aggrava pendant l'hiver de 162S.
Le 5 Octobre 1628, le buiecni de santé d'Agen décida
que « vendanges estant faictes sera pourveu a quester
(») Reg^. Par. de Cuq (Arch. D'''- 155 suppl. E.) Citation de M. G.
Tholin dans son Inventaire des Arch. Dép'''. Série E. supplément,
p. 26, col, 2.
(2) Journal des Malebaysse. (Revue de l'Aj^cnais. T. XX, p. 242).
< du bled par emprunct suivant les précédentes délibé.
c rations et qu'il sera poarveu a régler les pauvres afin
< qu'ils ne vaguent pas par la ville (i) ».
Le 18, décision conlirmative : « Tous estrangiers,
« vagabons et bohémiens ? seront tirés de la ville (2) ».
Le 3 Novembre, on nomma des commissaires pour la
visite des greniers (3).
Le 13 Novembre, le bureau donna l'autorisation aux
Consuls d'emprunter 300 livres « pour les pauvres
« nécessiteux et malades de N. D. de Bon Encontre et
c ordonne que Labolvene commis à leur fere la distri-
« bution faira apparoir du rolle de sa despense pour
« scavoir ceulx quy auront de quoy payer de ce quy
« leur est bailhé et comme lad. distribution est
« faicte (4) ». '
Comme on n'avait pas d'argent, on envoya à Mon-
sieur d'Agen une députation pour le prier de contri-
buer de ses charités au soulagement des pauvres. On
députa aussi auprès du grand Archidiacre et du chapitre
St-Caprais. M. le chanoine de Bourges fut chargé
de cette députation (5).
A la misère s'était ajoutée la peste : 1629 sonne
lugubrement.
(1) Arch. d'Agen. GG. 255, p. 78.
(2) Id. p. 81, V.
(3) Arch. d'Afjen. BB. 51, p. 73.
(4) Ibid. p. 86.
(5) GG. 255.
CHAPITRE II
La Misère en 1629
Trois années de disette s'ouvrent en 1628, 1629 et
1630 et s'achèvent dans l'affreuse famine de 1630-1631.
La Grande Famine, comme l'appelle le Journal de
Malebciysse, juste cent ans après celle de 1532.
L'année 1629 fut une année de famine.
Tout l'Agenais pâtit.
En Janvier 1629, les Consuls « pour esviter de veoir
« la ville désertée par les liabitans pris de la peur de
« maie rage de faim, et les coquins et mauvais garni-
« mens prandre des advantaiges au mespris de Dieu, du
« Roy et de sa justice » empruntent 5960 livres (i).
Le 8 Janvier 1629, le bureau résolut « que des pau-
« vres valides en la ville seront employés au travail,
« les estrangers renvoyés chascun en son pays et les
« invalides distribues et norris par les habitants, le fort
« pourtant le faible, suivant l'ordre de despartemant
« qui en sera faict par les comm"""^® qui a ces fins seront
« depputtes et ce fait leur sera deffandeu de vaguer par
« la ville (2) »
Il s'agissait de répartir les pauvres dans les maisons
au prorata des ressources de chacun. Le jour du
20 Janvier fut désigné pour cette distribution. Comme
(i) La ville d'Af(cn pendant l'Epi Jcmic Je 1628 à 1631. (Ad.Magen,
p. 24).
(2) Arch. d'Agen. GG. 255, p. 93, v.
M
un certain nombre de pauvres ne turent reçus ni
nourris, soit par l'absence des propriétaires, soit par
mauvaise volonté, il fut arrêté que les avances faites
par les Consuls seraient répétées contre les défaillants
et. le 12 Février, qu'on saisirait et vendrait leurs biens
meubles.
Trois jours après le département des pauvres entre
les gens aisés, le grand archidiacre Balthazar de Gelas,
donna une ordonnance attribuant 90 pauvres à Tévêque,
45 au chapitre de St-Etienne et 60 à la collégiale de
St-Caprais ; en tout 200, selon la décision des Trois
Ordres du 13 Janvier 1629.
Le 30 Janvier, le chanoine Pheletin et Caussade pro-
testaient au nom du chapitre de St-Caprasy contre
« la préthendeue ordonnance » du grand archidiacre,
pour n'avoir point été appelés au département des pau-
vres contrairement aux usages « de tout temps pratiqué
« en semblables occasions ».
Les considérants de la protestation étaient conçus en
termes amers et particulièrement agressifs contre
« la préthendue ordonnance, d'ailleurs donnée par led.
". sieur de Gelas, en sa cause [yrolyre. Estant double-
(.'. ment intheresse dans lad. distribution tant pour
'/ l'intherest du dict évesque, son frère, que le sien
' propre et particuUier en qualité de chefs dudit chap-
« pitre de Sainct-Estienne, il a volleii descharger tant
« led. Seigneur evesqiie son frère que le dict chappitre
« St-Estienne tt surcharger lesd. sieurs et chappitre de
« St-Caprasy ».
Les protestataires avaient sommé les députés du
chapitre cathédral de St-Etienne et en particulier le
sieur de Gelas, grand archidiacre, de procéder amiable-
ment à une nouvelle répartition au prorata des revenus
de chaque chapitre.
Les chanoines de St-Etienne n'ayant voulu rien
entendre, les chanoines de .St-Caprasy, Pheletin et
15
Caussadç, supplièrent les Consuls de réunir de nouveau
les Trois Ordres.
Ils ajoutaient :
« De plus que le revcneu dudictchappitrc St-Estienne
« y comprenant cclluy dudict s"" grand archidiacre et
« autres di}j;nitcs de lad. esglize, ensamhle les doutze
« prebandiers et grand nombre de cliappellains fondes
« en icelle que led, de Gelas a comprins dans lad.
« prethenduc distribution, sont d'egnl ou plus grand
« reveneu a ceux dvul. chappitre Sainct (lapprazy dans
« lequel il n'y a aucune dignité que celle de prieur et
« n'i'a que deux hebdomadicrs, six prebandiers et cinq
« ou six cliappellains, au lieu que dans lad. Esglise
« St-Estienne il en y a une vingtaine, la pluspart très
« bien rantes, sy bien que sy la prethandue distribution
« dud. sieur Gelas avoit lieu, il n'y auroit pas plus d'un
« paouvre pour chescung des chanoines dud. Sainct-
« Estiennc la ou chescung des chanoines dud. s"" Gap-
« pras}' en auroient cinq, quy est une très grande ines-
« galite et disproportion... »
La requête faisait valoir ensuite qu'à cause de la
peste, il était impossible de recourir au Parlement de
Bordeaux, un arrêt de la Cour interdisant d'ailleurs
l'accès de cette ville aux gensd'Agen.
En attendant, les chanoines de St-Caprais déclaraient
se charger de quarante-cinq pauvres. Quant aux vingt
pauvres dont on les avait surchargés, ils offrirent de
consigner somme suffisante entre les mains des tréso-
riers des Consuls pour leur nourriture, jusqu'à ce qu'ils
eussent pu se pourvoir tant contre ledit Evcque que
contre les chanoines de St-Eticnne (i).
(i) Arch. d'Agcn. PT. 174. Acte dv sommation faicie par Mes-
sieurs les cJianoysmes de Sl-Ca/>ra:y à Messieurs les C- touchant la
nourriture des pauircs. On lit J.ins le Livre journal dfs Consuls \
lO
Les chanoines de St-Gaprais ne s'élevaient pas contre
le principe « d'une si saincte délibération » mais contre
son application même.
D'autres membres du clergé, bénéficiaires de fruits
décimaux, faisaient la sourde oreille et le i6 Février
1629, la Cour et Chambre de Guyenne rendait contre
le prieur de Dolmayrac, aux portes d'Agen, l'arrêt
suivant :
Arrêt donné par la Cour et Chambre de Guyenne
séante pour le Roy à Agen (i).
« Veu par la Cour la requeste huy a elle présentée
par les Consuls de la ville d'Agen contenant qu'a
l'occasion du grand nombre de personnes quy sont
en la prés, ville et que tous les jours il en arrive de la
jurisdiction, ils n'ont moyen de suppléer aux frais
nécessaires pour leur nourriture, s'ils ne sont acistes
par ceux quy en ont les moyens et commodités. Et
d'autant que le prieur de Dalmayrac de la jurisdic-
tion de la. prés, ville prend six cens livres chasqvie an
du reveneu dud. lieu et qu'en la parroisse y a multi-
tude de pauvres quy viennent tous les jours en ville
et encore y a plusieurs malades qu'il faut acister, au
moyen de quoy requérir, ordonner et enjoindre aud.
prieur ou ses fermiers bailler ou remettre ez mains
des recepveurs desdits Consuls la somme de cent
livres quy est la sixiesme partye du reveneu et ce
« incontinent et sans delay, et a ce faire led. prieur ou
« ses fermiers y seront constraints par toutes voyes
la date du 11 Mars 1631 ; « Nous avons este assignes au Parlement de
« Bourdeaux à la requeste des sieurs du chapitre de St-Caprasy sur
€ l'appel par eulx interjette de la saisie par nous faicte de leurs biens
« meubles pour la nourriture des pauvres qui leur ont este bailles par
« le chapitre St-Estienne... > BB. 51, p. 164, v.
(1) Chambre de Guyenne ou Chambre de l'Edit.
Ï7
« dheues et raisonnables, dict a este ayant aucunement
« esgard a lad. requeste que la Cour ordonne que le
« prieur de Dalmayrac contribuera à la nourriture,
« despance et médicaments qu'il convient f.iire en lad.
« parroisse de Dalm;iyrac, pour traictcr et medique-
« menter les pauvres dud. lieu attainctz de In maladie
« contagieuze et quy n'oïit moyen de ce nourrir. A ces
« fins anjoinct aux fermiers et recepveurs dud.
« prieure aud. lieu de Dalmaj'rac de mettre ez mains
« du recepveur desd. Consuls la somme de septante
« cinq livres saufz auxd. fermiers de l'employer en leur
« compte. A quoy faire tant Icd. prieur que fermiers
« seront constrainis par toutes voyes deues et raison-
« nables, mesmes lesd. fermiers par emprisonnement
« de leurs personnes, attandeu la matière dont est
« question.
.« Prononce à Agen en la Chambre de Guyenne le
« setziesme février mil six cens vingt neufz
« s"" de Pontac, président.
« M. de Chimbaud, rapporteur,
« Par la Chambre,
« Delcastax ».
Le même jour, ordre fut donné par la Cour « à tout
<<■ huissier ou sergent à ce requis » de saisir les revenus
du prieur qui reçut sommation le 19 (i).
Les Consuls veillaient à l'approvisionnement de la
ville.
« Le 7'- Mars 1629 a este emprunte de Mons'' d'Es
« trades (2) cent vingtz sacs de bled froment et vingt
(i) Arch. d'Ajîen. P'F. 172. Parchemin et papier.
(2) François d'Estrades, père du Maréchal Godefroid d'Estrade»,
seigneur de Bonnel (Bonneuil), de Scjjouniac, gentilhomme ordi-
naire de la chambre du Roi, son maistre d'hostcl, gouverneur de
« barriques de vin pour la nourriture des pauvres
« malades sçavoir le bled 7 11. 2 sols le sac et vingt
« livres la pippe de vin revenant à la somme de mille
« cinquante deutz livres à payer au premier jour d'Oc-
« tobre prochain par contrat reteneu par Leydet (1).
On distribua ce blé, au fur et à mesure des besoins,
aux boulangers de la ville pour le convertir en pain.
Dans le Livre-Journal consulaire, on lit les comptes
détaillés suivants poiir Mars, Avril et Mai :
« Du sus dict bled (de M"^ d'Estrades), en a
« esté baillie à Anne Dufauga, boulangère,
*; pour fere du pain pour la nourriture des
« pauvres XXIIII sactz bled du Querssy 24 sactz
« Plus le 9* Mars a esteprins dudit grenier. 12 sactz
« Plus le 3"^ Apvril 1629 a estebailhe à lad.
« Anne 24 sactz
« Plus le XP Apvril 1629 a este bailhe a
« lad. Anne 24 sactz
« Plus le 14^ Apvril 24 sactz
« Plus le 20^ a este prins dud. grenier et
« baillé à la Bernadoune, presans MM'"^ Ro-
« quier et Lafaige 4 sactz
« Plus le X huict sactz XVII s.
« Plus le 24* Apvril 18 sactz
« Plus le 23" (2) 6 sactz
« Le 9** du moys (de May a este prins par la Berna-
« donne 24 sactz bled du grenier de M'' d'Estrades (3J.*
Messeigneurs le duc de Mercure et Prince de Martij^nics. Il était marié
à Suzanne de Secondât. (Voir O. Gilvy, Nob de Guyenne et de Gas-
cogne. T. II, p. 263).
(1) Leydet, notaire roj'al, secrétaire des Consuls.
(2) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 94.
f3)Ibid. Cette mention t-t celle.s qui suivent sont en marge de la
page 105 V,
19
<i Plus 4 sactz à M Camus le ir May. •
« Plus le II" May a este tire cUkI. ;;roiiicr 2\ sactz,
« Plus le 20'- a este lire 2.| saetz ».
Le flot des pauvres montait toujours.
Le 29 Mars, les Consuls représentent à MM. du
bureau de la santé « qu'il y a grande quantité de pau-
« vrcs reffugies dans la présente ville et que aux par-
« roisses de la jurisdiction d'icelle il y a aussi grand
« rombre qui sont en estresmes nécessittes et que pour
« subvenir à ce Messieurs des chapistresSainctEstienne
« et Sainct Caprazy offrent de bailher la dixiesme par-
ie tie de leurs reveneus si on les veuU accepter ».
On s'empressa d'accepter « sans tirer à conséquence ».
On décida que ces revenus seraient « convertis à
« l'achapt de bled et fèves et remis es mains des cures,
« vicquaires et marguilliers des parroisses pour estre
« distribues aux pauvres d'icelles ; et pour cet effet
« tous pauvres estrangiers seront tirés hors la présente
« ville auxquels sera bailhe l'aumosne avant que les
« tirer dehors; et inhibitions et deffences seront faictes
« aux portiers a peyne de suspension de leurs gaiges
« de les laisser rentrer, ny les manœubres qui viendront
« pour travailher aux vignes et aultres personnes qui
« apporteront vendre du bois et pailhe, restouble et
« autres choses. .. »
On arrêta en outre :
« Que les bateaux chargés de bledz ou farines soict
« de descente ou montée seront arrestes et sera prins
« desd. bleds ou farines en payant en cas de besoing ».
20
On arma les gens chargés de la police do la rivière
et de l'exécution des arrestats de la Jurade.
« Le 28"= Mars (1O29) a este baille a Brette et M«
« Pierre, une hallebarde et une demy pique avec ung
c cornet de poudre et de mesche pour servir d'arrester
c les bapteaux quy portent le bled (i) ».
Et cependant, au commencement de 1629, le blé
n'était pas encore très cher, car les Consuls achetaient
à M'"* de Nort(2) « six vingts sacs de bled a VII livres
« le sac (3) ».
La crise était grave. Passe encore pour la viande !
mais la crise sur les grains, blé, seigle, mesture, en
somme sur la vie elle-même, puisqu'on ne peut se pas-
ser de grains, devenait de plus en plus menaçante.
Le pain ! le pain ! la dernière raison des peuples !
On avait déjà distribué les pauvres entre les habi-
tants aisés.
Il fallait, pour se soustraire à cette obligation, que
d'autres habitants se substituassent aux défaillants et
en prissent l'engagement écrit, sinon on agissait contre
les défaillants.
« Le 30 Mars Monsieur Cancer sest charge de nour-
« rir les pauvres qui ont este distribues a Monsieur de
« Barroussel conseilher.
'< Signé : Ca^îcer ».
Le 3 Avril, Jacques Penandeau se chargea de nourrir
les pauvres du fondeur, son beau-père
(ij Arch.d'Agen. BB. 51, p. 99.
(2) Jeanne de Béchon, dame de Savignac, veuve de Jules de Nort,
vivant procureur général à la chambre de Guyenne. (Ch. de l'Edit).
^3) Ibid. p. 92. Le prix du sac équivalait à ce moment à 28 fr. de
notre monnaie au moins.
il
« Le mesmejour(5 Avril) Monsieur Tourtonde pre-
« bandier de resglize St-Estienne sest charge des pau-
<r vres que AÏM" de Valade ont en distribution o cas
« (où) ils ne les nourriront.
« Signé : R. Tourtonde.
«Je promets a Messieurs les G""'' d'entretenir et
« nourrir les pauvres qui mont este bailles et a mes
* enfans tout autant de temps qu'il sera necessere.
« Fait dans la maison de ville le VI'' Avril 1629.
« Signé : Ledouble ».
Même déclaration de M. Lasdebatz (i).
Le 2 Avril, le bureau accepta les offres faites par
Monsieur d'Agen, Claude de Gelas, « touchant ce qu'il
« veult bailler pour estre distribué (2) ».
Le 10 Avril, on expulsa les pauvres étrangers.
« Le iO"= Apvril avons fait sortir hors la ville touts
« les pauvres estrangers après leur avoir fait l'aumosne
« de pains que nous avions fait faire exprès suivant la
« délibération du Bureau de la Santé et avons ordonne
« que les marches pour la vante du boys restouble oeufs
« et autres menues danrees se tiendront hors la ville a
« la porte St-Anthoine et a la porte du Pin ou il y aura
« aussy des marchants qui vendront du sel et de l'huile
« et des boulangers qui vendront du pain (3) >.
Ue nouveau conflit avait éclaté, à propos de la con-
tribution du clergé, entre les autorités consulaires et
l'autorité épiscopale.
(i) Arch. d'Agen. BB. 51, pp. 99, 100, 102.
(a) Arch. d'Agen. GG. 255, pp. 112, 113.
(3) Arch. d'As:cn. BB. 51, p. loi v.
« Le neufviesmeapvril Lafage nostre trésorier a rcceu
v< la somme de deux cents livres de Monseign"- d'Agen
« pour la dixiesme partie du reveneu quil prend dans
« nostre jurisdiction aquoy tous les ecclésiastiques ont
« este condamnes par provision pour la nourriture des
« pativres par appointement de lu Cour Presidiale de
« ceste ville; plus a receu aussy ledit Lafage dix livres
« de Mons"" d'Albarel chanoyne de St-Caprasy comme
« recteur de Cardonet pour le reveneu quil tire de la
« parroisse de Montréal. A receu aussy quatre cents
« livres de Messieurs du chapitre St-Estienne. »
« Led. Lafaige a remis lesd. sommes dans la garde
« robbe. »
« Les susdictes sommes ont este employées en febves
« et distribuées aux pauvres des parroisses par les
« vicaires et marguilhiers desd parroisses de nostre
« jurisdiction (i) «.
Le 30 Avril, les membres du Bureau de la Santé
arrêtèrent « que tous ceulx qui ont abandonne leurs
« pauvres seront constraints de leur donner des vivres
« ou a leur donner deux sols par jour (2) ».
On était en pleine peste et tous ceux qui avaient pu
fuir avaient gagné les champs.'!
On remit au lendemain, i<-''' Mai, le soin de faire la
visite générale des pauvres.
Les Consuls s'efforçaient de ne pas laisser les mar-
chés sans approvisionnements, malgré les barrières et
les prohibitions intérieures et les arrêts des Parlements
qui interdisaient la circulation des blés.
« Le premier de May nous avons receu une lettre de
« Monsieur le premier Président de Thls. (Toulouse)
(1^ Arch. d'Agen. BB. 51, p. loi.
(2) Arch. d'Agen, GG. 255, pp. 124 v., 127, 128.
23
« portant response a la notre et permission de trans-
« porter mile sacs de bled hors du ressort dud. Parle-
« ment pour la provision de ceste ville non obstant les
« defîances contraires faictes par arrest de lad. Cour
« de Parlement fi) :k
Le 5 Mai, on achetait à M"'' de La Tour (2) cent
douze sacs et demi de blé au prix de y livres, le sac.
« Le </ May AU de Daurce nostre collègue et de
« Buard jurât sont ailes a Layrac pour voir si en la
« Gcimmunauté de lad. ville ou quelques particuliers
« pourront nous fournir mile sacs de bled et aquel prix
« pour prester aux habitans de ceste ville qui sont en
« nécessite a cause de la maladie contagieuse (3) ».
« Le doutziesme May Monsieur le président Hoys-
« sonnade nous ayant donne advis de sa maison de
« Bellerive quil )' avoit quantité de bled a vandre pro-
« che de mary, a este arreste que M. de Buard jurât
« seroit prie daller sur les lieux pour le voir et en fere
« le marche ce quil a fait et a convenu avec les mar-
« chands quil nous fairoit porter trois ou quatre cents
« sacs de bled au bout du Gravier a raison de sept
« livres dix sols le sac ».
Le blé arriva le 14 ; on le mesura sur le port et on le
fit transporter au grenier de M, d'Estrades pour le
distribuer aux habitants de la ville.
Cependant, la misère grandissait et on entendait les
cris de détresse des affamés.
(1) Arch. d'Age:;. BB. 51, p. 104 v. Voir plus loin à la date du 5
Nov. 1630 et du 30 Avril 163 1 le conflit élevé entre les Consuls
d'Agen et le Parlement de Toulouse touchant ces inhibitions.
(2) Marie de Goudailh, femme de M. de La Tour.
(3) Arch. d'Agc-n. BB. 51, pp. 104 v. 105 v. 107 et 108.
En Mai 1629, les Consuls d'Agen reçurent la requête
suivante :
« A Messieurs les Consulz de la ville
et cicté d'Agen,
« Supp. humblement Jean Lussanet et Peyroune
« Albignac, maries habitanz de la parroisse de Saint
« Ferriol, jurisd. de la présente ville, disant qu'ils sont
« charges d'une grande familhe en nombre de huit
« enfants et deux filhes et d'un balet pour fere leur
« labourage, quy sont Jean Pierre et autre Jean An-
« thoine, Humbert, Phelip, Guilhem et Arnauld, An-
« thoinete et Anne Lussanet, leurs enfans, estant en
« nombre les tous de tretze, ayant heu l'année passée
« fort petite recette, n'ayant reculhi fort peu de bled
« sans neul mesturage ; luy ayant conveneu senseman.
« cer ceste année trente cinq sactz de grains quy est
« cause qu'ils sont dénués de touttes commodités et
« d'ailheurs qu'ils sont de tailhe dans vostre livre trois
« soûls unze deniers, mailhe et pite ; et a ces fins ils
« vous supplient les volloir acister de huict sactz de
« bled et de six cartons febves et ils sobligeront solide-
« rement, vous protestant que ce sera le debte plustot
« paye: et attandeu le temps qui court ne peuvent treu-
« ver personne quj'leur aciste de rien et sy par vous au-
« ^resny est porveu, nous nousperdronsetnostre familhe.
Lussanet supliant avect sa dite
familhe (i).
Le 21 Mai, on décida de secourir les Carmes, ordre
mendiant, « affin qu'ils ne vaguent pas par la ville » et
de les aider en blé et en vin, mais sous obligé de leur
syndic (2)
(i) Arch. d'Agen. FF. 174.
(2) Arch. d'Agen. GG. 255. M. Magen note par erreur la date de la
visite au 26. Elle se fit le 16.
as
Le lO Juin, après une visite générale de la ville
^ pour scavoir le nombre, condition et nécessités des
« habitants » , comme ceux-ci avaient logé dans
des locaux immondes et pestilentiels des pauvres
étrangers qui s'étaient réfugiés dans leur ville, les
Consuls et les membres du Bureau résolurent de reje-
ter sur les propriétaires les sommes et avances qu'ils
avaient faites pour secourir les mendiants. On résolut
ensuite d expulser tous les pauvres valides et les ren-
voyer « chascun en leur pays tant hommes que fem-
« mes » .
On fit défense à son de trompe aux habitants de leur
louer maisons et granges (2).
€ Sur ce qui a este représente par lesd. s""» Consulz auxd. sieurs Ju
Bureau de la Santé que faisant la vizite j^eneralle dans la près,
ville pour scavoir le nombre, condition et necesites des habitans
d'icelle affin d'y subvenir suivant l'ordre qui en avoit este prins aux
précédantes assembles ils auroient trouve grand nombre de pauvres
familhes estrangères, n'ayant aucune vaquation pour gai^jner leur
vie mais seulement mandians leur pain, lesquels se seroient reffu-
gies en la prés, ville, ayans leur habitation dans de petits logements
ou granges que les habitans de lad. ville leur donnent a louage
quoyque lesd. maisonj ou granges ne soient point aucunement
propres ny comodes pour led. logeman, estans destitues de cliemi-
nces pour fere les feux et d'autres lieux propres a recevoir les im-
mondices et necessittes domestiques d'où est arrive et arrive tous
les jours mille inconvenians lesquels pendant le temps de la raalla-
die ont este cogneus grandement prcsjudiciables, ruyneux et im-
portans a la ville et grandement nécessaire y remédier a l'advenir,
de tant que dans lesd. granges ou habitations il s'y est trouve jus-
ques à huictou dix familhes entassées les unes sur les autres...
« Il en arrive ou en peut arriver de malheureux accidents soict
qu'ils périssent de froid ou de misère aux rigueurs de l'hiver, soict
qu'ils peuvent fere mettre le feu... et ruyncr tout uncartier de ville,
et n'ayant de quoy jetter leurs immondices de nécessites, il fault
qu'ils remplissent les rues de saletés et d'ordures et que ces petits
(1) Ibid. GG. 255. PP- 125 V. 127. »38.
l6
« logement soient des cloaques d'immotidicite d'où s'exhalent de
€ grandes vapeurs qui peuvent altérer l'air ou leur causer a eux
« mesines ou d'eux a nous pareille maladif que celle ([ui nous af-
« flige. . (l) ».
L'ordonnance consulaire fut prise le 27 Juin 1629
contre les pauvres étrangers et les logements insalu-
bres.
« De par le Roy
« Et Messieurs les Consuls de ceste ville d'Agen.
« Il est enjoinct et faict commandement à toutes fa-
« milles estrangeres qui se sont reffugiez dans ceste
« ville n'a3'ant vaccaôn de vuider icelle dans cint jôr.
« A deffault de ce en seront expelles honteusement,
« leur faisant inhibiôn et deffence de revenir c}- a
« peine du fouet sans l'expresse permission desditz
« Consuls.
« Defifences sont aussy faictes à tous habitans de
« quelque estât qualités et condiôn quils soient à peine
« de deux mille livres et autre plus grandes si le cas y
« eschet, de bailler d'ors en avant leurs maisons et gran-
« ges a louage soit aux habitans mesme natifs de la
« prés, ville ou aux estrangers soubz quelque prétexte
« que ce soit sans garnir les dictes maisons de chemi-
« nées et lieux secretz pour recevoir les immondices,
« lesquelles avant pouvoir estre louées seront vizités et
« recogneues par les dits sieurs Consuls ou autres qui
« par eux seront commis pour juger s'ils seront en
« estât de pouvoir estre loues.
« Pareilles inhibitions et deffances sont faictes aux-
« dits ha]pitans de louer leurs dites maisons aux pau-
« vres mendians aux peines susd, et d'estre obliges a
(l) Arch. d'Aiïen. GG. 255. Bureau du XVI" Juhig 1620, pp. 124
à 127.
27
« leur nourriture en cas de nccessitte et aflin que per-
« sonne n'en prétexte cause d'i<^norance sera la pré-
« sente ordonnance lue et publiée et affichée par les
« lieux et carrefours acoustunies de la pics, ville et
« reyterees tous les ans.
'< Faict a Agen dans la Chambre du (Conseil de la
« Maison Commune le vingt septiesmc juin mil six cent
« vingt neuf (i).
« Du commandemant de
« Uelpech, Consul ; CoRNE ?, Consul » .
Le dénuement était tel, que les prisonniers détenus
à la conciergerie d'Agen y mouraient de faim. Le
conseiller du Roi, André de Rance, procureur général
en la Chambre de l'Edit, en vertu des pouvoirs qu'il
tenait des arrêts de la Cour, ordonna que sur les reve-
nus du domaine du Roy et sur les droits d'attache des
moulins flottants de la- Garonne, « les molins à nef »,
il serait pris 30 livres pour distribuer aux prisonniers
èz prisons d'Agen à raison de 2 sols par jour et par
tête, avec ordre à Contensou, fermier des droits, de les
fournir aux Consuls (2). Contensou ne paraissant pas,
on lui envoya l'huissier.
Son agent Laurou fit tranquillement observer au
Sergent Royal Magadon que son maître n'était plus
fermier depuis la St-Jean 1629.
En Mars, l'emprunt de Janvier était épuisé.
« La plupart des habitants, dit le Registre du Bureau
« de la vSanté, tombent en grande nécessité, les uns
(1) Arch. d'Agen. FF. 8S.
(2) Faict i Beauregard lez Aj,'en le 15- Jeuilhet 1629. (A. Ma^jfen,
loco citato, pp. 47-48). Pendant le terrible siège de Monheurt de
Décembre 1621, le maître batelier Contensou avait eu deux de ses
bateaux déplacés pour permettre la garde de la rivière à'50 soldats.
Pour ce déplacement, on lui P'^y^ 44" livres d'indemnité. (Arch.
d'Agen, CC. 359).
38
« pour ne pouvoir travailher de leur mestier, les autres
a pour ne trouver à vendre leurs biens. Ils sont tous
« les jours après les sieurs Conseulhs demandant qu'on
« leur donne de quoy vivre (i) ».
Il fallait avoir raison des résistances du clergé.
Le 20 Juillet 1629, faute d'avoir obéi à l'ordonnance
du 18 Juin dernier signée : Boissonnade et Jeyan, com-
mis, relative à la nourriture des religieux exposés, un
sero-ent royal, Guiringaud, saisit et mit « soubz la main
« du Roy, notre sire, et de sa justice », et arrêta entre
les mains de Jacques Marsilhac et Jean Soulhagon dit
Pemasson, hoste d'Agen, comme fermiers, les fruits
décimaux que les chanoines de St-Etienne prélevaient
sur la paroisse de Montréal,
Le même jour, l'huissier se rendit au moulin appelé
de Chabrières, paroisse de Petit Cardonnet, juridiction
d'Agen, appartenant au chapitre de St-Caprais et signi-
fia aux fermiers Guiraud.Minda, marchand de Madail-
lan, et en personne de lui à damoiselle Françoise de
Codoing, veuve de s"" de Landas, avocat en la Cour,
que, faute d'obéir à la requête et ordonnance à eux
signifiée ou à M. M*^ Guilhaume de Cause, syndic du
chapitre, les fruits décimaux seraient arrêtés et saisis
entre les mains des fermiers.
De là, le sergent Royal se transporta « sur le sol du
« dixme » de la paroisse de Paulhiac arrêta entre les
mains des fermiers Joseph Matalin, François le Double,
homme d'armes, et Jean Courbe, les fruits décimaux
des paroisses de St-Julia, Cayssac et Pauliac, apparte-
nant au chapitre St-Caprasy.
Le 21 Juillet, il saisit les dîmes de Cassou et de
St-Denis appartenant à l'évêque et comte d'Agen entre
(I) Ibid. p. 36.
39
les mains d'Anthoine Masson, m'' chaussetier d'Agcn
et de M* Estienne Barilhet, notaire royal.
Le mcme jour, même saisie à Ste-Radegonde, dont
les fruits revenaient à l'EvSque.
Il saisit la partie des revenus de Ste-Radegonde et
les fruits de St-Sulpice et de la Capelette de Renaud,
appartenant à un chanoine de St-Etienne, le sieur de
Fonmartin.
Une autre partie des fruits décimaux levés par le
chapitre de St-Caprais fut encore saisie à St-Sulpice
d'Agen.
Le sergent saisit aussi la partie des fruits de la
Capelette de Renaud appartenant au chapitre de St-
Etienne et au chapitre de St-Caprais.
Le 23 Juillet, la saisie continua sur les paroisses de
Monbuscq, Saint Martin de Foulayronne et Artigues
dépendant de la collégiale de St-Caprais, et sur la
paroisse de xMerens, appartenant au même chapitre.
Le même jour, saisie des fruits de St-Vincent des
Cors, possédés par le chapitre de St-Etienne, et des
fruits décimaux de St-Cirq et de St-Ylaire de Colayrac
sur l'évêque et comte d'Agen .
Le clergé fit appel de cette saisie devant Nosseigneurs
du Parlement de Bordeaux.
« Le dernier d'Aoust a este baille au s"" de Reilhery
« pour porter au s"" Descayrac, procureur en la Cour de
« Parlement de Bourdeaux un exploict d'assignation qui
« nous a este donn^ en lad. Cour a la requeste de
« Monsieur d'Agen sur l'appel par luy interjette de la
« saizie de ses reveneus que nous avons fait faire pour
« la nourriture des religieux exposés. Plus un autre
« exploict d'assignation a nous donne a la requeste de
« Mess""* les chanoynes de St-Estienne et St-Caprasy
« pour mesme subject ».
Malgré tout le zèle des Consuls d'Agen, les pauvres,
comme l'hydre, renaissaient toujours.
En dépit des expulsions successives, on découvrait
quotidiennement « des feneans et pauvres estrangiers ».
Après la cessation de la peste, on donna une nouvelle
Ordonnance d'expulsion (20 Novembre 1629). Elle fut
exécutée le vendredi suivant (i).
La misère était la même dans tout l'Agenais. Nous
n'en voulons pour preuve que l'extrait suivant d'un
acte notarié :
« Comme soit ainsin, dit une minute du notaire
«J. Vistorte de Ste-Livrade d'Agenais, que l'année
« dernière mil 629 Antoine Dijols et Marguerite Legleu,
« sa famé, et Pierre Dijols, son tils, estoit en grand
« danger de périr de faim, n'ayant sorte d'aliments ni
« moyens pour vivre, auroit donné requeste en la cour
« ordinaire de la pr'"<-" ville qu'il leur fut permis d'allie-
« ner une pugnère de terre prinse de plus grande pièce
« au village de Bailharguet (2), jurid. de Monclar,
« pour soy norrir et allimenter (3) ».
« Quelque temps apprès, ayant despende u la dite
« somme estant en mesme de périr de faim, à cause de
« leur estresne misère et esterillitté de l'année », ces
malheureux Dijols donnèrent à Jehan Salbaing, lieute-
nant royal de Ste-Livrade, deux cartonats et demi de
terre en échange d'une petite maisonnette « pour soy
« loger (4) » que le lieutenant du Roy devait leur faire
bâtir.
(1) Arch. d'Ag-en. GG. 255, p. 145.
(2) Aujourd'hui, commune de Pinel et Hauterivc.
(3; Minutes de Vistorte, N. R. (Etude Molinic à Ste-Livrade). Cette
terre fut achetée par Jehan Salbaing, lieutenant royal de Ste-Livrade.
(Acte de 1630, p. 103).
(41 .Minutes Vistorte (ibid.j En Décembre 1630, Dijols père et Dijols
tîls étant morts, Marguerite Légleu réclama à M'- Jehan Salbaing le
31
Malirrc toute cette misère, il fallait encore subir les
lof^ements militaires.
Un exemple entre tous : le vicomte de i-'oucaude.
maréchal de camp, promena son réj^iment dans tout
l'Agenais pendant neuf à dix mois.
I.c 23 Décembre i62,s,rarrivéej5rochainc du ré;;iment
avait été annoncée aux Consuls :
« Le mesme jour (23 Dec.) Mons' Cieutat nous a
« rendu une lettre de M"^ de Monferan, maréchal de
« camp de l'armée de Monseigneur d'Espernon et cop-
« pie des ordojinanccs de Monsegn'' le Prince Conde,
« gênerai de lad. armée pour Tentretenement du Régi-
« ment de Monsieur le vicomte de Foncaude sur l'eslec-
« tion d'Agennois et après avoir ouy led. sieur de
« Cieutat, cap •^" d'une compaignie dud. régiment, a
« este ordonne que le conseil dud. pais (d'Agenois)
« sera asemble pour faire response par son advis (i) ».
On députa aussitôt le Consul de Causac, à Cancon,
auprès de M' de Monferran « pour esviter qu'il n'en-
« voye led. régiment ei ceste ellection (2) ».
paiement d'une somme de 7 livres, prix d'évaluation de la maison-
nette qui n'avait pas été bâtie, comme faisant partie des 26 escus
qu'elle avait apportés en dot. (Acte du 16 Décembre 1630, pp. 108-9).
Dans un acte de Février 1631, la maisonnette devait être de « tappiede
« {jazon, de la hautcnr d'une canne et largeur deux cannes et de
« longueur de deux cannes et demj'... avec une porte... »
(i) Arch. d'Agon. Livre Journal des Consuls. BB. 51, p. So-i. Le
Prince de Cundé, Henri II, père du grand Cordé, était lieutenant
général pour le Roi en ses armées de Guyenne et Haut Languedoc.
(Arch. d'Agcn. BB. 51, p. iio).
Jean Louis de Nogaret, duc d'Epernon, gouv. de Guienne depuis
le 27 Août 1622. Jean de Cieutat, chevalier, s' de Villebeau et du
Roy, lieutenant du Sénéchal d'Agenais.
(2) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 81.
32
Dans leur testament politique, les Consuls de
1629(1) disaient aux Consuls de 1630, leurs héritiers :
« ... Voilla le troiziesme fléau sur nos bras. Le régi-
« ment du sieur Viscomte de Foncaude appres s'estre
« promené et parcoureu pendant neufz ou dix mois en
« plusieurs lieux et presque partout en Agenois, fond
« deux fois sur nous, lequel, muny d'un ordonnance de
« Nosseigneurs le Prince de Condé et duc d'Epernon,
« demande sur tout le pays d'Agenois l'entretènement
« pour son dict régiment en argent compozé de dix
« compagnies pour trois mois à raison de cent hommes
« chaque compagnie, sans comprendre les chefz d'icel-
« les ny officiers quy monte à plus de trois cens hom-
« mes ».
Une Ordonnance du duc d'Epernon avait imposé la
ville d'Agen de trois mille livres et plus pour le régi-
ment de Foncaude. On parla de députer au Roi pour le
supplier « de vouloir décharger le pays d'Agenois, quy
« est la plus grande partie accablée de peste et de
« famine, de lanorriture. Nous avons recoureu pour la
« seconde fois a mon dict Seigneur d'Espernon, lequel
« par sa clémence accoustumée faict réduction desd.
« compagnies à soixante hommes, sans comprendre les
« chefz ny officiers ; de sorte qu'il a este lepve sur
« l'Agenois pour le payement dud. régiment trente
« deux mil quatre cens quatre livres cinq solz pour trois
« mois, comprins les six deniers par livre pour le pré-
« tendeu recepveur, droict d'impression des mandes,
(i) Les Consuls de 1629 étaient : M. Arnaud Delpech, lieutenant
criminel ; sf Bernard Corne, bourg'eois et intendant des revenus ; M"
Jehan de Lavergne, advocat en la Cour ; ^stienne de Cunolio, es-
cuyer, s"" d'Espalais ; M" Gerauld Daurée, advocat en la Cour; M"
Anthoine Rocquier, procureur en la Cour Présidiale.
33
• qiiy monte pour nostrc pai't la .^omme de deux mil
« livres (i) ».
Une Ordonnance du duc avait imposé la ville d'A«^en
de trois mille livres et plus pour le réy;imeiit de Fon-
caude. On parla de députer au Roi pour le supplier / de
« descharger le pays d'Agenois, quy est la plus grande
« partie accablqe de peste et de famine, de la norriture
« et entretenement dudict régiment et de tous autres
« gens de guerre qui ont desja mis ledict pays dans
« un tel esUit (jue lu J>lits <rrund pariye d'icellui est
•i reduict aux aulsmosnes (2) .■>.
Hongre, mal gré.ilfalluts'exécuter.On emprunta (3).
V Le premier de Mars 1629 a esté envoyé à Monsieur
« le viscomptc de Foncaude à Villeneufve la somme de
« trois mille livres pour partie du payement dudit régi-
« ment, de quoy le s' de Gieutat en a faict quittance,
« lad. somme feust pourtec par M'* de Goudailh et de
« Faure quil l'auldra reppeter sur le pais (4) ».
A la lin de Mars, nouvelles négociations et nouveaux
paiements pour faire déloger ce même Régiment qui de
Puymirol étendait ses quartiers jusqu'à Layrac et Boé,
aux portes d'Agen. Le vicomte de Foncaude, après
paiement, exigea la fourniture des bateaux pour trans-
porter ses compagnies de Boé à Auvillars. Les Consuls
s'empressèrent de les fournir.
(i) Arch. d'Agen. Bli. 51. Voir aussi k*s Jurades de Duras (Arcli.
C'* suppl. E. 1356'-
(2) Voir pour cet épisode, A. iMay^en, loco-citato, p. 36-37.
(3) Le vicomte de Foncaude était le fils de François II de Montfcr-
rand, seigneur de Cancon et de Casseneuil, l'ami fidèle de d'Eper-
non. Le vicomte de Foncaude mourut à Casseneuil en 1634, à l'ige
de 55 ans.
(4) Arch. d'Ag^en. BB. 51, p. 93. On trouvera des détails complets
sur les dettes de la ville d'Aveu et sur les avances de cette ville au
pays d'Agenais, avant et pendant cette période, du fait des loicement.»
militaires, sous les cotes. CC. i6<; et 170.
34
Ils s'adressèrent ù Monseigneur d'Epernon pour ob-
tenir décharge partielle de leur contribution au paie-
ment des gens de guerre et en même temps l'autorisa-
tion de convoquer les Etats du pays d'Agenais.
Le 22 Juillet, les Consuls d'Agen reçurent par l'in-
termédiaire des Consuls de Villeneuve, une ordonnance
du duc d'Epernon leur mandant de pourvoir sur le pays
d'Agenais pour quinze jours « à l'entretenement du
« Régiment de Foncaude ». Les Consuls d'Agen invo-
quèrent la triste situation où se trouvait leur juridiction
et écrivirent aux Consuls de Villeneuve « lesqviels nous
« supplions, a nostre deffaut, d'avoir soing de procurer
« ledit payement » .
D'Epernon déchargea seulement les Consuls d'Agen,
de fournir l'argent pour le pays d'Agenais (i"' Août),
mais leur imposa la fourniture de leur quote-part
Malgré Les froissements d'amour-propre qui contris-
tèrent les Consuls d'Agen et l'amertume qu'ils ressen-
tirent, eux, les syndics et les tuteurs des douze villes
dont la vie municipale était calquée sur la leur, les
Etats du Pays d'Agenais furent convoqués dans une
ville rivale, à Villeneuve, par les Consuls de celle-ci.
Agen y délégua M. de Reilhery. Il fallait faire contre
fortune bon cœur !
Le 20 Août, les Consuls de Villeneuve informèrent
leurs collègues d'Agen que l'Assemblée avait fixé leur
part à 354 livres pour vingt-cinq jours d'entretien (i).
On avait déjà levé pour ce régiment 32404 livres sur
le pays d'Agenais, le pays de misère (2) !
ii)Arch. d'Ag-en. BB. 51, pp. 95 à 98, 99, 115, 117.
(2) Cette question de l'entretien du Régiment de Foncaude resta
longtemps ouverte.
En 1631, le 10 Mai, les Consuls reçurent assignation à ce sujet :
« Le 10 du mois de May 1631 il nous a este donne assignation au
« privé Conseil a trois mois après l'exploit qui nous a este signifie et
Avant de sortir de char<re, les Consuls allèrent ren-
dre visite ;'i révêque :
'< Le XXV'li' de Décembre 1O29 nous avons vizite
« Monseigneur d'Aj^en et lui avons remontre la neces-
'( site de nos atTaires qui nous avoient obli^^es en son
« absence de fere de «grosses dépenses pour la nourri-
« tuirc des reli«;ieux exposés pour la consolation des
« malades et entretenement d'iceulx dont nous aurions
« prie et requis Monsieur son vicquaire g'' et messieurs
« du Clergé nous vouloir soulager de partie dicelles et
« a faulte de ce fere nous aurions este constraints de
« saizir leurs reveneus pour raison desquels le procès
« en est pendant en la Cour de Parlement de Bordeaux
<' ce quy ne feust pas tirnce s'il eiist este présent oti
« dans nostre voisinage parce que nous sommes fort
>< asseures quil y eust contribue de ce qui pouvoit estre
« necessere pour cest effect : C'est pourquoy nous lavons
« prie de vouloir terminer cest atïere a Tamiable et par
« accommodement plustost que par les rigueurs de la
< justice. Surquoy il nous a respondeu qu'il vouloit
< demeurer en bonne intellisrence avec nous et nos suc-
« bailhe copie aux fins de payer nostre coUe part de l'entretenemcnt
« du Rcgiinent de Foncaude et Sainte-Croix a la requeste des habi-
« tans de Monpezat, Puylaroque, Belfort, Mirabel, Septfimts et aul-
t très lieux circonvoisins de Montauban et Caussade... » suivant les
Ordonnances de M. le Prince, du duc d'Epernon, du maréchal de Bas-
sompierre et de M de Monferrand. M. Gueysse, receveur du taillon.
avait en main les quittances de ce que le Pays d'Agenais avait payé
pour cet entretien. Il promit aux Consuls d'Afren, à titre de syndics
du Pays, de les fournir et de les vidimer.
De son côté, le trésorier de la ville, Hector Lafage, tenait les quit-
tances pour la partie de l'imposition qui lui incombait. On décida
d'envoyer toutes ces pièces à l'avocat Sicre qui devait défendre la
Communauté 3'Agen au conseil du Roi. (Arch. d'Agen. BB. 51,
pp. 165 et 167. La requête des Communes du Bas Quercy contre les
Consuls d'Agen est du 6 Mars 1630.) (Arch. d'Agen. CC. 192).
« cesseurs mais quil cstoit besoing avant parler plus
,x de ceste artère dattciulre le sieur de Daurée quy
. est en Cour pour demander au Koy quelque soulage-
« ment de nos despenses faites, et toutes choses devant
« demeurer en Testât jusques a ce que led. s' Daurée
« feust de retour (i) ».
Les reproches qu'adressaient les Consuls à Monsei-
gneur l'évêque et comte d'Agen et la saisie pratiquée
par eux sur les dîmes ecclésiastiques étaient également
justifiés.
L'évêque, qui pendant les premiers mois de l'an 1628
avait présidé le Bureau de la Santé, y vint pour la der-
nière fois le 5 Octobre et disparut.
Quand la peste força les portes de la ville, il s'éloi-
gna pour ne reparaître qu'après le danger, tandis qu'un
certain nombre de religieux des Ordres mendiants de
la cité se dévouaient au bien public pour le soulage-
ment des pauvres et le traitement des pestiférés.
Les Consuls avaient demandé au clergé de participer
aux frais d'entretien de ces religieux. Le clergé, avec
l'âpreté des corps privilégiés qui ne souffrent aucune
atteinte à leur privilèges, refusa ou marchanda. Et
cependant chaque jour dans les Eglises d'Agen on
répétait ces paroles évangéliques :
Panein nostrum qiiotidiamim da nohis hodie !
Le pain quotidien !
Les Consuls, qui avaient la charge de milliers d'exis-
tences, s'efforçaient de le donner.
En dépit des résistances et des logomachies procédu-
rières des procureurs, ils veillaient au salut des pau-
vres .
(l)Arch. d'Agen. BB. 51, p. 126.
CHAPITRE m
La Grande Famine
L'hiver de 1630-1631 fut mauvais, « un tueur de pau-
« vrcs f^ens », comme dit un de nos poètes.
En Mars 1C30, tombèrent des pluies torrentielles qui
noyèrent les céréales, le mauvais temps continua ; il
plut sur la fleur : les récoltes fuirent perdues.
«.Au mois de May 1630 et durand icelluy il pleust en
« abondance desquelles pluyes furent noyez les fruictz
'< de la terre, et delà s'ensuivit la grande famine qui
« commença a Teste ensuivant et dura despuis le mois
« d'Aoust 1630 jusques a la fin du mois de May 1631 (i ) ».
Malebaysse se trompe. La famine, « la grande fa-
mine 1* se prolongea jusqu'à la récolte de 1631, c'est-
à-dire jusque vers le milieu de Juillet.
Le mal de misère était d'ailleurs si grand, au com-
mencement de 1630, qu'en une des terres les plus fer-
tiles de notre pays d'Agenais, terre aujourd'hui séparée
de nous, à Valence d'Agen, il y eût le 11 Avril 1630
comme un recommencement de ces « croquants » si
prompts à s'insurger.
Les pauvres, à qui manquaient les secours, se réuni-
rent sur la place publique de cette bastide, emportés de
colère contre le chapitre de St-Caprais d'Agen qui ne
voulait rien céder des dîmes qu'il prélevait sur St-Ca-
prais de Cornillas et Notre Dame de Valence.
Les pauvres dans leur assemblée de plein air nom-
(I) Journal des Malebaysse. (Rev de l'Atrenai?. T XX p 245).
nièrent un syndic qu'ils chargèrent d'aller porter leurs
doléances au chapitre et de réclamer « leur congrue
A part et pourtion des fruicts décimaux » .
Leurs cris se lieurtèrent à des oreilles fermées. Il
fallut qu'en Septembre de la même année un arrêt du
Parlement de Bordeaux condamnât le chapitre de St-
Caprais à abandonner aux pauvres la sixième partie des
dîmes qu'avec la dame de Valence, noble Brandelyse
du Béon de Masses (i), on évalua à loo livres par an,
somme que les Consuls distribuèrent aux indigents à
raison de « deux soûls par jour » et par tête.
L'année d'après, un jugement du sénéchal d'Agenais,
en date du 31 Mars 1631, condamna le chapitre de St-
Caprais d'Agen, à continuer à payer la sixième partie
des fruits décimaux levés sur la juridiction de Valen-
ce (2).
En consultant les Registres Paroissiaux de Ste-
Livrade. de St-Etienne-de-Foug.ères, de Casseneuil, de
Pinel et Hauterive, surtout les minutes notariales, les
documents des Archives d'Agen et des Archives Com-
munales, on peut reconstituer l'histoire de cette famine.
(ij Cette dame était la femme d'Emmanuel Je Timbrone, seigneur
de Valence, Castels, Cuq et autres lieux.
(2) V. Auguste Grcze. Valence d'Agenais p. p. 54 à 56 (Montau-
ban 1901). Ces jugements ne lassèrent pas la résistance du chapitre de
St-Caprais. Le 15 Mai 1644, les pauvres de Valence, « périssant de
faim», pillèrent le creux où le fermier du chapitre, Pierre Renaud,
avait enfermé le blé. Ils étaient « au nombre de deux cens ou daban-
tage >. L'un d'entre eux, Cabarroc, exposa aux Consuls, venus sur
le champ de l'émeute, qu'en dépit des ordonnances du Roi et dans
l'impossibilité où leur pauvreté les mettait d'obtenir jugement de l'Evc-
que ou du Sénéchal, ils s'étaient emparés des grains, ollrant de resti-
tuer le surplus de ce qui leur était dû. (Ibid. p 56).
39
Malheureusement les Registres de la plupart des pa-
roisses, concernant cette période, sont ou perdus, ou
muets. Ainsi à Villeneuve d'Agenais et ailleurs les
Mortuaires de 1630- 1O31 ont disparu. Il a donc fallu se
contenter d'utiliser ceux qui restaient et juger par eux
du fléau qui anéantit la population.
Dans toute la France, la famine désola les popula-
tions. Gaston d'Orléans, le frère du Roi Louis XIII, lui
écrivait la lettre suivante, en l'an 1631 :
,. ... Je vous dirai ce que j'ai vu. C'est qu'il n'y a pas
* un tiers de vos subjets dans la campagne qui mange
-< du pain d'ordinaire ; l'autre tiers qui ne vit que de
.< pain d'avoine et l'autre tiers n'est pas seulement ré-
« duit à mendicité mais languit dans une nécessité si
« lamentable qu'une partie meurt effectivement de
« faim ; l'autre ne se substante que de glands, d'herbes
« et choses semblables, comme les bestes. Et les moins
à plaindre de ceux-ci ne mangent que du son et du
« sang qu'ils ramassent dans les ruisseaux des bouche-
« ries. J'ai vu ces misères de mes yeux en divers en-
« droits depuis mon partement de Paris... (i) ».
C^ langage, La Bruyère le tiendra cinquante ans
plus tard avec la même vérité !
L'horreur est complète. C'était « la mâle rage de
« faim, selon l'expression des Consuls Agenais ».
La faim poussait tous ces misérables hors de leurs
cabanes de « tappie (2) » . Les routes se couvraient de
vagabonds, de mendiants, d'affamés à la recherche de
quelques aliments, des rebuts et des rogatons les plus
dé 2:0 Citants.
(1) Arvède Barine. La Grc^nde Mademoiselle (Rev. dc3 Deux
Mondes T. 154', page 279).
(2) Cabanes de torchis.
40
Les vagabonds étaient la plaie de la France entière.
En 1625, le grand artiste Callot burinait dans ses eaux-
fortes cette immense armée de misérables, de bohé-
miens, d'égyptiens, qui parcouraient le pays en tous
sens, sur des haridelles, maigres comme des sauterelles,
traînant après eux des bandes de femmes et d'enfants
Innombrables étaient les drilles, les malingreux, les
hubins enragés, les bossus, les rachitiques, les sabou-
leux épileptiques (i).
Qu'était-ce donc lorsque à ces troupes de gueux de
profession se joignait la cohue errante des paysans
traqués par la faim, courant comme des loups à travers
les campagnes désertes et sans pain ?
On croirait entendre les lamentations du Bourgeois
de Paris sur la famine de 1438, qui précède la peste :
« Peu de gens mangeoient de pain leur saoul, ne
« povres gens ne beuvoient point de vin, ne mangeoient
« pas de char, qui ne leur donnoit ; ne mangeoient que
« navetz ou trognons de choux mis à la braize, sans
« pain ; et toute nuict et jour crioient petits enfans et
« femmes et hommes : Je ineur ! Hélas ! Doux Dieu, je
« meur de faim et de f roit » .
A mes\jre que l'hiver de 1630-163 1 approchait, les
vivres se faisaient de plus en plus rares et les cadavres
des faméliques jonchaient littéralement les champs et
(i) En 1614, les Cahiers des Etats d'Agenais aux Etats Généraux
retentissent de plaintes contre. les mendiants :
« Art. 67. Tous vag-abons, bohémiens, Eg-yptiens et autres gueux et
« feneans vuideront le royaume à peine des galères et sera enjoint
« aux Consuls des villes et lieux où ils seront trouvés vaguants de
« leur courir sus, s'en saizir et les conduire à la plus prochaine
« Consiergerie de la Cour de Parlement pour y estre détenus au pain
» du Roy ». (V. G. Thplin. Doléances du Tiers Etat du pays d'Age-
nais aux Etats ifénéraux, p. 36.)
4ï
les clicmiiis. Dans les villes et les villaj/es, parmi la
population agglomérée, la mort exerçait aussi ces ra-
vages, mais pour ceux qui abandonnaient leur foyer,
beaucoup mouraient au hnsard de leurs pas, repoussés
sans pitié des villes où ils espéraient trouver le vivre et
le couvert.
Le 1'='^ Décembre 1O30, à Ste-Livrade, on releva le
cadavre d'un entant de bohémiens que sa mère avait
abandonné. On trouva « au devant de la porte du clois-
«. tre (des Bénédictins) une petite créature de Boïmes,
« âgée de six mois a..
Le 13, un enfant de 10 ans, Bertrand Lapascalie, fut
rencontré gisant et inauimé devant une des portes de
la ville.
En 163 1, « une pobre famé » fut trouvée morte dans
la grange de Vistorte, procureur d'office de la Cour de
Ste-Livrade. A la chapelle de N.-D. de la Rose, c une
pobre filhie » et quelques jours après, une autre « pobre
filhie » au même lieu, morte l'une et Tautre de faim.
L'Hôtel-Dieu de la même ville recueillit des enfants
de 10 ans, de jeunes mendiantes de 12 ans, d'autres
Agées de 20 ans, qui venaient y mourir ou qu'on y
apporta mortes. Et tous ces cadavres sont anonymes :
on ne sait ni qui ils sont, ni d'où ils viennent (1).
Le drame de la faim continue et s'aggrave. Dans les
Registres Paroissiaux de Saint-Etienne-de-P'ougères,
juridiction de Sainte-Livrade, une enfant de 13 ans,
Bonne , de la juridiction de Saint-Pastour, meurt au
village de Lamothe ; un autre abandonné, Charles
Pilles, âgé de 12 ans, meurt au lieu de Robert (1630) (2).
A Fongrave, « parmy les champs », non loin du cou-
vent des femmes nobles de l'Ordre de Fontevrault, gît
Etienne Court, le Matoulayre, âgé de 51 ans.
(1) Seg. Far. Ste-Livrade (An 1630-1631).
12) Res: Par. de St-F.tienne-de-Fougères (An 1630-1631).
4i
Un frère et une sœur, Béraude et Pierre Naugé, l'un
de 20 ans, l'autre de 15, viennent mourir dans le bourg
de Saint-Etienne (Février) ; un mois après, le père y
meurt à son tour.
En compulsant ces Registres, rédigés par le curé
Torrent, on reconstitue l'histoire lamentable d'une
famille Lapeyre, du lieu de Las Treilles, à peu près
anéantie par la misère. En Novembre 1630, meurt un
jeune homme de 20 ans. En Janvier 1631, « hors et fort
« près du bourcq », Jehan Lapeyre, âgé de 3 ans ; en
Février, Jeanne Lapeyre, âgée de 4 ans ; en Mars,
Antoinette, âgée de 6 ans ; en Avril, Jean et Arnaud
Lapeyre ; une autre fille, Marguerite, trouvée morte
«hors du bourcq », c'est-à-dire en pleins champs. Le
martyrologe de la famille se termine par le décès de
Géraud, âgé de 30 ans.
Des mendiants, étrangers à la juridiction, y vinrent
expirer : à Portai, Jeanne Mathieu, âgée de 7 ans, de
la juridiction de la Maurelle; dans le bourg, près d'une
meule de paille, Jehan Antony,de Puymiclan ; à Portai
encore, Marquèze Blanchou, de la paroisse de Pinel, et
à Lamothe, un enfant inconnu de l'âge de 13 ans. Une
femme de Saint-Etienne, Catherine Peyrebrune, fut
trouvée morte à Saint-Jean-de-Cugnac, dans la juridic-
tion de Monclar, et dans le bourg, périrent Pierre
Perbos, « sargent des Conseuls », âgé de ôg ans, Jehanne
et Anthoinette Perbos, âgées l'une de 6 ans et l'autre
de II (i), et tous de faim.
On ramassa encore des cadavres à Coutailhou, chez
M^ Philip de Barroussel, Conseiller du Roy à la Cour
Présidiale ; d'autres, sur divers points de la paroisse,
venant de Castelmoron, de Parlât (Monclar), de Mon-
tastruc.
(I; AV^. Par . de St-Etienne-de-Fougcres (An 1630-1631),
AS
La plupart étaient des inconnus. On les enterrait dans
le cimetière des pauvres (i).
A Casseneuil, le vicaire G. Gizard mentionne une
série de morts de faméliques : « A Saint-Jean hors les
« murs, uuij; homme de Peyrilhac, ne scachant le nom
« ni surnom » ; « eune femme morte à la metterie de
« Vistorte dict a Pechieu là où elle feust ensepvelye ».
Le 7 Mars, le vicaire enterre à Saint-Jehan « ung petit
« enfant aagé de six ou sept ans qu'on truva mort entre
« les deux portes de la ville ; eune femme et ung sien
« fils, lesquels estoient de la juridiction dé Puiolz,
« n'ayant pu sçavoir leurs noms ny surnom et moureu-
« rent à la metterie de Grandenotz :.
Le 30 Mars, on enterre au cimetière de St-Johan
« ung jeune filhe... qu'elle avoit dict avant de mourir
v< qu'elle estait de La Maurelle (2) ».
Le 29 Mai, on" ensevelit, dans un jardin et non au
cimetière, une pauvre fille huguenote et en marge de
Tobituaire', on lit :
« Nota. Le 29 j"' du moy de May 163 1 feust ensepve-
.< lye dans le jardin du s"- Rocquies une.. . hlhe d'autant
« qu'elle estoit de la religion ».
On ne recevait pas de Huguenots en terre sainte.
Rien de navrant comme la lecture du Registre pa-
roissial de Pinel et d'Hauterive (3). Grâce au vicaire
(1) Ibid.
(2) Seigneurie delà Maurelle (Aujourd'hui canton de Stc Livradc),
(3) Ce Registre fut découvert à la mairie de Pinel par M. Capmarty,
alors instituteur public dans cette commune, et signale aussitôt par
M. George Tholin, archiviste de Lot-et-Garonne, au Ministère de
l'Instruction publique. Un moment égaré, on l'avait cru perdu. Ce
n'était pas sans amertuye que M. G. Tholin parlait de ceUc irrépara-
ble perte. Le Registre avait été simplement emprunté. Il a été tout
naturellement renjis et est aujourd'hui sauvé.
44
Filholly (.1), nous possédons le manuscrit le plus vivant
et le plus circonstancié des documents ecclésiastiques
de cette espèce pour l'histoire de la famine et de la
peste.
On pénètre ici dans un des cercles de l'Enfer Dan-
tesque.
« Le 8« Octobre 1630 ay enseveli Jehan Espinesol, dit le cuisinier,
< aagé de cinquante ans, et moureust dans l'écurie Je Monsieur
« d'Hauterive ».
« ... le enseveli un petit gfarsoun del parou ?... qui est mort de
« fain. Plus ie enseveli deux petis anfans et une petite filie des hari-
« guets de blanchou et sount mors de fain...
< Plus ie anseveli un petit anfan et une petite filie de Gorgi Vinials
i< qu'ils sount mors de fain...
« Plus ie anseveli deux petis anfans... fils de feu Guiral Horadou
« et sount mors de fain du village de Pasture...
« Plus se trouva morte une povre filie tout près du village de Le-
« mousi et moureust de fain...
« Armand Landrivie aagé de sinquante ans du village de Coste a
€ esté truvé mort dans la grange du Scignieur d'Hauterive (18 Nov.
« 1630).
c ... Le même jour neufiesme (Febrier)ie enseveli Guilien Laconque
c dans le cemitière de Pinel aagé de trente et sinq ans et en mesme
« tans Ion vint dire que soun fraire Pierre estoit mort vers pauliac (2)
-< ils sount tous deux morts de fain...
< Le iudi saint vingt et huict Mars feust trouvé mort Thouniou
« Dugols dans le boix de Baliarget et mourut de fain ».
< Le dernier Mars 1631 ie anseveli ian Siferas aagé de sincquante
« ans... le truve mort dans la grange de la dame du présent lieu est
« mort de fain...
« Le digiesme Apvril 1631 ie anseveli... ichan Fichart aagé de
€ vingt et sine ans et ausi je ansevelie Catarine Fichart sa seur aagée
» de vingt et trois ans et sount esté mis dans une mesme foce par
t moy...
■- Ce vingt et trois Apvril 1631 ie anseveli dans le cemitière d'authe-
(i) Le vicaire Filholly était originaire de Casseneuil, comme en té-
moigne le Registre paroissial de cette ville de 1614 à 1638.
(2) Paroisse de Ste-Livrade, jurid. de Casseneuil.
45
< rive Fr<uii,*)iâ Bclmoun Jict lou cap blanc qui muureu«t tout prc« de
< la incson Je VcJrincs au milieu du chemin, analant i Saintc-Livrade
« la (m Mademoiselle d' A uthcrive lanvoia chcrscr et luy valia un lin-
« Bun (i) pour le plier il mourut de fain...
Mademoiselle d'Hauterive eût pitié de ce malheu-
reux. Elle lui ménagea des funérailles décentes.
A toutes les pages du Registre, l'encre jaunie du
vicaire laisse tomber cent fois comme goutte à goutte,
cette lamentable et univoque litanie : Mort de faim.
A ce moment, le bruit courait que la récolte avait été
abondante au Béarn. Beaucoup d'alTamés en prirent la
route, le long des chemins « Roiimions » de St-Jacques
de Compostelle, se traînant vers le Béarn, comme vers
la terre promise, et jalonnant la longue route de leurs
cadavres émaciés.
« Plus est morte de fain dans le Biar la femme del piel rouj,'e de
(f reginat.
» Plus est mort de fain darts le Biar un fils de Lespaniol de Bouto-
< rie (2).
< Plus Thoni Ficliart dit tuste case et mort de fain au pais de Biar,
€ estant du villai^e de Baillarsfuet.
Plus loin, le vicaire Filholly complète son acte mor-
tuaire :
« Le \ïT\gl et deux mai 1631 ie enseveli dans le cemitière de Pinel
« Guiliamette Laporte famé de feu Thoni Fichart aagée de sincquante
* ans; ledit Thoni Fichart mari de la présante defounte et mort au Biar,
» ausi ungsien fils qui étoit abec lui qui ce noumoit Pierre âgé le père
« sincquante et sine ans et le fils vingt ans : moureurent tous de fain...^
« Plus mort au Biar an demandant l'aumosne Arnaud Poujade...
« plus y et mort la Maroune, plus y et mort la Gravieillc de raschet,
» plus y et mort Larnaussiade et soun fils... (3)
(1) Un linceul.
(2) Boutoric, Village disparu, situe alors au N. du bois d'Haute-
rive.
(■3) Ces quatre derniers morts sont mentionnes après le mémoire sur
la peste au même registre.
46
Encore une dernière citation ;
t ... Le quatrième juillet 1631 ie ansevelie dans le cemitiérc de Pi-
« nel Bertrande Poupnorat et aussi une sienne tilie et soun mari inou-
« rut dans le pais de Biar : tous soun mort de fain, estant du viUaj^c
« de Perouty. Ladite Bertrand étoit aagée de trente ans et soun mari
« d'autan et sa petite filie de huit ans...
Terminons ici ce long voyage dans le pays de. la
faim, dans cet Agenais que la maladie et peu après la
peste « désertèrent > comme dans les sombres temps
des environs de l'an mille.
Tous ces troupeaux errants d'aflfamés périssaient.
On les enterrait où on pouvait, pêle-mêle, à St-
Etienne dans le cimetière des pauvres, à Casseneuil au
cimetière St-Pierre et St-Pol, au cimetière de St-Joseph
et au cimetière des pauvres, celui de St-Jehan hors
les murs.
La terre regorgeait de cadavres où les membres
d'une môme famille, mourant parfois le mêm,e jour,
trouvaient une commune paix dans une commune fosse.
A ces cadavres desséchés par la fièvre, on faisait une
dernière aumône, celle de la terre qui les recouvrait et
celle de leurs funérailles.
En marge des décès du Registre paroissial d'Haute-
rive et de Pinel, on lit cette brève annotation du
vicaire FilhoUy : Rien ! Rien ! Rien ! ; c'est-à-dire pas
de casuel. Ainsi va le Registre jusqu'au jour de la
Madeleine où le vicaire commença son mémoire sur la
peste.
\
CIlAriTK'K IV
La Mortalité de 1630-163I
Si on consulte maintenant les tables de mortalité au
point de vue statistique, les chiffres révèlent une morta-
lité excessive, dont l'immense majorité était duc exclu-
sivement à la faim.
Nous prendrons les décès que nous avons pu établir
d'après les Registres Paroissiaux de Sainte-Livradc, de
8aint-Etienne-de-Fou}^ères et de Casseneuil :
Paroisse de Sainte-Livrade d'Agenais
AN 1630
Avant la famine
Janvier 4 décès
Février S —
Mars 1 1 —
Avril 7
Mai s —
Juin 5 —
luillet 7 —
Fendant la famine
Août 20 décès
Septembre 51 —
Octobre 44 —
Novembre 36 —
Décembre 36 —
187
50 -
Ainsi, dans les sept premiers mois de 1630 de morta-
lité normale, nous trouvons 50 décès : dans les cinq
mois suivants, nous en trouvons I87. — Différence en
plus : 137 !
P2n l'année 1631, les chiffres deviennent formidables
dans cette même juridiction de Sainte-Livrade.
48
La famine, pendant l'hiver de 1630-1631, battait son
plein.
AN 1631
Pendant la famine Apres la famine
Janvier 93 décès Juillet 31 décès
Février 112 — Août 14 —
Mars 97 — Septembre 14 —
Avril yi — Octobre 22 —
Mai 81 — Novembre 12 —
Juin 29 — Décembre 13 —
493 — 98 —
Pendant la famine, il mourut 493 personnes en 1631,
et après la famine, la mortalité tomba à 98 (i).
Ditïérence en plus, pour le premier semestre, 395 !
Si on totalise pour chaque période les décès enre<^is-
trés, on trouve :
Période famélique (1630), cinq mois 187
— — (1631), six mois 493
6^0 décès 6S0
Période normale (1630), sept mois 50
— — (1631), six mois 98
148 décès I4y
Total en 1630- 163 1 82S'
Ainsi, dans la seule paroisse de Ste-Livrade, qui
avait alors de 3 à 4000 habitants, on arrive à ce chiffre
prodigieux de 828 décès, répartis sur les deux années
de 1630 et 163 1, sans y comprendre encore les victimes
de la peste qui suivit, à partir de Juillet 1631, chiffre
(I) La population actuelle de Saintc-Livrade s'clévc à 3,000 âmes
environ.
49
qu'on ne saura jamais, puisque les morts n'étaient
qu'exceptionnellement consignés sur les Registres
paroissiaux.
On suit jour par jour sur ces Rejjistres la marche du
Héau .
Dans la seule journCe *.lu 7 Janvier 1631, il y eut
Il décès. En Février la moyenne quotidienne fut de 4.
Le 7, le y et le il furent particulièrement meurtriers :
il y eut respectivement 9, 7 et 7 morts sur chacun de
ces trois jours.
La mort enleva une grande quantité d'enfants : On
eut dit le massacre hérodien de ces pauvres innocents.
Dans la paroisse de St-Etienne-de-Fougères, juridic-
tion de Ste-Livrade, qui comptait alors 7 à goo habi-
tants, la mortalité est proportionnellement la même.
Les Registres, étant pour cette période très incom-
plets, nous ne pouvons donner que des résultats par-
tiels.
Août
Septembre 10
Octobre 1 1
Novembre 10
Décembre 14
54
1630
Famine
9 décès
1631
Famine
Janvier 16 décès
Février
Mars
Avril
Mai
Juin
30 —
17 —
33 —
2S —
II —
135 —
Le total des décès d'Août 1630 à Juin 1631 fut de 189.
Ainsi la juridiction de Ste-Livrade, composée de ces
deux paroisses, vit mourir 1017 personnes, non compri-
ses pour la paroisse de St-Etienne les périodes de Jan-
vier à Août 1630, et de Juillet à Décembre 1631, que je
n'ai pu retrouver, et abstraction toujours faite des morts
par la peste qui suivirent,
50
La juridiction fut ravagée.
A Casscneuil, la situation était la même. Le mor-
tuaire de 1630 étant incomplet, voici le tableau de
la mortalité, de Janvier 1631 au 10 juin de la même
année (i) :
Janvier 27 décès
Février 34 — •
Mars 44 —
Avril 66 —
Mai 78 —
Juin (10 premiers jours) 9 —
Total 258 —
En étendant ces proportions à tout le pays, l'esprit
recule épouvanté.
Les morts dans l'Agenais furent en effet innombra-
bles.
Dans le Registre Paroissial de Puymasson (Port-
Ste-Marie), à la date de 163 1 (2), on lit :
Multi mortui sîint, sine numéro, causa famis .
Sine numéro ! (3) .
(1) Reg: Par. de Casseneuil (1614-1638). La population actuelle de
Casseneuil s'élève à 1800 habitants.
(2) Arcli. Di«s 904. (Par. suppl. E.)
(3) La natalité s'en ressentit. Ainsi dans la paroisse Je St-Orens, ju-
ridiction de Dolmayrac, la natalité était ordinairement de 30 annuel-
lement. La moyenne des années 1628, 1629, 1630, années de disette,
fut de 19. La moyenne de 1631, 1632, 1633 fut de 12. En 1634, le mou-
vement ascensionnel reprit. Il fut de 24 naissances pour cette dernière
année. (Reg. Par. dé St-Omer de Dolmayrac).
CHAIMTK'K V
Les Ventes de Terre
On voulait vivre cependant. Cette misérable vie, que
protèjre l'instinct de conservation, on voulait la défen-
dre contre les affres de la faim. A mesure que l'été de
1630 avançait, les aliments, déjà rares pendant la di-
sette de 1629, se rarétiaient de plus en plus. On n'avait
pas alors la ressource de la pomme de terre qui, depuis •
son introduction en France sous Louis XV, a résolu
tant de problèmes.
Il fallait se procurer de Tarèrent pour acheter des
j^ains.
oous Henri IV, la terre était morcelée et appartenait
à d'innombrables petits propriétaires. 1629, i^>30 et 1631
arrivèrent. Il fallut vendre à tout prix. On vendait
morceau par morceau ; les pauvres familles agricoles
surtout. Le morcellement disparut.
Les petits ménages de paysans n'avaient rien que
leurs lopins de terre : ils vendaient, la mort dans
l'âme ; ils vendaient, avec les larmes aux yeux, la terre
qui les avait nourris, la chair de leur chair, lambeaux
par lambeaux, comme les débiteurs livraient la leur à
Shylock. Ceux qui ne pouvaient vendre ou avaient
épuisé leurs ressources mouraient.
La terre était avilie et se donnait pour un morceau de
pain : la vie avant tout !
Les gens riches, nobles et bourgeois, achetaient, et
arrondissaient leurs biens, comme il résulte de l'examen
52
des innombrables baux de vente relatés dans les
minutes des notaires du temps.
De là vint, pour une bonne part, la reconstitution de
la orande propriété si morcelée sous le règne précé-
dent (i).
1630, 1631 sont deux grandes dates économiques pour
rhistoire de la propriété rurale en Agenais. Une
énorme masse de propriétés changèrent de mains.
Devant toutes les cours ordinaires de l'Agenais
étaient introduites des requêtes de la part de femmes
mariées autorisées de leurs maris, requêtes de veuves,
requêtes de tuteurs pour leurs pupilles, de mineurs,
n-arçons et filles, avec l'assistance des procureurs, solli-
citant tous la permission d'aliéner leurs biens « affin
« d'employer l'argeant à soy norrir et a l'entretien de
« leurs familhes » .
Les minutes des notaires fourmillent de ces requêtes
et de ces autorisations.
Dans les baux, réserve expresse est faite au profit du
vendeur de la cueillette des grains : blé froment, mes-
ture (bled), seigle, millet, fèves, garabaudes, arbeil-
les(2).
(1) Le même fait s'était déjà produit pendant la famine de 1572-73-
Par de nombreux actes passés dans « la boutique > de M« Jehan Pa-
pon, notaire royal à Dolmayrac, noble Jehan de Fayolles, écuyer,
sieur de Laval, du village del Chapat, aujourd'hui disparu, et où il
bâtit son château encore en partie debout, le sieur de Laval, dis-je,
arrondissait son bien par l'achat aux affamés de minuscules pièces de
terre. Comme en 1631, les acheteurs payaient souvent leurs achats en
nature. Ainsi en avril 1573, il acheta à Anthonie Berbié i cartonat,
23 escals, au lieu dit « Dessus lou sol », « moyennant le prix et somme
€ de 22 francs bourdeaux, 13 sols, 4 deniers » que cette femme reçut
€ en 7 cartions de bled froment et autre bonne monnoie, le tout pour
« employer à la nourriture et entretenement de ses cnfans à cause de
€ l'estérrilitè delà présente année» (Minutes J. Papon Avril I573)-
(2) Voir plus loin chap. VI.
§3
On vend des cartonats et des poignères, mais encore
plus des picotins, des boysselats et des escats(i). On
réduit les ventes au minimum. On les fragmente ; on
l'ait des réserves contre la faim et dans l'attente des
jours meilleurs.
Il en est ainsi dans les juridictions de Casseneuil,
Monclar, Villeneuve, Ste-Livradc, Dolmayrac, la Mau-
relle, Tombebouc, Monpezat, Agen et dans le reste du
pays.
Rien de poignant, comme le libellé des actes de
vente, sous leur sécheresse voulue et de style.
Le 3 Février 1631, Anthonye Pauty, veuve de Pierre
Courty, avec l'autorisation de la justice, vend à son
beau-frère, Bérengou Pauty, une « pugnère » de terre
dans la juridiction de Ste-Livrade pour la somme de
12 livres « qu'elle veult employer pour soy norrir et a
« cinq enfants qu'elle a, leur père mort de faim (2) » .
Une formule qui reparaît souvent 'est la suivante :
Anthoine Fauché vend à Charles Flouret, au lieu de
Merle, paroisse de St-Etienne-de-Faugères, un cartonnât
'< fesant ranthe à M^"" le duc de Mayenne (3) et au sieur
« Prieur de la ville de Ste-Livrade... pour la somme de
« ig livres... et icelle somme a dit avoir employé ez
« achapt de grains pour se norrir et entretenir la p"'<^
f année et sa familhe attandeu l'esterillité d'icelle(4) ».
Le 3 Mars 1631, la cour de MîPdaillan autorise la
femme Jeanne Lacoste, assistée de son mari Pierre Pes-
(I) Voir plus loin.
(ï) Minutes Lafaijjc 1631 (Etude R. DaliJou).
(3) Il s'agit de Henri de Mayenne, tils de Charles, le général de la
Ste-Ligue, baron de Montpezat, Ste-Livradc, Dolmayrac, duc d'Ai-
guillon, gouverneur de Guj'cnne depuis 1618. tue en 1621, au siège
de Montauban.
(4) Minutes Lafaige (1631) (Loco citato).
54
teilh, à vendre ses biens. Ladite Lacoste « .. estant tun-
< bée ez nécessite et maladye à canse de l'esterillité de
« la pr"^*^ année auroit fait attestation de sa poureté par
« devant l'ordinaire de Madalhan, le 3 Mars 1631, et
« requis luy feust permis de vandre et engager sesdits
« biens pour subvenir à sa norriture (i) ».
La dépréciation des biens était telle qu'en Février
1631, noble Jehan Charles de Cladech, écuyer, sieur de
Colombie (2), juridiction du Temple de Breuil, achète
de Bernarde Michel, au lieu de Marchols, juridiction
de Monpezat, une portion de maison avec deux cham-
bres -, un cartonnât de vigne à Pemirat; deux cartonnats
de terre, plus un cartonnât, plus un picotin à la Tuque^
près le Temple ; plus un loupin de terre et un loupin
de jardin, toutes pièces confrontant aux terres de noble
Charles de Cladech, le tout, pour six vingt livres (124
livres), qu'il paya en quatre pistoles d'or, pièces de
seize sols et autre bonne monnaie et le reste, soit 80 li-
vres, qu'il promit de payer en Avril (3).
Le 9 Décembre 1630, Guiothe Boé vend à Jehan Sal-
baing, bachelier en droit, lieutenant Royal en l'ordi-
naire de Ste-Livrade, un petit lopin de jardin, en la
rue de la Porte Campaigne, à Ste-Livrade d'Agenais,
32 livres 12 sols qu'elle veut employer « sçavoir 30
« livres à l'achapt de grains pour sa norriture et entre-
« tien à cause de la pouvretté enlaquelle elle est, veu
« l'esterillité de l'année qui court et le surplus au paie-
(i) Minutes Lafaige (Ste-Livrade).
(2) Jean Charles de Qadech avait été député parla communauté du
Temple aux Etats d'Agenais de 1631 (Voir «os cahiers de 17H0 par
Adr. Mondenard p. 205).
(3) Minutes Vistorte (Ste-Livrade),
S5
< ment du droict de lad. attestation et permition par
x elle obtenue (de la Cour) (i) ».
Guilhalme Marquez, veuve à feu Anthoine Carrière,
vend à François Meilheroux « tant en son propre nom
« que comme mère pitoiable de ses enfants » deux car-
tonnais de terre pour 4,s livres, dont elle reçoit le prix
en nature, à savoir -< 6 cartons milhet (2) et le surplus
« en bled mesture, mesure de ladite ville (de Ste-Li-
« vrade) lesquels grains lad. vanderesse a dict voulloir
« employer iceux grains pour sa norriture et entretien
« et des quatre enfans ou filhes qu'elle a, comme n'en
« ayant aucuns, veu l'esterillité de l'année (29 Janvier
'< 1631) (3) »•
Une autre misérable, Marguerite Fabre, « fesant pour
« Marguerite Mariol, sa lilhe » veut que le prix d'achat
de trois pugnères au lieu de Septfonts lui soit payé à
la semaine. Elle vend cette pièce à raison de ig livres
à Bernard Mariol, « laquelle somme ledit achapteur a
« promis et sera teneu luy payer par sepmaine à raison
« de six sols par jour par advance de payement et a
« bailhé illec à lad. Fabre sa mère pour amployer à la
« norriture et entretien d'elle et de sa filhe (4) ».
Le 29 Février, Olivier Paren vend à la Castanial,
juridiction de Ste-Livrade, un cartonnât semé de blé
froment pour 18 livres : « Ledit Guery achapteur sera
« teneu de livrer audit vandeur a proportion de ce qui
« luy a esté octroyé par lad. permission (de la Cour),
« quy est à raison de trois sous par jour, la norriture et
(i) Minutes Vistorte p. loi (Etude Molinié. Stc-Livradc).
(3) Maïs.
(3) Minutes Vistorte p. 136 Loco citato.
(4) Minutes Lafaige (Loco citato) Septfonts, jurid. de Ste-Livrade.
56
/ entretien diuUt Olivier Paren vandeur, veu l'esteril-
« lité de l'année et dixepte de «crains quy sont, comme
« est trop notoire (i) ^ .
Entendez maintenant cette terrible lamentation et
cette résignation héroïque. On dirait la Rachel biblique
pleurant ses enfants et ne voulant pas être consolée :
Marguerite Galop, femme de Jehan Descayrac, dit Cap
Blanc, vend au lieu de Vilot, sur les limites de Pujols
et de Tombeboucq, au bourgeois Jehan Jacobet, un
boysselat de terre pour la somme de 15 livres. « Icelle
« vanderesse a dit voulloir employer tant à sa norriture
« que de son mary et enfants qui sont dedans le lict
« mallades quy périssent de fain, comme elle conte fere
« à cause de l'esterillité de dixepte de la p"'*- an-
« née (2) ».
D'autres misérables, en loques et en haillons, ven-
dent non seulement pour se nourrir, mais 'encore pour
s'acheter des vêtements et couvrir leur nudité.
Le juge de Monclar autorise Jean Dalidou à vendre
à damoyselle Jehanne de Missandre, veuve de feu M'"
M« Marc de Roche « en son vivant conseiller et contrôl-
ée leur esleu en l'eslection d'Agenois », cinq picotins de
vigne à Las Turennes, pour la somme de 20 livres
«■ qu'il a dit voulloir employer à sanorriture et a achap-
« ter des habits pour s'habiller attandeu l'esterillité de
« la p"^e année et nécessité dudit vandeur (i«' Février
« i63i)(3)>^.
(1) Minutes Vistorte 1631, Ibid. (p. 160-1611.
(2) Minutes Vistorte p. 145, Etude Molinié Ste-Livrade. On appe-
lait t limites de Pujols et de Tombebouc » la frontière qui séparait
ces juridictions de celle de Ste-Livrade et la bordure de terrain qui
appartenait à la fois à la paroisse de cette ville et à la juridiction de
Tombebouc.
(3) Minutes Lafaigfe, Ibid.
57
Anthoine Fissard, en la juridiction d'Hauterive, vend
à M.'' Jehan Salbain;^, un cartonnât à La Claux de la Be-
trix et deux cartonnatsde vij^ne au Pech de La Tourte-
relle pour 30 livres « de laquelle somme ledit Fissard a
€ reteneu la somme de quinze livres pour les amployer
« à sa norriture et à s'achapter david (des habits) à
« cause de sa nuditté. . . (i ) ■ .
Anthoine, Anthoinette et Gcraud Mauron vendent à
Huguet Pouniarùdcun cartonnât au village de Menjous,
juridiction de Sainte-Livrade, moyennant la somme de
24 livres. Ils reçoivent 6 livres ou un carton de blé
'f- pour vivre ceste année à cause de Testerillité des
« terres » et le reste leur sera payé à Notre-Dame
d'Août (4 Mai 163 1) (2).
Al Camp del Rieu, près le village de la Brugne,
Marguerite Sipheras vend à J. Bardet (notaire), 2 car-
tonnais de terre, « sepmée de garrousses et de garabau-
« des » (3), pour le prix de 60 livres, sur lesquelles elle
en devait 30 à son acheteur pour le blé fourni « pour
« la nourriture et alimentation d'icelle et de ses entants
« et de sa maladye pendant trois mois. » Elle reçoit 20
livres en quarts d'escus et le surplus, soit 10 livres,
Jehan Bardet s'engage « à les lui payer dans la quin-
« zaine de May prochain qu'elle employera à norrir son
< mary, elle et sa famille (15 Avril) (4).
Autre curieux exemple de ces ventes pour acquitter
des dettes contractées par l'achat de grains.
(1) Minutes Vistorte, IbiJ. p. 20 I.A Jieirix qu'on appelle aujour-
d'hui la Perdrix
(2) Minutes Lafaige.
(3) Jarousse ou Vesce cultivée (Vicia Sativa] variété à graine noire
Garabaude; espèce de vesce.
(4) Minutes Vistortc.
S8
Marguerite Paris vend à Jehan Jacobet, avec l'autori-
sation de l'ordinaire de Tombebouc, une maisonnette
« avec un loupin de jardin », au lieu de Vilot. pour 4S
livres, « de laquelle somme ladite vanderesse et sondit
« mary ont reçeu la somme de setze livres dix sols pour
4 venthe d'ung sac de febves qu'ils ont reçeu si-devant
« et employer à leur norriture et entretenement (par
«acte du 5 Janvier 1631)... et du surpins de ladite
«somme susdite led. achapteur en a payé à l'acquit
« et descharge de M'= François Védrines , procu-
« reur du Roy en la p"^^ ville pour la somme de cinq
« livres pour la vanthe de ung carthon de milhet qu'il
« leur tist pour leur norriture et entretien, ainsy que
« appert par obligé du 7'" febvrier 1631 par moy reçeu
« et le surplus de ladite somme qu'est vingt-six livres a
« a receu reallement en carts d'escus et autre bonne
« monnaye comptée, de laquelle c'est contemplée . . . et
« desclaires volloir employer ladite somme à l'achapt
« de grains pour soy norrir et alimenter elle et sa fa-
« milhe, à cause de l'estérillité de l'année et dixette de
« grains comme il est trop notoyre. . . (30 Avril 1631). »
Les actes notariés, constatant ces détresses, se
comptent par milliers. A les parcourir tous, on n'en
finirait pas.
Heureux encore ceux-là qui pouvaient vendre.
La plupart périssaient « pour ne trouver à vendre les
« biens, dit le Bureau de la Santé (i) »,
L'argent, libérateur de la famine, se cachait ou
n'existait pas. Des gens aisés, voire riches, mouraient
de faim, ne pouvant ni vendre, ni emprunter. Passés à
l'état de pauvres, ils imploraient l'assistance des Com-
munautés pour ne pas succomber.
(I) Arch. d'Agen. GG. 255.
59
Dans la jurade du ^ Janvier 1631, les Consuls d'Ai-
guillon, M. Michel Bares, premier Consul, Claude
Donnadieu et Jean Moynie exposent aux Jurats par
l'organe de M. Michel Bares :
< ... Que a raison de la grand JiseUe quest dans le pays, il y a
« grand nombre de p.mvres en la près, ville et jurisdiction qui ne
« trcuvcnt neulle cominodittc pour salimenter par prcst ny autrement
« '/Hoiijiic la plus grand part ayent des biens fonds et commodiilez
* et à cause de ce périssent Journelletneut de fain comme il est no-
« thoirc à tout habitants de la près. Ville tellement que sil n'cstoit
< pourveu a telles nécessites les pauvres manœubres et plusieurs au-
♦ très personnes de cette ville et jurisdiction son en dangicr de périr
< de fain (l) >
A Ste-Colombe, en Brulhois, sénéchaussée d'Arma-
«jnac, les Consuls Villeneuve, André, Loutgratte, La
Claverye tiennent devant la Jurade le langage sui-
vant :
« Il est nothoire a tous la grande disette en laquelle on est la pre-
nante année par toute la France, mesmcinent dud. lieu et jurisdic-
tion, et que la plus grande partyc des graines et vivres de la dicte
jurisdiction, comme on estoit sur le poinct de la récolte et culie
(cueillette) desd. grains, feurent battus de la gresle et que aud. lieu
et jurisd. il y a un grand nombre de pauvre dixetteux et necessitcuv
privés de toute sorte de vivres et commodittez pour se substanter,
lesquels dits jurats voycnt mandier devant leurs portes estant en
grand dangier de mDurir de fain. Aussy disent lesd. Consuls que
plusieurs habitants dud. lieu et jurisd. de Sainte-Colombe sont char-
gez de familles, lesquels possèdent et leur appartiennent may-
sons, terres, vignes et preds et boix, qui sont dépourveus de toute
sortes de vivres et commoditez et pour s'alimenter il leur est im-
possible de treuvtr que personne leur veuille rien prcster sur
leurs possessions et à cause de ce eulx et leurs familles sont en dan-
ger de se périr et perdre de fain, mesmes que leurs dicts bien de-
meurent en friche et incultes... (2).
^i) Arch. Dles, Aiguillon S65 (Suppl. E ) (1631).
(2) Arch. Dles Ste-Colombe 617, p. 201 (Suppl. E.) (1631).
CHAPITRE VI
Valeur des Terres et des Grains
En prenant le cartonnât pour unité, il est facile de
montrer que les terres étaient vendues à vil prix (i).
Dans les Juridictions de Villeneuve, St-Pastour, Cas-
seneuil, Monclar, Ste-Livrade, Monpezat, Dolmayrac,
la Maurelle, Tombebouc, le Castella, Savignac, Cours
etc., le prix moyen du cartonnât avant la famine était
dans les boniies terres de labour de 50 à 100 livres le
cartonnât; la vigne valait pour la même contenance,
100 à 120 livres ; les prés, 100 à 150 livres.
En 1627, on vendait, dans la juridiction de Ste-Li-
vrade, le cartonnât de terre :
A Maux 60 livres.
A Jean Lou Négré 75 —
A las Capounals 60 —
A la Porte duTéron(Ste-Liv.) 75 —
(l) Le cartonnât variait de 9 ares à 12 ares et quelques centiares.
La sexterée valait 8 cartonats ; la poignere valait un demi-carton-
nat ; le picotin i are et 50 centiares ; le boysselat i are 37 (mesure de
Ste-Livrade^ ou 9 escats ; l'escat valait 17 centiares.
Dans la juridiction de Monclar, le cartonnât valait 14 ares 17. La
mesure de Dolmayrac, Lacenne, Madaillan, Montpezat, Le Temple
était celle d'Agen (9 ares 11) Dans les juridictions de Villeneuve,
Casseneuil, Ste-Livrade, les mesures agraires étaient les mCmcs (12
ares 15).
Cl
Noble Bernard Dangeros vend encore àjehan Haratet,
notaire royal de Villeneuve, six cartonnais de terre à
Vidalot pour 315 livres.
En 163 1 les prix s'avilissent jusqu'à tomber à des
prix dérisoires.
Dans les exemples qui suivent n'entrent en ligne de
compte que les bonnes terres de labour, les vignobles
et les prairies.
Les meilleures terres de la juridiction de Ste-Livrade
d'Agenais se vendent au cartonnât, sous les murs de la
ville, tout près de la grande métairie des Bénédictins,
à la Porte du Téron, 2,s livres ; al Cayras, (aujourd'hui
Balézy), 24 livres •, à la Porte Campagne, 26 ; à la Fon
des Capelans (le Breil) (i), le cartonnât de vigne est
donné pour 24 livres; à Montignac, François de Cours,
s"" d'Espalais, achète une petite vigne, à raison de 27
livres ; à Lombelles (Nombel), la terre vaut 12 livres.
Dans la juridiction de Dolmayrac, as Camps Naus, le
cartonnât vaut 13 livres. Le même s"" d'Espalais vend 3
cartonnats, al Claux de Bergonier, 36 livres.
Aux portes de Villeneuve, à Bias, juridiction de
Tombebouc, le cartonnât est acheté 14 livres ; à la Croix
dePauchou,même juridiction, tout près de Ste-Livrade,
le même prix, 14 livres A côté de ce lieu, à Albefeilhe,
un cartonnât de vigne est cédé pour 24 livres.
Dans la juridiction de Monclar, les prix s'abaissent
encore plus. A Bichet, par exemple, le cartonnât se
vend y livres.
A Ferminiac, juridiction d'Hauterive, uncartonnat de
pré vaut 16 livres et à Coutaillou, même juridiction,
(i) La fontaine des Chapelains Je N. D. Je Tout Pouvoir de Villa-
inade.
62
dans le voisinage de la propriété du Seigneur baron de
Raffin et des terres de M'^ Philippe de Barroussel, con-
seiller à la Cour Présidiale, un cartonnât de pré est
vendu 30 livres.
Autour du monastère Cistercien de Pérignac, juridic-
tion de Monpezat d'Agenais, on vend as Manguets un
pré 28 livres, et à la Beausse, près de la métairie des
Religieuses de Fongrave, un autre pré se vend 12
livres, quoique en bien meilleur fonds.
Après la famine, les prix se relevèrent et pour n'en
citer qu'un exemple, dans la juridiction de Sainte-Li-
vrade, au lieu dit au Colombie, une vigne voisine de
celle de Montignac, citée ci-dessus, et voisine des vi-
gnes de la demo)^selle de Saint-Ris, veuve du sieur de
Colombie, est vendue 60 livres le cartonat, en novem-
bre 1631, c'est-à-dire le double.
Déjà, en Juillet, quatre cartonnais de terre, étaient
vendus à Las Capounals 240 livres, à raison de 60
livres le cartonnât (i).
Les terres étaient pour rien et les vivres hors de prix.
On vendait pour acheter des grains.
La lecture de tous ces baux provoque une amère
curiosité.
Les vendeurs, on l'a vu, se réservaient les récoltes
pendantes pour vivre ; d'autres voulaient que les paie-
ments des prix de vente fussent échelonnés et soldés à
(i) Voir pour tout ce que dessus les minutes de Vistorte et de La-
faige, notaires royaux de Ste-Livrade (Etudes Dalidou et Moliniù).
63
la semaine et pariois émiettés jour par jour, au fur et à
mesure des besoins.
Dans beaucoup de contrats, les acheteurs s'engagent
à payer à la volonté des vendeurs, quand bon leur sem-
blera.
Des détenteurs de grains, vendeurs « pitoyables «,
c'est-à-dire humains, vendent au prix qui sera établi
à la prochaine récolte de juillet-août 1631.
Souvent aussi les paiements se font en nature. D'au-
tres touchent partie en nature, partie en argent.
Dans la délibération du Bureau de la Santé du XXl»
May 1629, on lit :
« Les grains prins de Violle, ont esté taxés en sa pré-
« présence et de Jean Cazabie, Tun de ses associés,
sçavoir :
« Le froment à sept livres quatorze sols le sac, la
« mesture à six livres douze sols le sac, la febve à six
« livres douze sols aussi le sac à laquelle raison il leur
« sera payé par lesd. sieurs Conseulz (i) ».
A Valence-d'Agenais, le blé valait 7 livres 4 sous en
Mars 1629.
Le mercredi, 28 Mars 1629, sur les sommations des
habitants, les Consuls de Valence, au détriment du
marchand Antoine Passalaygue de la paroisse d'Espié-
monts, juridiction de Goudourville en Agenais, s'empa-
rent de « neuf vingt-deux sacs, un livrai, quatorze
v< coupes de bled froment, mesture et febves qui appar-
• tiennent aud. Passalaygue ».
(I) Arch. J'Açcn. GG 255, p. 120 v
64
Ils les revendirent à la population « à raison de sept
« livres quatre soûls le sac mesure de lad . ville, tant
« froment, mesture que febves ».
Le 7 Avril, Passalaygue reçut pour prix de ses grains
1314 livres is sous (1).
j'ai relevé dans \q Livre Joîir)ial des Conseils iVAgen
les prix suivants pratiqués sur les marchés de cette
ville :
24 Février 1629, Blé à Vil livres le sac .
7 Mars 1629, Blé à VII livres 2 sols le sac.
5 Mai 1629. Blé à VIII livres le sac.
21 Septembre 1630, Blé à XII livres le sac.
27 Novembre 1630, Blé à XII livres le sac (2),
Les oscillations de la mercuriale d'une juridiction à
l'autre étaient considérables.
Ainsi dans la juridiction de Sainte-Livrade, le blé
valait 6 livres le sac en 1629 ; le seigle 4 livres ; les
fèves 3 livres.
Après les pluies de 1630, la pipe de froment valait 45
livres, c'est-à-dire 22 livres 10 sols le sac ; la pipe de
seigle, 30 livres; la pipe de fèves, 22 livres io sols, soit
6 livres de plus par sac de blé,en moyenne qu'au mar-
ché d'Agen (3).
A mesure que l'hiver approchait, la hausse des prix
s'accentuait de plus en plus.
En Février 1631, le blé valait à Layrac 22 livres le
sac.
(1) Au^. Grùze. Valence d'Agenais, p. 53. (Montauban 1901).
(2) Arch. d'Agen. B. B. 51 passin. En mars, la barrique de vin va-
lait 10 livres.
(3) Arch. Not. Ste-Livradc. Vistorte et Lafaige notaires royaux.
Pendant la famine de 1532, le blé valait 20 livres la pipe (Arch. d'A-
gen. E E. B.)
65
Le prêtre JeanDrappié, dans ses « Choses notables »,
ledit formellement :<' Le bled valoit à Layrac22 II. (i)».
Dans le I\e>;islre Parf)issial de Puymasson, près le
Port-Sainte-Marie, on trouve, à la date de 1631, les
indications suivantes : ' Le bled a valeu la présante
« année le sac, meseure du Port, 28 livres et 8 soûls.
« La febve, milhiet et barbotte et aultres menus grains
« 8 livres le carton (2) ».
En 1631, d'après les minutes des notaires, les «graines
valaient à Sainte-Livrade d'Aji^enais : le blé froment,
24 livres 5 sous le sac ; le carton de maïs (3^ 3 livres,
ce qui équivalait à 9 livres le sac ; le carton de fèves,
5 livres 10 sous, soit 16 livres 10 sous le sac (4).
Malebaysse a noté à Agen, pour ainsi dire, mois par
(i) Arch. Dles Suppl. E. Guq 155.
(2) Arch. Dles E. Puj'masson (XM. La liarbotte n'est pas autre
chose que les • Arbeilles » c'est-à-dire le Lathyrus Ciceru (Gesse).
D'après mon confrère le D"^ Chanteloube (du Fort-Ste-.Marie). cette
légumineuse est cultivée sous ce nom aussi bien sur la Rive droite
de la Garonne que sur la rive gauche (Rive droite : Lusignan grand,
Puymasson, St-Médard,Clermont dessous, Bazens, St-Julien etc. Rive
gauche ; Ste-Colombe, Montesquieu, Montagnac, Espiens, Bruch,
Xaintrailles, Monlgaillard etc., en Gascogne). Mon confrère me fait
observer que dans le Dictionnaire Encyclopédique des Sciences
Médicales de Dechainbre, on décrit sous le nom de Barbette la Vicia
Saliva. Mais ce n'est pas li notre espèce. Les fleurs du LalhjTus
Cicera (gesse) sont d'un rouge clair.
(3) Chose curieuse ! Le blé d'Espagne qu'on cultivait sur une
grande échelle en Béarn, en Gascogne, en Agenais: à Agen, au Port-
Ste-Marie, à Villeneuve d'Agenais, à Ste-Livrade, à Tonneins, à
Duras, etc. était une culture inconnue dans la juridiction de Casse-
neuil où elle ne commença à paraître que vers 1652. Le motif en <'tait
que cette culture était épuisante et que ce grain ' chargeoit et gastoit
« tout ». (Voir P. Hébrard. Querelles et démêlés d'un curé avec ses
paroissiens. In Revue de V Agenais. T. 28, p. 504).
(4) Ces prix équivalent à y6 francs pour le sac de froment, et à 112
francs l'iicctolitre ; à 36 francs pour le sac de maïs et 42 fr l'hectoli-
tre; i 66 francs pour le sac de fèves et 77 fr. l'hectolitre environ.
66
mois, les variations des grains, sur cette échelle de
progression .
Commencement de l'année de disette :
« Au mois d'Aoust 1630, le bled valoit 10 1. le sac.
K Au mois de Septembre 1630, le bled valoit 13 1, le
« sac.
« Au mois d'Octobre 1630, le bled valoit 16 1. le sac.
« Au mois de Novembre 1630, le bled valoit 17 1. le
« sac.
« Au mois de Décembre 1630, le bled valoit 20 1. le
« sac.
« Au mois de Janvier 1631, le bled valoit 22 1. le sac,
« Au mois de Febvrier 1631, le bled valoit 25 1. le
« sac.
« Les febves valoient 20 1. le sac.
« Les besses, arbelhes et garosses valoient 16 1. le
« sac.
« Le milhet valoit 20 1. le sac.
« Au mois de Mars 163 1, le bled valoit 19 1. sac.
« Au mois d'Avril 163 1, le bled valoit 17 1. le sac.
« Au mois de Mai 1631, le bled valoit 14 1. le sac,
« Et voilà la grande valeur du bled et autres gre-
« nés (i), »
Ainsi, à Agen, le prix du blé atteignit en Février
l'énorme prix de 25 livres. Si on veut se rendre compte
de l'énormité de ce prix, il faut, pour estimer le pou-
voir de l'argent à cette époque, le multiplier par qua-
tre, soit ICO francs le sac, c'est-à-dire, un peu plus de
85 litres.
Le fléchissement commença à se produire en Mars
1631. Un usurier accapareur se pendit de désespoir.
<'...!! eust un misérable cordier qui estoit uzurier qui
(i) Revue de l'Agenais, T. XX, p. 245.
67
« se pendit et estran^da lui-mesme le matin du vendredi
« sainct ut puis par santance de Messieurs les jeu;,'e
'< ordinaire et conseulz il feust condamné et porté sur
« un pouteau ors la ville derrière rHjrlisc Saincle-
• Foy(i) .
On ne sait quel temps le cadavre se balança au pu-
teau .
« n'este -grande cherté de vivres, ajoute le chro-
« niqueur, moureurent de fain i^rande quantité de
-< monde aux villes et aux champs (2) > .
Les faméliques qui n'avaient ni blé, ni seij^de, ni jra-
rousses, ni arbeilles, ni maïs, ni fèves, se nourrissaient
de {rlands, de racines et d'écorces d'arbres, et, comme
les bêtes, mangeaient des orties, l'herbe des champs, et
puis, épuisés et consumés par l'inanition, dévorés par
la lièvre de la faim, se laissaient tomber à terre pour y
mourir.
(1) Journal Agcnais des Malebaysse. Kcvuc Je rA-;cnais, t. XX,
p. 246.
(2) Ibidem p. 247. Pendant Tannce de famine 1572, Tannée de la
Sl-13urlhcleiny, le blé froment dans les juridictions de Villeneuve,
Ste-Livradc, Dol-nayrac etc., valait il a 12 livres le sac, soit environ
60 livres di- notre monnaie
CHAPITRE Vil
Les secours, les approvisionnements
et leur organisation
Pour apporter quelque soulagement à tant de misè-
res, quelles mesures prenait-on contre cette marée
montante ?
On tâchait d'abord de se débarrasser des pauvres
venus de partout et étrangers à la juridiction. Chaque
communauté expulsait sans merci les pauvres étran-
gers, trouvant qu'il était bien suffisant de secourir les
siens. Partout on faisait la garde aux portes des villes
dans le double but d'éloigner les pauvres et de se
garder de la contagion^ que les mendiants traînaient
partout avec eux.
Le jour deran(i628), letrésorierde l'Hôpital d'Agen,
le s'' Jean Poumayrol, représenta aux Consuls que le
lendemain, jour de dimanche, se faisait « la principalle
« distribution du cartier aud. hospital et qu'il n'apoinct
« d'argent... nous priant d'y pourveoir, ne voulant
<' poinct entrer en advance ...»
Les Consuls lui délivrent un mandement sur le col-
lecteur de la ville de L livres « qu'il fauldra desduire
« sur les premiers interests deubs par la Maison de
« Ville aud. hospital ».
Le froid était très-vif: pas d'argent pour faire du feu.
69
« Le mesnic jour (2S Janvier 1628), Messieurs les
« Syndics de l'Hospital (i), c'estans veneus plaindre de
« ce que la rigueur du froit incommode grandement les
« pauvres et nous auroient supplies de les acister pour
« fere des feux publics pendant les jours de grands
« froits afin de secourir lesd. pauvres soit dans
« l'hospital pour leur fere du feu soir et matin que à la
« plasse (2), leur aurions a ces tins faict bailher par
« Bernajou une canne de boix et douze fais de sere-
« mens prins de M»" J. Monteils. . . procureur (3) ».
La ville d'Agen avait ses rues encombrées. On fit
le recensement des pauvres de la juridiction : E!n 1630
on en trouva 2435 dans les paroisses de la banlieue (4).
On ne savait où les loger ni comment les nourrir.
Aussi le 28 Janvier 1630, le Bureau de la Santé résolut
de les répartir sur les gens aisés.
« ... A este délibère que veu la grand' quantité de
« pauvres mendiants qui sont par la ville et la misère
« du temps présent que le despartement desd.
« pauvres se faira dans le premier jour, que la distribu-
« tion d'iceulx sur le commencement du mois de Mars
« prochain par les depputes des Trois Ordres le plus
« justement que fere ce pourra (5) ».
(1) Les Syndics de l'Hôpital étaient M.M. Gérauld de Dauréi', pre-
mier syndic, Pierre Leduc, marchfi, second. M" Arnauld Bclangier,
notaire royal, pour tiers, et Guilhaunie Fabal, chirurgien, pour der-
nier.
(2) La Grand'place était devant l'Eglise Cathédrale de St-Eticnne
(côté O.), "aujourd'hui place du Grand Marché.
(3) Arch. d'Agen. BB. 51, p. i à II.
(4) Arch. d'Agen. GG. 251. (An 1630). St-Urbain de Dolmayrac, en
face d'Agen, rive gauche de la Garonne, 212 pauvres. Dans la pa-
roisse de Serres, 74 ; dans celle de Renaud, 115 : à St-Sulpicc, 182 ; S
Foulayronmes, 315, etc.
(5) Arch. d'Agen. GG. 255, p. 154 v.
70
Aux portes d'Aj^en, à Laplume, les Consuls font une
enquête. Dans cette petite paroisse, les Records de
cette communauté mentionnent un total de jj6o pau-
vres.
Les Cours de Parlement de Bordeaux et de Toulouse
rendaient des arrêts obligeant les communautés à nour-
rir leurs pauvres.
En Champagne, on était moins humain. Pour se
débarrasser des vagabonds, la plupart pestiférés, on
trouvait plus simple de les arquebuser.
L'Agenais, comme la Champagne, était une Cour
des Miracles.
Partout les communautés préparaient des règle-
ments, dressaient les « rôles » de leurs pauvres, em-
pruntaient, quand elles n'avaient pas d'argent, faisaient
des distributions en argent ou en nature, chargeaient
leurs Consuls et leurs Jurats de pourvoir eux-mêmes
aux plus pressantes misères.
L'argent ! Il était si difficile d'en avoir.
On ne pouvait lever les tailles ; les collecteurs avaient
beau tourmenter les contribuables, les réduire au déses-
poir : « Là où il n'y a rien, le Roi perd ses droits ! »
Les tenanciers ou les fermiers des communautés ne
payaient plus. La misère était partout, la misère noire.
Le 8 Janvier 1631, la Jurade d'Aiguillon, ville assise
sur les plantureuses cartelades de la Garonne et sur la
plaine de Peladan, au confluent de deux rivières,
" pour esvitter par cy-appres la ruine et le destriment
« du pauvre peuble » arrête que la communauté ou
habitants de la ville « à telles grandes et extresmes
« necessittes bailheront la somme de deux mil livres et
« Messieurs les Eccléziastiques le tiers de lad. somme,
«: faisant la somme de trois mil livres ; et parce que
«< lad. somme de trois mil livres n'est suffisante pour
n
( l'entretenement des pauvres jusques a Teste prochain,
« est aussy arreste que les tenantiers de la pr. jurisdic-
« tion et habitants hors d'icelle seront cothizes au pro-
« rata des biens qu'ils jouissent en icclle, laquelle coti-
« zation estant faicte par lesd. O"'* et Jurats que sera
« advise. En cas que lesd. tenantiers ne vouldront
« (payer) icclle, lesd. s^* Consuls demanderont l'entre-
« tenement devant les sieurs juges à quy la cogn'^«^ en
«appartient. Et cependant à la dilligence desd. Con-
« suis, les pauvres de la pr. ville et jurisd. seront cn-
« roUes le plus diligemment que fere ce pourra.. . (i) >,.
Le 12 Février, nouvelle délibération. Les Consuls,
ne pouvant se servir des revenus de la ville « à cause
« de la dixette et nécessitte des fermiers » requièrent le
lieutenant général de la sénéchaussée d'Aiguillon, M''
Tourtonde, le lieutenant particulier au siège ducal de
lad. ville, M« Bertrand de Metau et enfin les Jurats de
délibérer sur les moyens à prendre « a fin que les pau-
« vres ne périssent de faim ».
On décida d'en faire le dénombrement immédiat, de
répartir les pauvres « a chascung des habitants bien
«' ayses » pour le logement et la nourriture.
Lajurade invita les Consuls à « lever et constrain-
« dre les sieurs ecleziastiques bailher et paier les som-
« mes quils se trouveront estre chargés paier pour l'en-
c< tretien desd. pauvres aux termes des arrests sur ce
« donnés en la Souveraine Cour de Parlement de
« Bourdeaux ».
Pour donner suite à la délibération du 17 Février, le
23, la Jurade décida que les Consuls distribueraient les
(l) Aiguillon. Arch. Di = Suppl. E. 865.
12
pauvres entre les habitants, le lendemain, à huit heures
avec l'assistance des sieurs Arnaud Donnadieu, M'
François Pappon, M"-' Ysaac Mirabeau, Jean Pradel et
Messieurs les officiers (de justice). « Les cothizés y se-
« ront constraincts par toutes voies de justice dhues et
« raisonnables ». Les habitants qui ne voudront nourrir
les pauvres en seront « descharges en leur bailhant a
« chascung un soûl ».
Le 24, nouvelle assemblée de la Jurade. « Veu le
« rolle et grand nombre des dits pauvres c'est trouve et
<< juge quil estoit impossible de les pouvoir loger aux
« maisons bien ayses a cause du petit nombre aiiil en
« y a qui aient moien d'entretenir leur familhe », les
Consuls n'ayant « aucung moien paur y subvenir, es-
« tant les fermiers des biens commungs pauvres et né-
« cessiteux », décident un emprunt de deux mille livres
en vertu de l'arrestat du 20 Janvier dernier et à cause
de l'impossibilité qu'ont les Consuls d'emprunter « en
« ladicte quallité », lajurade atrête que les Consuls et
Jurais s'obligeront en leurs propres biens. Ladicte com-
munauté a promis de s'obliger envers eux et de les rele-
ver indemnes envers les créanciers. Le lieutenant géné-
ral, le lieutenant particulier, les Consuls et Jurats
s'engagèrent à fournir les fonds. « Lesdicts Consuls
« bailheront requeste aux fins qu'il plaise à la Cour leur
« permettre de l'impozer sur les tailhables de la dite
« ville bien ayzes et autres plus grandes sommes que
« besoing sera. . . (i) ».
A Sainte-Colombe de Laplume, en Brulhois, séné-
chaussée d'Armagnac, sur la rive gauche de la Garonne,
au droit d'Agen, lajurade décide d'emprunter « pour
(I) Arch. D'" Aiguillon 865. Suppl. E.
Aces diverses Jurades assistaient : M"" M« Bernard de Tourtondt-,
lieutt pal en la sénéchaussée d'Aiguillon ; M' M- Bertrand de Metau,
73
« la norriture des pauvres 600 11 en argent et 100 sacs
« de bled fromant >).
C'était le i*"" Février 1631. Le Seigneur de Ste-Co-
lombe, mcssirc Michel du Bouzet, assistait h la déli-
bération (ij.
« Par arrcst donné en la Souveraine Cour de Parlement de Tholozc
« le vingt quatricsmc décembre mil six cens trante entre autres cho-
« ses a esté ordonne ijue tous Consuls et administrateurs des villes et
« lieux du ressort de la cour pourvoyeront a la norriture et au loffc-
« ment de leurs pauvres et que a ces fins les hcncfticiers et autres
« fruicts-prenantz seront tcneuz de contribuer la sixiesme partye de
« leurs fruictz et f>oiir les benefficiers non résidants le iolal (21. Et
lieutt part. ; les Consuls Michel Bares. Claude Donnadieu et Jean
Moynie ; les Jurais si^ Arnaud de Gasquet, M" François Pappon, N.R.;
M» Bertrand Barrière, Not. Ducal ; s"" Jean Begoulle, Jean de Baston,
Pierre de Brienne, autre Pierre de Brienne, fils de feu Hierosme,
Anthoinc Dupouy, Anthoine Pandelle, Jean Sarrat, Jean Sourdeau,
M» Jean Merle, Arnaud de Metau, Bertrand de Lacaze, adat en la
Cour, Simon Delsuc, H. Treilhes, Mallet, M« Jean Combabessouze,
Jean Laportc, apothicaire, Estienne Lafitte, Pierre Ruere, M" Gilles,
Roquier, Pradal.
(1) Messire Michel du Bouzet, seif,'neurdu chAteau-noble de Marin,
près de la Montjoie, seij^neur de la Montjoye en Condomois, dudit Stc-
Colombe et autres places. Le sieur de Marin était fils de Jean du
Bouzet et fut plus tard pendant la Fronde maréchal de camp des
armées du Roi et enfin lieutenant général en la province de Guyenne.
(2) La taxation des bénéficiers eut des suites. Les Consuls de l'an
1631 furent, après la famine, assignés par le Rcvérendissime évéque
de Condom devant la Souveraine Cour de Parlement de Toulouse
pour Être condamnés à la restitution des grains dîmes qu'ils avaient
fait saisir pour les pauvres en vertu de l'arrêt général donné en la
Gourde Parlement. Lajurade résolut de soutenirle procès : On nom-
ma syndic de la communauté M« Daniel Limozin « auquel iceux Con-
t suis et Jurats ont doné plain pouvoir, puissance et authorite de
' poursuivre !ed. procès, fere et négotier touttes les aflf"* qui conser-
< neront les pauvres s. (Arch. D'«' Ste-Colombe 617^
74
« au caz ; qu'ils) ne suffiraient, est enjoir.ct aulx Consuls et adminis-
c trateurs faire les advances de ce quy sera nécessaire, leur permet-
€ tant a cest etïaict d'emprunter telles sommes de deniers que besoinp:
« sera et pour leur remboursement d'impozer et repartir sur tous les
c manants, habitants biens-tenants, et contribuables aux tailhes desd.
€ biens, les sommes qui auront este advancees au sol la livre et cons-
€ traindre les fruicts-prenantz et leurs fermiers et aulties cotizes tan-
€ de lad. sixiesme partye que autres deniers desd. cotisations comme
€ pour les propres deniers du Roy, pour lesd. deniers estre repartis
« auxd. pauvres, corne plus a plain est speciffie aux arrests... (i) ».
On arrêta en outre d'emprunter « 600 11 à l'intherest
« pour une année », de distribuer cette somme « aux
« vrays pauvres. . . et à ceux quy seront habitants et
« résidants annuellement dans le tailhable dud. Ste-
« Colombe ». C'était le domicile de secours.
On résolut aussi de cotiser les habitants et de faire
la levée à l'été prochain pour le remboursement des
avances.
c Et quand aux habitants qui se treuvent depourveus de toutes
» sorte de vivres et comodittes et qui jouissent et possèdent des biens
« fonds sur lesquels ne peuvent rien trouver a emprunter pour
t s'entretenir a este délibère et arreste que lesd. Consuls fairoient
t emprunt de la quantité de cent sacs de bled fromant aux despans
« de lad. communaulté lequel bled sera distribue par lesd. Consuls
« de l'advis desd. Juratz ou partie d'iceulx qui a cest efïaict seront
t esleus en la près, communaulté, led. emprunt (2) estant faict auxdits
€ habitants qui sont come est allègue depourveus de vivres et com-
« modités et comptant seullement que lesd. Consuls et Jurats qui
« seront comis et esleus pour fere lad. distribution jugeront leurs
« pocessions estre solvables et suffisantes pour payer la quantitté du
« bled qu'ils requieront destre prester ; et faisant lad. distribution et
'< prest lesd. Consuls retireront de ceulx a qui ils presteront obligation
€ de ce que leur sera preste a mesme commune condition et a mesmc
« rigueur que il conviendra auxd. Consuls de «obliger en faveur de
(1) Arch. D'-' Suppl. E. Ste-Colombe6i7.
(2) Erreur du greffier, qui a écrit le mot emprunt pour le mot prêt.
75
ccllui qui leur prcstcra Icsd. cent «aCH de bIcJ et rendront à la pro-
chaine rccoltc, que lesd. Consuls procureront et réserveront le
payement des prcsts qui aura este par eux faits auxd. habitants, et
ce faisant seront tcncus payer et acquitter lesd. cent sacs de bled et
rapporter l'obligation qui en aura este faicte cancelle, et a l'efTaict
du payement tant de lad. some de six cens livres que dcsd. cens
sacs bled, lesd. jurais donneront pouvoir auxd. Consuls d'oblit;cr
les biens de lad. communauté et leur biens propres corne desja ils
les oblig;cnt et iceulx les soubmettcnt à toutes rigueurs de justice
et ce faisant renoncent aux exceptions de droit à ce contraire et at-
tendcu l'absancc de plusieurs jurais de lad. près, commtr a esté ar-
restc que la presantc délibération et arrcstat sera communiquée auxd .
juratz absants et au cas (où) ils l'agrcront et iceux qui scaunmt si-
gner la signeront, la presante déliblioii sortira a etfaict ; et ne l'a-
gréant point iceux jurats absants et qu'ils refusent la signer, qu'il
sera pour non advencu; et ainsi que dessus ayant esté délibéré le
dict Seigneur, Consuls et jurats saichant signer et sont soubsignes
ensemble led. procureur et moy (il
Dans toutes les communautés d'Ai^enais, on prenait
des « arrestats » analogues.
Les diverses Jurades du marquisat de Duras, per-
mettront de jurer des tiraillements qui se produisaient
dans les juridictions mi-parties de protestants et de ca-
tholiques. On y verra que les convocations faites aux
prêtres, recteurs et curés de la juridiction de Duras, en
dépit des arrêts du Parlement de Guyenne, restaient
souvent sans réponse, les catholiques accusant les
huguenots de partialité dans la distribution des secours,
ce qui amena Monseigneur le marquis de Duras (2) à
intervenir.
(1) Les signataires sont : Le Seigneur de Marin; Villeneuve, Consul;
André, Consul; Lougratte, Consul; La Claverie, Consul ; Labarthc,
Laclaverie, Bonhomme, Laclaverie, Vacque, Chanteloube, Lacoste,
Lalaurie, Rebel, Jean Caillau proc. jurisdictionnel, J. Vacque, Pan-
delle jurât, Capdeville jurât et secret, desd. Consuls. (Arch DIcs, Ste-
Colombe, 617 p. 201).
(2) Guy Aldonce de Durfort, comte de Rozan (1605-1665), maréchal
de camp en 1637, père de Jacques Henri de Durfort, duc de Duras,
•fi
La première délibération est consignée à la date du
II Février 163 1.
Les Consuls se plaignent qu'en un temps ou les pau-
vres « périssent de faim », le prieur de Duras, Dom
Pierre Pej'rot, et les curés de la juridiction, comme les
Consuls et la jurade des champs, refusent, malgré les
avertissements par mandes ou les sommations par ser-
gent royal, de se réunir à la jurade de la ville de Duras,
en dépit de l'arrêt de Nosseigneurs de Parlement en
date du 17 Septembre 1630 et qu'on ne peut établir les
rôles des pauvres.
Le 17 Février, nouvelle jurade et nouvelles injonc-
tions aux absents. La Jurade nomma des commissaires
pour la confection des rôles.
Le lendemain, on délibère de nouveau. Absence per-
sistante de presque tous les ecclésiastiques. On décide
néanmoins un emprunt et on charge en attendant le
Consistoire de distribuer les premiers secours. Le même
jour, on organise des quêtes à domicile « pour dispo-
« ser (les habitants) a adjouster à ce qu'ils ont cy de-
« vant promis par sepmaine parce que leur charitte se
« trouve trop petite pour le grand nombre de pauvres
« qu'il y a ».
A la Jurade du 21 Mars parurent seulement trois
ecclésiastiques, M'^ Arnaud Merle, curé de Savignac :
M* Gilles Gorsse, curé de Baleyssagues et frère Gui-
Ihem Chabrié, recteur de St-Front. On arrête que les
cinq sixièmes des pauvres seront entretenus par les
habitants de la juridiction et le sixième restant par les
ecclésiastiques.
Pour mettre un terme aux dissenssions confession-
nelles de la juridiction de Duras, le Parlement de Bor-
maréchal de France. C'est en sa faveur que la marquisat fut érigé en
Duché par Louis XIV en 1689.
77
deaux donna un arrêt, le 24 Avril 1631, contre les Con-
suls et les manants de la communauté.
Le 28, la Jurade protesta contre les dénonciations
faites au Seigneur Procureur Général « que les Jurats
« de la présente ville faisoient refus de distribuer les
« aulmones aux pauvres de la religion catholique ». La
Jurade nomma deux syndics, les sieurs Merlaut et
Laulan, pour défendre en la Chambre de l'Edit.
Le 30 Mai 1631, la Jurade se réunit pour répondre à
une lettre du Marquis qui lui adressait les mêmes im-
putations.
En même temps dans la même Jurade, on décida de
vendre « les deux pippes de milhet qu'il a pieu a Mon-
« seigneur le marquis du présent lieu (donner) pour
■ ausmosner auxd. pauvres... »
L'argent en sera distribué, dit la délibération, à rai-
son d'un sol par jour et par pauvre (i).|
Le corps de ville d'Agen, ville qui, comme Bordeaux,
avait ses filleules et qui avait la tutelle des autres cités
de l'Agenais, était aux prises avec des difficultés encore
plus grandes.
La détresse était terrible : les emprunts perpétuels
épuisaient la Communauté. Les Consuls, syndics du paj's
d'Agenais, avaient encore sur les bras les emprunts
contractés au lieu et place du pays.
La Jurade s'efforçait de résoudre ces affligeants pro-
blèmes du paupérisme et de la famine.
(l) Arch. D'^s suppl. E. Duras, 1356. Voir plus loin aux pièces
justificatives.
78
Le 7 Janvier 1631, M. de Lescazes jeune, pro^iosa à
la Jurade divers moyens pour parer aux éventualités :
« Qu'il doibtestre procédé en dilligence en la trie des
« pauvres de la ville et jurisdiction et autres lieux cir-
« convoisins où il n'y a villes closes et ce faict estre
« tout aussitost procédé au département d'iceulx par
« distribution et renvoyer ceux qui sont des lieux ou il
« y a villes closes ».
La Jurade prit une décision conforme à ces vues
« dixtraict les métayers et leurs familles (i) ».
Pour procurer par le travail quelques ressources
aux marins du port, la Jurade décida que la poste d'eau
« de (Théobaldi) ne pourra estre restablie jusques à la
« St Jehan afïin que force pauvres mariniers et leurs
« enfants ne soient réduitz aux ausmones ».
Cette mesure avait pour but de permettre aux mari-
niers le transport des voyageurs le long de la rivière
jusqu'à Bordeaux (2).
A cause de la grande misère des pauvres « qui sont
« au voisinage des portes fermées », on priera Mes-
sieurs du Bureau d'en permettre l'ouverture (3). Les
faméliques erraient en effet, comme des âmes en peine,
sous les murs de la ville.
On examina aussi s'il ne convenait pas de prendre les
deux mille livres « dhues aux hoirs de Monsieur d'Agen
« à rente constituée pourvu que la ville s'en puisse
'■< valablement descharger lorsqu'on voudra payer (4) ».
(1) Arch. d'Agen BB. 52 p. 7 et y
(2) Arch. d'Agen BB. p. 52 (21 janvier 1631 p. 17), Vers ceUe épo-
que, Jean Faures, marinier, avait été condamné à 7 livres d'amende
et 3 de dommages-intérêts pour avoir conduit des messagers à Bor-
deaux, contrairement au privilège de Théobaldi ( FF. 48).
(3) Ibid.
(4) On lit dans les registres paroissiaux de l'Eglise Cathédrale St-
Etienne d'Agen : i Le 25 déssembre de l'année 1630, est décédé sur
79
Dans cette même Jurade du 21 Janvier, on exposa
qu'il y avait à l'hôpital soixante-neuf malades, « qu'il
« en surviendra tous les jours, que le reveneu d'un<; an
« suffira pas pour deux mois ».
On se demanda « s'il faudra vandre les rentes cl londs
« de l'Hospilal ou y employer le legs de Monsieur
« d'Agen », legs qui se montait à 1500 livres (i),
« Et pour ayder aux frais ordinaires de l'Hospital, il
« sera bon de bailhcr charge a ung particulier habitant
« de fournir les tentes ou paremens de deuilh moyen-
« nant certain profhct qui en reviendra a l'Hospital
« pour ce qu'il se présente homme qui en olTre deux
« cens livres par an / .
On remit toute décision à une assemblée ultérieure.
D'autres préoccupations hantaient encore les mem-
bres de la Jurade. Qu'allaient devenir la cueillette des
blés et la culture de la vigne, si les pauvres manœu-
vres périssaient faute de secours ?
L'urgence de subvenir à leurs besoins s'imposait. 11
fallait viser « principallement à conserver les manou-
« bres (qui se meurent de fain, dit-on un peu plus loin),
« aultrement les vignes demureront inutiles et ne se
« treuvera personne pour lever les bleds a leste (2) » .
Quelques jours après (i*"" Fév.), M. de Kaignac de-
mandait qu'on assistât « surtout les manœubres pour
« les empescher de mourir (3) »,
« les dix heures du soir, Claude Gelas, Evesque d'Agen, et feust cn-
« seveli le dernier du mesme mois dans le chœur de l'Eglise SU
« Estienne, au costé droit du grand Autel » (Arch. d'Agen BB. 2).
Claude de Gelas était Evèque d'Agen depuis 1608. Il y fit son en-
trée solennelle le 2 Oct. i(xy) (A A. 39-41-42 FF. 45). Un autre document
des Archives d'Agen dit que l'Evèque mourut d'apople.xic, 11 avait
pour grand archidiacre et vicaire général, Balthazar de Gelas, son frère.
(1) Arch. d'Agen BB. 52 p. 18 v.
(2) Arch. d'Agen BB. 52 p. 18 v. (jurade du 21 janvier).
(3) Ibid. p. 24
80
La Jurade décida la convocation des Trois Ordres
pour le lendemain 22 Janvier.
Le jour du 22 janvier 1631, TAssemblée (i) prit les
résolutions suivantes :
On empruntera 1500 ou 2000 livres pour achat de blés
« affin de fournir les marchés de la prés, ville », On
traitera avec un marchand solvable qui fournira chaque
marché de cinquante sacs de blé qui seront vendus « à
« prix certain », atin d'éviter la hausse des prix; Le blé
sera vendu à deniers comptants. L'argent « sera rem-
« ployé toujours a achapt de bled jusques à la St-jehan
« Baptiste, auquel tems la somme sera rendue à ceux
« qui auront faict le prest avec les intérests » .
On vendra le blé au prix des fourteaux des lieux où
il sera acheté, néanmoins « la liberté demeurant au
« peuple d'achepter à qui bon lui semblera » .
On fera le rôle des pauvres, à l'exclusion des pauvres
étrangers .
La sixième partie des pauvres sera donnée en charge
au clergé et le reste aux habitants.
Il) Les Consuls pour 1631 étaient: Géraud Grimard, premier Con-
sul; Guillaume Ratier, Jehan de Laborde, tous les trois avocats ; No-
ble... de Béchon, sieur de Caussade, écuyer; Etienne de Corne, C""
du Roy et receveur des tailles; Jehan Roussel, docteur en médecine,
Le clergé était représenté par MM. Soldadyé, vicairegénéral.Cavasse,
Cunolio, Buisson, chanoines de St-Etienne; Albaret, Bourges, Cha-
rier, Causse, et Lostalneau, chanoines de St-Caprais. Messieurs de la
Justice étaient représentés par M. de Boissonnade, juge mage
et président de l'assemblée ; Delpcch, juge criminel, de Redon, lieute-
nant principal, de Barbier, lieutenant particulier, de Godail, assesseur
criminel, de Tournadc, Plesier, Nargassicr, Brcssoles, de Vigne, Con-
seillers, Magistrats Présidiaux.
Pour la bourgeoisie étaient présents, outre les Consuls, les jurais
de Selves, Lescsze jeune, Ducros, Duluc, Singlande, de Faure, Fcr-
ran, Baulac, d'Espalais, Daurée jeune, Verduc, de Vivier, Rangouzc,
Delpech, Buard, LaflFore, Singlande procureur, Reilher, Lavcrgne.
8i
On donnera à cliaque pauvre deux sols par jour. « A
« quoy tant lesd. eccléziastitiues qu'autres habitants
« seront contraints sans exception quelconque » .
Les chanoines, présents à rAssejnblée, ceux de Saint-
Caprais comme ceux de Saint-Etienne, acceptèrent au
nom du Clerfré.
Pour les paroisses de la juridiction, on en fera la
visite « aHin qu'il n'y ait sur le rollc aucun serviteur ou
« mestaycr ny personne qui ave du bien pour vandre
« et appres selon le nombre il sera advizé de les acister
" par autre subvention y faisant contribuer les habi-
< tants des paroisses qui en peuvent nourrir, les ecclé-
« ziastiques «^ens prenant les dixmes et y employer
« le lei^s de quinze cens livres de feu Monsieur
< d'Agen (i ) > .
Dans le résumé que fait de cette délibération le
Livrc-Jonnial des Consîils, le greftier ajoute : « Mon-
;< sieur le Président Boyssonnade a préside en ceste
« Assemblée par dessus Mess""* les Vicquaires gêné-
« raux » .
D'après le même résumé, on commît à la visite des
v< vrays pauvres » MM. Delpcch, lieutenant criminel,
Herman de Godailh, assesseur criminel, de Buard, de
Cunolio et de Caussade.
Le 23, les Consuls Gnmard et Roussel allèrent «avec
< leur chaperon », rendre compte à Messieurs de l'Edit
de la délibération des trois ordres et les prier « de vou-
« loir ayder à la nourriture des pauvres, ce qu'ils pro-
K mirent de faire {2)
(i) Arch. d'Ai,'en Iil3. 52, pp. 13-14-17-21-22. Au bas du verso Je la
page II, on lit au sujet des Messieurs de l'Edit et des Aydcs: « Il ne
« fault pas parler de ses Messieurs dans nos actes mais cela se doit
« faire par Messieurs les Consuls sans en parler autrement ». Les ma
tristrats taisant partie des privilé-jfics, on était tenu à beaucoup de mé-
nagements .
(2) Arch. d'A^rcn RH ^i, p iCn-ir.;
82
Dans les délibérations antérieures de la jurade, com-
me dans le projet de résolution préparé par elle pour
l'Assemblée des Trois Ordres (ii et 21 Janvier 1631), il
avait été résolu qu'à défaut « de trouver marchand à
« proffit raisonnable », les Consuls se chargeraient eux-
mêmes de ces achats de blé, nommeraient des Jurats
pour en surveiller « le maniement » et en rendre compte
de quinze jours en quinze jours.
A propos de la distribution des deux sols par jour à
chaque pauvre de la ville et cité d'Agen, on se demanda
s'il ne serait pas bon de leur donner une marque « pour
« les recognoistre, affin qu'après avoir reçeu les au-
« mosnes, ils n'ailhent mandier devant les portes (i) ».
Le i^"^ Février, pour ne pas laisser périr les pauvres
sous les murs de la ville, on décida l'ouverture des cinq
portes (2).
La Chambre de Guyenne prit le 12 Février, nn arrêt
visant la répartition des pauvres.
Extrait du registre de la Chambre de Guienne,
« La Cour ouy et ce requérant le substitud crée par
« le Roy du Procureur Général en icelle a ordonne et
« ordonne que en conséquence de la distribuôn faicte
« par les Consuls de la presant ville des paouvres
« mandians d'icelle et ordonnance du bureau de la
« police du jour d'hier iceux pauvres seront nourris par
« les bourgeois et habitans de la presant ville chascun
« suivant la taxe et despartement qui a este faict sur
« eux et le billet qui leur sera envoyé par lesd. Consuls
« et ce par provision; en sera l'aulmosne distribuée
« auxd. pauvres scavoir aux valides chascun dans les
(1) Arch. J'Agren BB. 52 p. 18.
(2) Arch. d'Agcn BB. 52 p. p. 31-35,
«3
a maisons desd. buur^^eois et habitans et aux malades
« et invalides dans leurs maisons et a ce faire seront
<i lesd. bourgeois et habitans constraints par toutes
« voyes dheues et raisonnables en vertu du mandement
« et billet desd. Consuls. Faict inhibitions et défiances
« auxd. pauvres mandians de vaguer par la ville et aller
« mandier aux portes des autres maisons a peine destre
« jettes hors lad, ville. Enjoinct lad. Cour auxd. Con-
<i suis de tenir la main a Texecuôn du présent arrest à
s< peine de mille livres et den respondre en leur propre
« et prive nom et atîin que personne n'en prétexte cause
« d'ignorance ordonne que le présent arrest sera alHche
« leu et publie a son de trompe par les cantons et car-
« refours publiqs de la près, ville.
« Faict à Agen en la Chambre de Guienne le douz"
« Febvrier mil six cens trente ung (i) ».
Les Consuls résolurent de supplier de nouveau très
humblement Messieurs de la Chambre de l'Edit et
Messieurs des Aydes, de contribuer à la nourriture des
pauvres « à cause de leur grande multitude ». On fut
forcé de rétablir la garde bourgeoise aux portes de la
ville, de ne les ouvrir qu'alternativement et de rap-
porter la décision antérieure.
« On taschera d'obtenir main levée de la somme con-
« signée par feu Monsieur d'Agen pour la conservation
« des pauvres qui meurent de faim. (3 Mars) (2) >.
Cet arcrent était entre les mains de M. Duburg.
Le 27 Mars, la Jurade chargea les Consuls « de (le)
« retirer. . . des mains de Monsieur Duburg. . . suivant
« l'arrest de main levée donne en la Gourde Parlement
« de Bourdeaux a la délivrance delaquelle ils constrain-
(i) Arch. d'Agen FF. S8. Partlicinin.
(2)Ibid. p. 31 et 33.
84
« dront led. sieur Dubur*r conformément audit ar-
« rest (i) ».
La répartition des pauvres ne se faisait pas sans ditti-
culté.
Il y avait toujours des récalcitrants, les uns par ava-
rice, les autres par leur situation de privilégiés.
Les Consuls n'hésitaient pas à répéter sur eux les
sommes dépensées et à en fixer le chififre.
Ainsi en 1631, pour les avances faites par la Maison
de Ville, furent taxés M"* Cantaloup, greffier de l'Elec-
tion ; Lebel, procureur général aux Aides ; les officiers
de l'Election ; Castaing, l'un d'eux; M. de Causac.
D'autres encore, comme M. de Raignac, procureur à
Bordeaux ; Mademoiselle de Fontirou (2) •, M*= de Ray-
mond, chanoine ; de Belcastel ; Galibert ; Couquet
jeune, conseiller au Présidial ; de Laville, conseiller.
Sur ces taxes, les sommes variaient de VII à CXX
livres. C'est à cette dernière somme que fut taxé M. M'-
Lebel, procureur général à la Cour des Aides (3).
La question du blé était une question urgente et an-
goissante. Il fallait à tout prix approvisionner toute
une ville, assez pour l'empêcher de mourir de faim.
En 1628, Contensou, maître de bateaux et marchand,
proposait à la ville de lui fournir des farines (25 Sept.)
Le 15 Octobre, nouvelles offres de fourniture de blé,
fèves et farines à la condition que la Maison de Ville
(1) Ibid. p. 37 V.
(2) Damoiselle Marie de Godailh.
(3) Ârch. d'Agen. FF. 88. La pièce est signée GrimarJ et Roussel,
Consuls.
85
lui fournira l'argent dont il paiera l'intérêt et que, si
elle n'en a besoin, il pourra retirer ses fournitures en
tout ou en partie en rendant le prix de l'achat et les
intérêts. On accepta.
Les Consuls ordonnèrent de dresser un rôle des blés
que les habitants possédaient dans leurs greniers et
qu'ils voudraient prêter à la ville (30 Oct.) (i).
En Septembre, injonction avait été faite aux habi-
tants de s'approvisionner de farines : « Sera faict une
« queste par emprunt, alHn que les habitans, chascun
\ suivant son pouvoir, aye a fournir desd. farines pour
« estre mises dans ung magazin (2) » .
Le 24 Février 1629, on empruntait à M"=>'= de Nort
« six vingt sacs de bled ù 7 11. le sac » qu'on laissait
comme réserve dans le grenier de lad. dame (3).
Le 7 Mars de la même année, on empruntait à M.
d'Estrades 120 sacs de blé froment à 7 livres 2 sols le
sac et 20 barriques de vin à 20 livres la pipe, revenant
à mille cinquante deux livres à rembourser au i*"" Oc-
tobre prochain . Comme pour le blé de M'"* de Nort,
on laissait ce blé en réserve chez M. d'Estrades (4.).
Le 30 Avril 1629, on décida d'acheter ou d'emprunter
du blé au dehors avec défense aux habitants « d'en
« sortir et d'en vendre à autres personnes qu'à ceux de
« la jurisdiction >'.
On en distribuera aux plus nécessiteux.
Les Consuls firent continuer dans le mois qui suivit
les distributions de blé froment mais à la condition
expresse que les habitants assistés par la Maison de
Ville s'obligeraient envers elle (5).
(1) Arch. d'Agen. GG. 255.
(2) Arch. d'Agen. GG. 255.
(3) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 92. Voir plus haut.
(4) Ibid.
(5) Arch. d'Agen. GG. 255, p. 118.
86
On a vu dans lajurade du 22 Janvier 1631 que la
première difficulté à trancher, la première délibération
à prendre se rapportait au blé.
On allait, pour s'en procurer, jusqu'à la violence.
Le Livre-Joïinial des Consicls pour l'année 1630
rapporte ainsi qu'il suit une Jurade d'Agen :
« Le XIX"^ dud. mois (de Septembre) sur la rencontre
« de la nécessité des bleds en laquelle ceste ville s'est
« trouvée, ayant este délibère par la Jurade que les
« bateaux, qui se trouveroient charges de bleds descen-
« dants la rivière, ils seroient accostes pour obliger
« lesd. marchants de secourir la ville au prix courant
« d'une partie des bleds quils porteroient ; ung bateau
« du lieu de Beauvoisin proche de Goulfech charge de
« quarante sacqs de bled ou mesture auroit este arreste
« et les marchands d'icellu}', vendeu en la plasse publi-
« que vingt deux sacqs dud. bled au prix courant ».
Le 24, on arrêta un bateau chargé de 60 sacs, venant
du Double, appartenant à un marchand de Layrac. On
en vendit 9 sacs « à raison de XII i' le sac qui est le
« prix courant (i) ».
Le Parlement de Toulouse s'était ému de la sortie
des blés de son ressort. Le Livre- Jour nul des Consuls,
à la date du 5 Novembre 1630, disait :
« Le Parlement de Tholoze ayant envoyé ung com-
« missaire à Layrac pour empescher que les bleds du
<i ressort dud. Parlement ne sortissent, led. commiss'""'
« et ses subdélégués abuzant de leur commission au-
« roient empesche traite qui se faisoit des villes d'Es-
« tafort et autres dans ceste ville, de quoy recevant
(i) Arch. d'Agen BB. 51 p. 113.
8^
« beaucoup de préjudice, M' de kangouze, nostre colle-
« gue, auroit este deppulte devers Monsieur de Ver-
<i thamon, intendant de la justice en Guicnnc, estant
« pour lors a Leytoure, aftîn d'obtenir delfance d'em-
« pescher lad. traite, ce qui auroit este exécute le V
« Novembre et les delïances (i) signifiées aux Consuls
■< de Lcyrac, la Plume et autres lieux /^.
L'intervention de M. de Verthamon avait eu d'heu-
reux résultats, car le 27 Novembre 1630 « Pierre Laba-
« tut et ses frères, march'" d'Estafort sont veneus nous
A oiïrir six cens sacqs de bled à seize livres le sac (2) » .
Le II janvier 1631, nouvelle offre de Labatut :
« Le XI Janvier le s' Labatut, marchant d'Estaffort,
« a faict offre de fournir les cent sacqs de bled toutes
« les sepmaines en demeurant d'accord du prix et les
c advansant appres (3) ».
Le 27 Mars 163 1, la Jurade autorisa les Consuls à
emprunter 3000 livres pour achat de blés.
<f Comme il n'y a de bleds ni en ville, ni en lieux cir-
« convoisins, on arrestera les bleds qui descendront la
'< rivière. »
(1) Sous-entendu : d'empêcher ccUe traite.
(2) Arch. d'Agcn BB. 51 p. 156 et 157.
(3) Ibid. p. 160. En présence de la cherté croissante des blés, les
Consuls procédèrent à la vérification des mesures du marché public :
'■ Le z?"" Janvier mil si.\ cent trante un, nous avons fait égaliser les
^ mesures de bled de la près. Ville qui sont à la plasse publique près
« Saint-Estienne, conformément au carton de cuivre que nous avons
« dans nostre maison de ville qui nous sert de patron pour tous les
« autres. Nota qu'il est nécessaire de les visiter souvent et de les faire
« égaliser quelquefois, attandeu le piastre qu'on y a mis à certains
« trous, d'aultant que nous avons remarque qu'on lavet égratinc et
« racle avec des fers pour rendre ladite mesure plus grande » (Ibid
p. 162 V.)
89
A cet elïet, le 2S, on arma les nommés Caderault et
Jacques Desnoyes d'un mousquet, d'un bandolier et
d'une fourchette avec deux sacs à balles.
Le 2 Avril, on envoya Casaque, marinier du Passage,
en faction en amont du Passage d'Agen pour arrêter
les blés en descente. On lui donna pour aides Mauron,
Meric et Dubroqua.
On les renforça, le s> de Jehan Marty, portier de la
Porte du Pin, de Caderault et d'Anthoine Roullye, tous
armés de mousquets. On leur promit huit sous par
jour.
Les Consuls d'Agen écrivirent à M. de La Vrillière,
secrétaire d'Etat pour faire lever les inhibitions réité-
rées de Nosseigneurs du Parlement de Toulouse.
« Nous avons escript à M'' de La Vrillière pour le
« supplier de nous obtenir du Roy permission de tirer
« du bled du ressort du Parlement de Tholose a cause
« de la grande disette quy est dans la près, ville... (i) ».
Le 30 Avril 1631, les Consuls reçurent de M. de Brie,
conseiller au Parlement de Bordeaux, qui était alors à
Paris, une lettre contenant lettre patente du Roy auto
risant le transport de 2000 sacs de blé du ressort du
Parlement de Toulouse dans la ville d'Agen, mesure à
laquelle le Président Du Bernet avait donné son con-
cours.
« Et pour nous servir dud. passeport nous avons
« envoyé Delcasse, nostre promoteur, audit Destournel,
« sergeant Royal, à La Plume, Auvillars, Dunes, Layrac
« et aultres lieux circonvoisins pour signifier led. pas-
« seport et faire les inhibitions y contenues » .
Le 14 Mai, on expédia copie des lettres patentes à
(I) Arch. d'Agen BB. 51 p. 164.
89
Anlhoinc Sommes, marcliand U'Agen, pour faire ap-
porter 200 sacs de blé sur les 2000 accordés et le môme
jour, on lit la mC-me expédition à Cîéraud Deloux, autre
marchand de la ville, pour cent autres sacs {i).
Ce qu'il y avait de piquant dans ce conflit entre le
Parlement de Toulouse et les Consuls d'Agen en No-
vembre 1630, c'est que ces mêmes Consuls d'Agen, qui
revendiquaient le droit d'acheter du blé en Gascogne et
voulaient obtenir du Roi la nullité des inhibitions impé-
ratives du Parlement de Toulouse, n'entendaient pas,
quelques mois auparavant, en Juin 1630, appliquer
cette règle de .liberté commerciale au ressort du
Parlement de Guyenne. Ils exigeaient que les inhi-
bitions de cette dernière Cour ne fussent ni mécon-
nues, ni violées, comme il résulte du document suivant
qu'on trouve nu même registre :
« Le XV« dud. mois (de Juin 1630), ayant este advise
« qu'un nomme Dumas, faisant pour ung march="" de
« Tholoze, nomme Fermât, avoit achepte deux cens
« sacqs de bled pour icelluy fere conduire à Tholoze et
« partant hors du ressort et ainsi que c'estoit contreve-
'< nir a l'arrest gênerai du Parlement de Bourdeaux,
« publie par tout, par lequel deff*-'^' sont faictes à toutes
« sortes de personnes, de quelque qualité ou condition
« quils soient, de vandre ni achapter du bled pour icel-
« luy transporter hors du ressort sous peyne de la vie et
« de confiscation du bled, et que led. Dumas vouloit
« fere monter le bled de nuit, M. de Jeyan nostre col-
■x lègue, auroit este fere l'arrest des deux bateaux dans
•< lequel estoit led. bled, ce quil auroit faict de nuit, si
« bien que par l'information qui y a este faite, la con-
(1) Arch. J'Agcn. BB. 51, pp. 165-166.
c3
« travention ayant este justiffiee, nous aurions donne
« procès verbal quy auroit este remis ez mains de nos-
.( tre secrétaire (i i ».
(l) Arch. d'Agen. Livre Journal des Consuls, BB. 51, p. 142.
CIIAIMTRF. VIII
La situation financière
delavilled'Agrenetdu pays d'Ag^enais'"
Les emprunts — La liquidation
Pour faire face à tant de calamités, les Consuls
d'Agen et la Jurade, le corps de ville en un mot,
étaient obligés d'emprunter d'une façon continue.
Il ne s'agissait pas seulement des embarras du mo-
ment. Il fallait faire face aux engagements antérieurs
à 1630-1631. Il avait fallu s'endetter en outre pour les
sièges de Nérac, de Clairac, de Montauban, de Ton-
neins, de Monheurt (2), s'endetter pour la guerre que
le Roi et le Cardinal faisaient aux protestants de La
Rochelle, s'endetter pour le dégât de Montauban et le
siège de Caussade, s'endetter pour les subsistances
militaires, pour la démolition des villes fortifiées et
des forteresses, Clairac, Tonneins, Sauveterre en Bru-
Ihois, Layrac, comme aussi pour la réfection du Pont
(1) Pour tout ce chapitre, consulter Arch. J'Agen. BB. 51. BB. 52.
ce. 185. ce. 192. FF. 88. FF. 172. FF. 174. GG.255. GG. 256. Voir
les mandatements des Consuls sur Jean Priv.it, leur collecteur. \Le
compte a\i vray de la receple et despance de M' Jean Privât pour
l'année 1631. Le rôle des frais faicts en cestc année). (CC. 185).
(2) En 1624, un arrêt du Conseil d'Etat ordonnait aux receveurs des
tailles de remettre aux Consuls d'Agen 21.035 livres pour les dettes
qu'ils avaient contractées à l'occasion des sièges des villes rebelles.
^Arch. d'Agen. CC. 361).
93
de Villeneuve d'Agenais, lieu de passage entre le Péri-
gord et le Limousin d'un côté, la Gascogne, la Cha-
losse et Bayonne de l'autre, s'endetter enfin pour les
faméliques et pour les pestiférés.
Lourd boulet que traînait la Communauté d'Agen .
On ne pouvait payer les intérêts de tous les emprunts,
intérêts qui allaient s'accumulant.
Le 20 Septembre 1628, on emprunta 2000 livres à
Anthoine Raignac, avocat, sous promesse de rembour-
sement dans un an.
Le 20 Novembre on décida d'emprunter à TEvO-
que (I).
« Monsieur d'Agen a preste a la ville la somme de
« mille livres quil nous a preste sans interest pour ung
« an pour la nourriture des pauvres malades. Le con-
« trat est reteneu par Leydet le (en blanc) Janvier
« 1629 (2) ».
On décida de faire un fonds de 30CO livres, y compris
ce dernier emprunt (8 Janvier;.
Quelques jours après, on empruntait à Balthazar de
Gelas, grand archidiacre, frère de l'Evêque, looo livres
reçues en pièces de 16 sols et remboursables en un an
(11 Janvier).
Me Robbert Fournier, avocat, prêta à la Communauté
960 1. au denier 15 et le lieutenant criminel, Delpech, si
courageux et si dévoué, 600 livres au même intérêt (3).
En Février 1629, on s'obligea envers M'»" de Nort
pour 1500 livres (4).
(i) Arch. d'Agen. GG. 255.
(2) BB. 51, p. 86.
(3)BB. 51.
(4) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 92.
Savoir en six vingt sacs de bled à VII 1. le sac. VIIIcXL 11.
En XX pistolles d'or à 7 11. 12 sols pièce. . . . CLII 11.
En . . ? CXXVIII 11.
93
Le 4 Février on prit de M. Bahuc, procureur en la
Chambre de l'Rdit, 1200 livres sur les 1500 « que Mes-
« sieurs de la Chambre (de Guyenne) ont donne a la
« ville sur ledict Bahuc pour estre repçeu procureur en
<< lad. Chambre. » Bahuc s'obligea envers M. Raigmc
au profit des Consuls à bailler les 300 livres restantes
dans deux mois.
Aux syndics de THôpital, on prit 700 livres au de-
nier 15. Les intérêts retenus s'élevaient à la somme de
46 livres, 13 sols, 4 deniers. Restait donc de liquide
653 1., 6 sols, 8 deniers (i).
Le 18 Mars, emprunt à M" Jean de Laborde, avocat,
de mille francs au denier 15 et pour un an. L'intérêt
payé d'avance, par mandement sur xM' Estienne Boisse,
collecteur des Consuls, soit 66 livres.
« Le 25 Mars 1629 a este emprunté pour les afferes
« de la santé de M. de Guardes, jadis cons"*'' cent livres
;< à raison du denier quinze ,>.
« Le 29 Apvril 1629 Monsieur Corne nostre collègue
« en compagnie de Messieurs de Faure, Buard et Del-
« pech ont este a mi-chemin de Villeneufve pour pran-
« dre quatre mille livres de Jean et Anthoine Menoyre,
« frères, marchands dudit Villeneufve, qui ont preste
;< lad. somme a l'inlerest, a raison de sept et demi pour
Plus le 27" duJ. mois, jour de Mard}' Gras en
dix huit doubles pistolles ;i 15 livres pièce. . . II c LXXIII 11.
Monnoie VII 11.
Plus pour l'interest au denier 15-cent livres . . C 11.
(Desduict l'interest, reste en les mains de M^
de Lafaige en argent 500 II.
et six vingt sacs de bled froment dans le grenier
de ladite dame de Nort).
L'intérêt au denier 15 équivalait k 6 {. 6<> pour 100.
(1) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 88, v.
94
« cent. Ils ont este payes de l'interest a Tadvance de
« quo}' a este passe deux obligations scavoir de deux
« mille livres a chascun desd. deux frères, retenues par
« Aubert, Not. Royal de Villeneufve (i) ».
Le 14 Août 1629, les Consuls « ayant apprins que
« Monseigneur le cardinal de Richelieu estoit dans Alby
« ou les depputez de Montauban avoient traicte avec
« lui et accorde de remettre lad. ville entre ses mains
« pour le service du Roy et que led. Seigneur Cardinal
« debvoit faire son entrée dans led. Montauban, le 2^'^
« ou 29<' du mesme moys, nous avons assemble aucuns
« de Mess""* les Juratz qui se sont trouves dans la ville
« pour scavoir sil seroit a propos de l'aller saluer dans
« led. Montauban de la part de la ville et luy represen-
« ter la désolation d'icelle, les foules qu'elle reçoit
« journellement et tout le pays d'Agenois pour fournir
« la subsistance des gents de guerre et Vextresme
« dizette qui l'afflige et en considération de ce supplier
« led. Seigneur de nous voulloir descharger du paye-
« ment desd. gents de guerre et nous faire l'honeur
« d'obtenir de Sa Majesté par son auctorite et créance
« le don des iailhes pour quelques années et Vimposi-
« tien sur tout le pays d'Agenais de plusieurs som-
« 7iies que ceste ville a advance pour led. pays et dont
« elle paya annuellement les intérêts, bref pour entre-
« tenir led. Seigneur Cardinal de plusieurs autres af-
« faires importantes tant pour ceste ville que pour tout
« le pays. Sur quoy a este délibère que nous y députe-
« rions quelques uns de messieurs les Juratz qui se
« tiennent à la campai gne puis longtemps {2). De faict
« que tout a l'instant nous avons députe pour aller a
« mond. Seigneur le Cardinal, à Montauban, M""* de
(l)Arch. d'Agen. BB. 51, pp, v5, 104.
(2) A cause de la pesU-.
95
« Loubatery, de Lescazes, advocat, le jeusne, et de
« Reilhery, aussy advocat auxquels avons escrit et les
« avons prie de faire led. voyage (i) ».
Le cardinal ayant avance son voyage, les députés
partirent le uj avec l'agrément du duc d'Epernon et
revinrent le 23.
-( Le 23» dud. moys d'Aoust Icsd. sieurs députes sont
« reveneus après avoir salue niond. Seigneur le Cardi-
« nal de Richelieu dans la ville de Montauban après la
« réduction de ladicte ville qui fut faicte le 20« du
« mesme moys ».
Le Livre-Journal des Consuls est muet sur les
résultats de l'entrevue.
En Novembre, le duc d'Epernon autorisa les Con-
suls, comme syndics du pays, à lever dans l'Election
d'Agenais la somme de 9.124 livres, 3 sols, 9 deniers
« pour leur part de la somme de six vingt mille livres
« que le Roi ordonne de lever sur la généralité de
« Guyenne pour le paiement des gens de guerre.
« Faict à Agen le 13"= de Nov. 1629 (2) ».
Avant de sortir de charge, les Consuls de 1629 récla-
mèrent des Commissaires au Bureau de la Santé « pour
« ouyr, clore et arrester les comptes quils exibarent au
« dernier bureau ».
Le s"" de Lescazes, chanoine, « a dict n'avoir charge,
•< soy reservant neantmoingsden communiquera Mess"^
« du Chapitre vendredy prochain ». Il fera savoir leurs
résolutions.
Le président du bureau, de Lacrompe et le s"" Tcur-
nade, conseillers, le Procureur avec Messieurs de Les-
(i) Arch. d'Asren. BB. 51, p. 116.
(2) Arch. d'Ag-cn. BB. 51, p. 122
96
cazes, le jeune, avocat, Katier et de Faure v< jà nom-
més » examineront les comptes,
« Cependant les comptes de Gavry, Laboulbcnne et
« la Bernadoune, volanj^iers, seront rapportes pour
« estre veus avec ceux desdits Consuls (i) (20 Novem-
« bre 1629) » .
Le s'" de Corne, chargé de la recette de tous les em-
prunts durant les quatre premiers mois de 1629, déposa
ses comptes sur la table (^18 Dec. 1629).
Les comptes ayant été vérifiés et clôturés par les pré-
cédents commissaires, on déclara qu'il n'y avait pas
lieu à nouvelle révision et que la clôture déjà faite
« sortira à effect ». On accordera 25 livres à Corne
« tant pour la fasson desd. comptes que pour s'estre
« trouve une pistolle et un pistollet faux et quatre
« quartz d'escu de l'argent par luy reçu (2) ».
Il fallait obtenir que dans le répartement fait par les
Conseillers de l'Election fussent compris les intérêts
des sommes dues par la ville .
Aussi les nouveaux Consuls de 1630, écrivirent au
sieur Dauré, en mission à Paris. On lui envoya « Testât
« de toutes les debtes de la ville àffin d'obtenir arrest
« du Conseil portant injonction aux Esleus de com-
« prendre dans leur despartement les intérêts des som-
« mes par nous deues (3) >; .
(1) Arch. d'Ag-en. GG. 255.
(2) Arch. d'Agen. GG. 255, p. 150.
(3) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 133.
En Avril, la cité d'Agen fut taxée à Uni VIIc XL livres (2740) pour
fournir des habits à l'armée d'I'alie. (Ordonn. du Roi transmise le 2o
Mars par les fr^soriers Générau.x), capitation levée sur les privilé-
giés comme sur les non-privilégiés. On assembla les Trois Ordres le
1 1 Avril. Comme la ville ne s'exécutait pas, le 28 Juillet, le sieur Fou-
cault, commis à la recette générale des Finances, envoya son commis
Brandon avec un commissaire « pour contraindre noste trésorier La-
97
Quelqvies jours avant, les Consuls, le U) l'cvricr,
avaient rc^u en prêt au denier 15, de Madame de Mon-
tesquieu, (i) la somme de douze cenis livres, suivant
l'arrêté du bureau de la Santé.
L'année 1631 s'annonçait encore plus mauvaise que
celle de 1630.
La ville était menacée par ses créanciers d'être exé-
cutée et ses revenus et émoluments saisis.
Le corps de ville fut convoqué pour le 1'=' Février et
se réunit ce jour-là.
Les Consuls exposèrent à la Jurade que la ville et
Communauté se trouvaient enf^agées pour la somme de
75,ooo livres. Comme la ville n'a aucun fonds pour
satisfaire « au paiement de ses créanciers et mesme au
« paiement des intérêts », comme toute imposition leur
est annuellement refusée par les officiers de l'Election
et Messieurs de la Cour des Aydes, en présence de la
saisie imminente des revenus et émoluments de la ville,
«le décret, et '.adjudication desquels il est impossible
« d'esviter, s'il nest treuve quelque expédiant », les
Consuls demandent aux Jurats de délibérer.
Lesjurats « d'une commune voix ont arreste qu'il
« sera fait très humbles remonstrances au Roy et a Nos-
v< seigneurs de son Conseil de la mi.sere dans laquelle
« ceste pauvre ville se treuve maintenant... (pour pcr-
« mettre) « l'imposition du principal et interests » des
€ faigc de leur fournir la somme de llm VIIi- XI^ livres ». On ne put
encore payer. Mais il fallut payer le voyage des commis, soit 36 li-
vres 16 sols. On écrivit au s"" Foucault do vouloir bien attendre un
peu. (Arcli. d'Agen. BB. 51).
(i) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 132. Marguerite de Sevin. Déjà en
1624, elle avait été remboursée d'une somme de 1200 livres que la
ville lui devait. (CC. 361).
7
98
sommes que la ville doit pour 1630 et 163 1 .< et ce
« (tant) sur led. pais pour ce qu'il doibt a la près, ville
« que sur icelle dicte ville et jurisdiction de ce quelle
<f doibt en son particulier, et par mesme moyen Sad. Ma-
« jesté sera très liumblement suppliée d'accorder auxd.
« sieurs Consuls les lettres d'assiette des sommes a heux
<: deues par led. pais d'Agennois ainsin quil resuite des
1 actes et comptes qu'iceulx ont randu aud. pais, clos
« et arrestes par les deputtes d'icelluy (i) ».
Ce même jour, P'' Février 1631, les Consuls décidè-
rent « que M. de Pages qui vit en Cour sera prie par
« M. de Corne de vouloir despartir sa faveur envers la
« ville pour obtenir permission d'imposer les interests
« des sommes que la ville doibt tant de l'année dern.
« que de la près, et de poursuivre les lettres d'assiette
« du principal, s'il se peult, des sommes que le Pays
« doibt à la ville (2) » .
Le 10 Pévrier, M. de Verduc, syndic de l'Hôpital,
partit pour Bordeaux pour obtenir main levée des
3400 livres, reste des ^ooo livres que feu Monsieur
d'Agen avait consignées entre les mains de M. Duburg,
« naguieres recepveur des tailhes », sommes destinées
à la nourriture des pauvres. Les Consuls avaient écrit
à M. le Président Daffis et au Procureur Général.
Le reste des 8000 livres devait être employé à la
réparation de l'Eglise Cathédrale de St-Etienne.
« Nota que feu M"" d'Agen a laisse aux pauvres de la
« présente ville 2300 1. que M"" le Grand Archidiacre,
« son héritier, a dit vouloir payer suivant lïntention de
« M' d'Agen w.
(i) Arch. d'Agen. CC. 185. (Liasse).
(2) Arch. d'Agen. BB. 22. p 25,
.y
99
On écrivit à M. Sicrc, l'avocat de la ville au Conseil
du Koi, pour obtenir main levée (i).
Le 13 Février, le Consul Corne re<,ut .\()() livres dix
sols sur le lé<;at pour les pauvres fait par M. d'Aj^en,
« plus 233 livres dont il a baillé à M. (jautier 150 livres.
« Oultre ces 150 1. M. Gautier a reçu vjOO livres des
« hoirs. Led. jour nous avons envoyé à l'aris à M.
v< Fages, secrétaire de Monseigneur le duc d'Fspernon,
« Farrest de la Cour des Aydes de la près, ville portant
« vérification de nos debtes qui montent ? a soixante et
« quelques mil livres, ensemble la délibération de la
« Jurade et requeste affin d'obtenir permission du Uoy
« d'imposer les interests de lad. somme (tant) sur le
<i pais d'Agenois que sur nostre ville pour l'année près,
« et dernière (2) ».
Deux mois après, le Livre Jmirnal exprime sa satis-
faction :
« Le 2"^ d'Apvril 163 1 nous avons commence de faire
« la distribution de la somme de 8444 livres, 13 sols,
« 8 deniers que nous avons reçue des (sommes) consi-
« gnees par feu M. d'.\gen, pour les pauvres des pai-
« roisses, selon le despartement quy en a este par nous
« faict, laquelle distribution continuera chascun diman-
« che et sera faicte par les commissaires par nous a cest
« effect désigne jusques au moys de Juin (3J ».
Entin on écrivit au duc d'Epernon une lettre de sup-
plications pour obtenir la convocation de l'assemblée
du pays. La lettre était signée : Caussade, Consul, et
Buard, Jurât. Le duc, par une lettre datée de Nérac, le
5 Août 163 1, accorda la convocation du Tiers Etat
(1) Arch. d'Agen. BB. 51, p. If)2, v,
(2) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 163.
(3) Arch. d'Agen. BB. 51, p. 1^5. Il est rare que les chiffres si»ient
absolument concordants.
A«^-'
.\0
«>*
z>
.■^"^
lOO
J'Agenais et désigna pour les présider le juge mage
Boissonnade (i).
Les Consuls reçurent (17 Septembre) de M. Géraud
de Boissonnade, conseiller du Roi et receveur des tail-
les en l'Election d'Agenais, la somme de 9220 livres
imposée sur le pays en l'an 1630 en exécution d'un
arrêt du Conseil d'Etat du 23 Juin 1629 contenu dans les
lettres d'attache des Trésoriers Généraux de France en
Guj'enne, lettres adressées aux officiers de l'Election,
le 20 Mars 1630, pour en faire le département sur le
pays et recette d'Agenais, en faveur des Consuls
d'Agen. Cette somme était destinée au remboursement
des sieurs d'Estrades et de Malartic qui avaient avancé
les fonds pour l'entretien de l'armée mise sur pied par
Mk*" le duc d'Epernon en l'année 1628 (2).
Les Consuls, avec une opiniâtreté que rien ne lassait,
poursuivaient la liquidation de leurs comptes par l'ob-
tention des lettres d'assiette royaux sur la ville et le
pays d'Agenais pour l'extinction de leurs dettes (3).
On passa à Paris une convention avec M* Jean de
Laborde, contrôleur de la maison du seigneur cardinal,
par laquelle il promit aux Consuls représentés par
noble homme, M^ Jean de Reilhery, conseillerdu Roi et
son avocat en l'Election d'Agenais, d'obtenir du Conseil
permission d'imposer sur le pays et la ville 25377 livres
avec les intérêts depuis le y Avril 1628 d'une part et la
somme de 43348 livres et les intérêts de la présente
année 1631, suivant les délibérations de l'Assemblée
du pays d'Agenais et de la Jurade desdits jours, 8 Avril
1628 et i*^'' Février 1631, y compris les dépenses et frais
(1) Ibid.
(2) Arch. d'Agen. CC. 185-
(3) En 1631, les Consuls d'Ag-en avaient aussi emprunté au chapitre
delà cathédrale de Condom une somme de 3000 livres, dont l'intérêt
se montait ;i 187 1. 10 sols. fArch. d'Agen. CC. 192).
101
faits pour ledit pays d'A^enais par Messieurs Hector
Lafai}4;e et Bernard Sabouroux, trésorier et receveur
desdits Consuls, du XXVII^ Juillet 1624, XXVII» jan-
vier 1626, X" Mai et X« Décembre 1627 et Vil h Avril
l62,s.
On remit cinq états de dépenses à M. de Laborde
ainsi que les procès-verbaux des Etats d'Agenais du
XI» Décembre 1626, V" Mai et V" Décembre 1627, VI''
Avril 162H, siijnés Leydet, et 37 copies des obligations
contractées par les Consuls pour les emprunts des
sommes dont on requérait l'imposition.
On promit à M. de Laborde 3000 livres payées comp-
tant en récompense des dépenses, sollicitations, vaca-
tions qu'il emploierait à l'obtention des lettres d'as-
siette (2 Dec. 1631) (i).
Enfin le 29 Décembre s'ouvrirent les Etats d'Agenais
dont le duc d'Epernon avait autorisé l'Assemblée.
Entre autres résolutions, on résolut de défendre con-
tre quelques villes voisines de Montauban qui préten-
daient rejeter sur la ville d'Agen et le pays d'Agenais
une partie des dépenses et des dommages subis par le
fait des gens de guerre.
De même, contre les Consuls de Monclar qui avaient
attaqué en responsabilité pour une somme de 600 livres
et plus les Consuls d'Agen devant la Cour des Aides.
On demandera avec instance des lettres d'assiette au
Roi et à son Conseil, après que les députés nommés par
les Etats auront ouï et clos les comptes relatifs aux
sommes dues par le pays à la Communauté d'Agen.
Les Etats déléguèrent auprès du Roi Louis XIII, le
premier Consul d'Agen, le sieur de Caussade, et le
député de Marmande, le sieur de Brezets (2).
(i) Arch. d'Agen ce. i»5.
(2) Arch. d'Agen, CC. 185. Voir au.x Pièces justiticatives U délibé-
ration des Etats in extenso.
I02
Le règlement de ces comptes se faisait toujours at-
tendre .
Le Conseil d'Etat, plus préoccupé des tailles royales
que des tailles consulaires, craignait que de nouvelles
impositions empêchassent par leur excès même la ren-
trée des deniers du Roi. On atermoyait constamment.
Le Roi ménageait avec le plus grand soin les forces
contributives presque épuisées de ses sujets, pour sou-
tenir les desseins du grand ministre qui gouvernait
TEtat, alimenter des dépenses de ses guerres d'Italie
(1624-1630) et la guerre intérieure contre les protestants
et les Anglais (1627-1629) et préparer enfin les guerres
d'Allemagne.
Les Trois Ordres de la ville d'Agen se réunirent de
nouveau le 16 Juillet 1633, près de deux ans après.
MM. Bernard de Faure, s' de Castres, Estienne
Baulac, avocats en la Cour, Pierre Solac, procureur en
la Cour Présidiale, François de Monpezat, écuyer s"" de
Poussou et Pierre Dulaurens, procureur en la Cour,
Consuls d'Agen , représentaient la Communauté
d'Agen.
Messire Gaspard de Dailhon du Lude, illustrissime
et révérendissime évêque et comte d'Agen, M^ Marc
Anthoine de Cavasse, archiprêtre de Marmande, Pierre
Sauveur, Michel de Cunolio et Bernard Daurée, cha-
noines de l'Eglise cathédrale ; Pierre Aubarel, Joua-
chim de Bourges, Claude Charrin, Anthoine Pheletin
et Jean de Béchon de Caussade, chanoines en l'Eglise
Collégiale de St-Caprais, représentaient le clergé.
Pour la Cour Présidiale, Messieurs maistres Anthoine
de Boissonnade, conseiller du Roy en ses Conseils
d'Etat et privé, président et juge mage en la sénéchaus-
sée d'Agenais, Arnaud Delpech, conseiller du Roy et
lieutenant criminel, Jean Couquet, lieutenant principal,
Jean de Laboulvenne, Jean Jacques de Nargassier, Jean
103
de Chemilhac, Jean Douzon, Anlhoine Kaignac, Nico-
las de Daulac, Pierre ? Ancelin, conseillers, Laurens
de Redon, procureur du Roi.
Pour l;j Jurade et corps de ville Messieurs >!•• dui-
Ihaume de Maures, Arnaud Uelpech, Jean Poulain,
Cicraud Clrimard, Géraud Lcscazes, ?, Ducros, An-
thoinc Raignac, avocats en la Cour, Hermand de Sevin
ccuyer, Raymond de Camus et Jean Duluc, docteurs en
médecine, Jean Singlande, Jean Daurcc vieux, Jean
Kcrran, François Vives, fean de Rcillery, Gcraud
Daurée, Géraud Verduc, Jacques Peric, Augustin
Bouloigne, aussi avocats, Anthoine Buard, Pierre Girle,
bourgeois et marchand, Pierre Lassort, Jacques Sin-
glande, Anthoine Rocquier, François Jeyan, procureur.
L'Evêque présidait l'assemblée.
Bernard de Faure exposa que « pendant les années
« escoulées ayant pieu a Dieu d'affliger ceste ville et
« communauté avec le reste de la Province de ses fléaux
« de la guerre, de la peste et de la famine. Messieurs
« les Consuls leurs devantiers avoient este constraints
« fere de grands emprunts tant 'en qualité de syndics
« du pays pour la subsistance des armées du Roy
« dont lesdits sieurs Conseuls sont obliges et en payent
« les intérêts annuellement car quoyque ses emprunts
« regardent l'interest de toute la sénéchaussée d'Age-
« nois comme appert des comptes arrestes en diverses
« assemblées du pays faictes par authorite de Sa
« Majesté ; comme aussy lesd. sieurs Conseuls ont este
« contraints par délibération des trois Ordres et actes
« de Jurade faire divers emprunts de grandes et nota-
« blés sommes pour la nourriture et entretien des pau-
« vres, ensemble des religieux exposés et officiers de la
« Santé pendant que la ville a este affligée du mal con-
« tagieux pendant deux diverses années,.. »
104
Bernard de Faure lit ensuite remarquer que plusieurs
habitants qualifiés avaient emprunté et s'étaient obli-
gés en leur propre et privé nom et qu'étant sur le point
d'être poursuivis, ils allaient à leur tour poursuivre la
Communauté pour être déchargés desdites obligations.
Comme la Communauté n'avait pas de fonds, elle n'a-
vait d'autre moyen d'y pourvoir « que d'obtenir lettres
« d'assiette pour impozer lesd. sommes sçavoir selles
« quy regardent les affaires dudict Pays sur toute la
« Seneschaussee et Eslection d'Agennois et celles qui
« ont este empruntées pour la nécessite particulhiere de
« la presant. ville et Communaulté sur la jurisdiction
« et tailhable d'icelle ».
De Faure ajouta que, pour la vérification des dettes,
commission avait été donnée à M. de Raymond, tréso-
rier général en la généralité de Guyenne. Et pour que
cette vérification fut plus authentique, les sieurs Con-
suls ont assemblé les trois Ordres « suivant la coustume
« antienne et uzage observe de tout temps en la dicte
« ville pour commettre des dépputes, des commissaires
« de chaque ordre, pour acister a la dicte vérification ».
On délégua MM. de Cavasse et Girardin, chanoines
de St-Etienne, Bourges et Charrin, chanoines de St-
Caprais pour le clergé ; pour la magistrature MM. de
Coquet, Laboulvenne, Nargassier et de Redon ; pour
la Jurade, MM. Ducros, de Sevin, de Ferran, deGirles
Jurats (i).
« Le Grand Livre Noir appelé le Livre des rentes »
restait toujours ouvert (2).
Enfin, après tant de démarches, tant de sollicitations
et de suppliques, tant de dépenses et de voyages en
Cour, on obtenait l'arrêt suivant, plus d'un an après la
délibération des Trois Ordres :
(1) Arch. d'Agen, CC. i><6,
(2) BB. 51, p. 40, V.
105
Extrait du Registre du Conseil d'Etat
Arrî't du s Octobre i6].f
« Sur la rcqueste présentée au Roy en son Conseil par
«les C!onsuls delà ville d'Agon... qu'il plaise à Sa
« Majesté permettre de faire imposer et livrer sur ladite
« ville d'Agen, dans quatre mois ou autre plus bref
« délai qui se pourra, la somme de quarante deux mille
« six cens trente quatre livres deiil' en particulier />ar
« ladicte ville et jurisdictio't avec les intérêts de la
« presante année, revenant à deux mil sept cents cin-
« quante livres douze sols ; et sur tout le pays dWge-
« ;io/s, la somme de trente quatre mil six cens neuf
« livres, dues ans dits suppliants pur led. pays avec
« les interests, qui ontcouru.depuis le tretziesme décem-
« bre 1631 que ladite somme fust arrestee en l'assem-
« blée du pays et les frais dans deux ans prochains,
« pour estre lesd. sommes employées, sans divertisse-
« ment, au profit et acquit de ladite ville et jurisdic-
«tion... En oultre valider la levée de ladite somme
« de quatre mil quatre cens quatorze Hures dix sols
« faicte en Tannée mil six cens trente pour quarante
« cinq quartiers imposez, suivant la délibération de
« ladite ville, sur tous les habitans d'icelle pour le
« paiement des interests lors eschus » .
L'arrêt du Conseil d'Etat rappelait ensuite les deux
procès verbaux de M'^ Robert Raymond, trésorier de
France en la généralité de Guyenne, la délibération des
Consuls du pays d'Agenois du 28 Avril 1628, celle des
Trois Ordres de la ville d'Agen du 16 Juillet 1633,
l'ordonnance des Trésoriers de France du 22 Février
1634, renvoyant les Consuls d'Agen devant le Roi, et
l'arrêt de la Cour des Aydes portant vérification des det-
tes de la ville et du pays d'Agenois en date du 4 Sep-
tembre 1630, la délibération de la maison de ville d'Agen
io6
pour l'inventaire des intérêts dûs en date du 6 Septem-
bre 1630
L'arrêt ordonne une nouvelle vérification par le s"" de
Verthamon, maître des Requêtes et intendant de la jus-
tice de Guyenne, assisté du Procureur y;énéral en la
Cour des Aydes et fait défense aux créanciers d'user
contre les Consuls d'aucune contrainte, sous condition
de payer les intérêts.
A l'arrêt est joint l'état détaillé des dettes de la ville
d'Agen et du pays d'Agenois. (i)
L'intendant Verthamon, fut commis, par arrêt du Con-
seil du 25 Octobre 1634, et chargé de la vérification des
dettes de la ville d'Agen et du pays d'Agenois, opéra-
tion qui fut exécutée par le trésorier général de Gour-
gue et M"" de Verthamon, les 10, 11, 12, 13, 14 et 15
Février 1635.
« Et calcul fait, dit l'Intendant, nous avons trouve
« Testât des sommes deues à la dicte ville d'Agen par
« ledict pays d'Agenois, montan à la somme de qua-
'< rante-cinq mil neuf cens vingt-deux livres huict sols
« unze deniers, suivant compte final fait et arreste entre
« les depputtés de lad. ville et dudict pays, lequel nous
« avons alloué
« Et pour le regard des sommes conteneues en Testât
« de dettes pretendeues estre deues par lad. ville à plu-
« sieurs particuliers, contenans deux chapitres cy-des-
« sus, le tout c'est trouvé monter à quatre-vingt mille
« cens unze livres sept sols six deniers (2). »
A cet arrêt était annexé, V Estât des debtes présentes
et affirmée véritable par Pierre de Méja qu'on
trouvera résumé aux pièces justificatives.
(1) Arch. d'Agen C.C. 192.
(2) Arch. d'Agen C.C. 192.
107
Dans ce document certaines dettes mentionnées ci-
dessus avaient disparu et de nouvelles y apparaissent,
dettes que, depuis 1C29, les Consuls avaient clé obliges
de contracter.
Au moment où nous sommes arrive, vin<;t ans seu-
lement nous s<?parent de la {guerre de la l'Vonde et pen-
dant ces vingt années le pays d'Agenois dut encore sup-
porter beaucoup d'avaries et de misères.
La Fronde acheva la ruine du pays, qui, pour panser
et guérir ses blessures, attendit longtemps encore l'au-
rore des jours meilleurs.
Dans cet intervalle de vingt ans, un homme s'était
rencontré dont le cœur inlassable s'étendait sur toutes
les misères sociales. C'était un pauvre paysan landais,
Vincent de Paul. Comme Jeanne d'Arc, il eut grand'
pitié du Royaume de France.
Déjà en 1624, il avait fondé les Frères de la Mission
et multiplié « les frairies de charité » qui bientôt enve-
loppèrent la France de leur réseau (ij.
Treize ans plus tard (Août 1637), M""= de Combalet
(Marie de Vignerod), nièce de Richelieu, duchesse
d'Aiguillon fondait dans sa duché la Mission de N.-D.
de La Rose, pour l'instruction et le soulagement des
pauvres (2).
A la tîn de l'horrible année 163 1, les Consuls sor-
tants léguaient à leurs successeurs leur mélancolique
testament. Ce sera notre conclusion.
(1) Voir A. Fcillct. La Misère nu temps de la Fronde et St-Vin-
cent de Paul.
(2) V. Abbé Alis. Histoire de la ville d Aiguillon, p. 272.
108
« Jurade du dernier de Décembre 1631 sur l'adieu de
« Messieurs les Consulz.
« Y estant messieurs de Grimard, Ratier, Laborde,
« Caussade, Roussel et Boyer, Consulz.
« A este repres'^ par lesd. sieurs Consuls auxdits
« sieurs Jurats que puis le commenc' de ceste année
« quilz feurent mis en la charge consulaire, ils ont ad-
« ministre les aff"*^ quilz ont eu sur les bras le mieux
« qu'il leur a este possible, quy ont este très grandes,
€ ayant eu la famine et la peste dans la Jurisdiction et
« que pour y pourveoir ilz ont este contraints emprun-
« ter quelques sommes de deniers qu'ils prient lesd.
« sieurs Jurats vouloir approuver eesemble tout ce
« quils ont faict jusques a ce jour dhuy qui a este avec
« ung tel soing et mesnagerie qu'il leur a este possi-
« ble (i) ».
Ste-Livrade d'Agenais, Mai 1902,
(I) Arch. J'A^en. BB. 52.
PIECES JUSTIFICATIVES
Les pièces qui sont ci-annexées se composent :
1° Des délibérations de la juridiction de Duras pen-
dant la famine de 1630-1631.
2° Du Mortuaire des paroisses de Pinel et Hauterive.
3° De trois pièces relatives à la ville d'Aj^en et au
Pays d'A gênais.
Les Jurades de Duras nous donnent un exemple des
difficultés auxquelles se trouvaient en butte les Com-
munautés d'Airenais en ces temps de malheur.
D'un autre côté, ces Jurades montrent que dans un
pays, comme l'Agenais, qui contenait peut-être un tiers
de ses habitants pratiquant la R. P. R., les divisions
et les haines confessionnelles entre protestants et
catholiques aggravaient encore ces misères.
Enfin, ces délibérations fournissent de précieux ren-
seignements sur les mœurs administratives du Pays
d'Agenais.
En second lieu, il m'a paru bon de publier intégrale-
ment le Mortuaire de Pinel et Hauterive relatif à la
famine de 1630-1631.
On y verra le lamentable nécrologe des faméliques,
tenu avec une scrupuleuse exactitude par le vicaire
FilhoUy, le Designator de cette lugubre et intermina-
ble théorie de morts.
On jugera par le Mortuaire de ce qu'était la famine
de 1631 en Agenais, mortuaire établi dans une juridic-
112
tion assise en Tune des régions les plus fertiles de notre
pays.
Le Mortuaire d'une juridiction voisine, celui de
Casseneuil, enregistre, comme on l'a vu plus haut, de
véritables hécatombes. Mais le vicaire J. Gizard reste
silencieux sur la cause de ces multiples décès.
La cause, nous la connaissons : c'est la faim.
On remarquera que la paroisse de Pinel donna plus
de morts que celle d'Hauterive, probablement par la
différence de nature du sol, moins productif à Pinel et
par conséquent de moindres ressources.
Les familles les plus éprouvées furent celles des
Fichart, au village de Baillarguet ; des Pontie, à Bel-
mon ; des Feille, au village de Coste ; des Fraichange,
des Borne et des Lapeyre. Beaucoup de ces familles
ont disparu ; d'autres se sont déplacées. D'autres en-
core, portées aux Mortuaires de la famine et de la
peste, existent toujours, implantées et indéracinables
sur cette terre qu'elles cultivent depuis plus de trois
siècles. Ces familles y trouveront l'irrécusable témoi-
gnage des malheurs de leurs pères dans ces siècles de
désolation .
Meinoria veterum renovahitur .
Les trois dernières pièces se rapportent, la première
à une lettre éloquente et presque irritée de M'^ Jean
Barbier, seigneur de La Serre, ou plutôt à une sévère
apostrophe aux Consuls d'Agen, qui montre les âpres
difficultés inhérentes à la distribution des pauvres et
les redoutables dangers qui, dans ce temps de misère
noire et de peste bubonique, faisaient trembler les
populations.
La seconde se rapporte à l'Assemblée du Pays d'Age-
nais, c'est-à-dire à la réunion du Tiers Etat d'Agenais,
principalement représenté par les douze villes.
H3
Nous la donnons in extenso.
La troisième est le résumé d'un gros cahier où se
trouvent détailles divers emprunts du Pays d'A<;en.'iis.
Enfin une quatrième pièce que nous ajoutons a trait
à la levée des avances faites par les Consuls aux
habitants d'Aj^en pour les j^rains fournis.
En pénétrant au vif dans les mœurs linancières de
ce temps, il nous a semblé que le lecteur nous y sui-
vrait avec intérêt.
DURAS
JURADE DU II FHVRIER 1631 (i)
Ledict jour en la mesme jurade a este propoze par
lesd. Consuls, qu'il serait temps de subvenir aux pau-
vres à cause qu'ils pt^Hsscnt de faim et pour cet eiïaict
ont dict aveoir fait advertir par leur mande les S"^ Prieur
et Curés de la pr. ville et jurisdiction, Consuls des
paroisses et habitans tant de lad. ville que jurisd., qui
ne tiennent compte de s'assembler en la jurade. Comme
aussy ont dict avoir faict perquisition de la volonté des
habitans pour le subvention pour les pauvres et treuve
fort peu de gens qui veuilhent contribuer; par plurallité
des voix a esté arreste que lesd. S" Prieur et Curés,
seront appelés en vertu de l'arrest de la Cour du Par-
lement de Bourdeaux par un sergent royal pour savoir
leur volonté aux lins de la subvention pour les pauvres
et seront sommes lesd. Cures de porter le dénombre-
ment de leurs pauvres aux tins d'y pourveoir et cepen-
dant que rolle sera faict du premier jour des pauvres de
la pr. ville, paroisse de St-Eyrard et Ste-Foy la Pe-
tite, pour sur les rolles estre faict despartement, dès
qu'on leur pourra subvenir par jour suivant le fonds
que la présente ville leur peu faire, et à ces tins il sera
procédé aux rolles et départe par les sieurs Mathieu,
Beaumes, Barthe et Beaulieu, Not'c'' Royaux. Aussy a
(l) CcUe pièce et celles qui suivent .<ont extraites des juraJes de
Duras. (Arch. Dép'" supplt E. 1356)
ii6
esté arresté comme autrefois que les portes de la ville
s'ouvriront par jour alternativement et que la garde
d'icelles se fera dorénavant par Jehan Charrin dict But,
auquel sera bailhé des gaiges six livres par moys et il
ne laissera entrer aucun pauvre. Ceux qui procéderont
aux rolles des pauvres feront rolle de bordiers, lesquels
seront mis hors de la ville, mesme les bordiers étran-
giers seront mis hors de la prés, jurisd.
La vizitte de la prés, ville sera continuée pour soy
couvrir de la maladie contagieuse ; et pour s'exanter de
la charge desd. pauvres étrangers, lesd. habitans de la
presante ville ne leur bailheront de couvert, ne loue-
ront leurs maisons à peyne de cinquante livres
(d'amende) (i).
(i) Signé: Lamorlhiére jurât, Joen jurât, Constans jurai, Royre ju-
rât, Janicon. J. Janicon jurât, Janicon jurât, Gharricre jurât, Deber-
nat jurât, Baulieu jurât, Mathieu jurât.
JURADE DU 17 FÉVRIER 1631
Aujourdhuy dix septiesme du moys de Febvricr mil
six cens trente ung en assemblée générale dans la ville
du marquizat de Duras en Agenois, Messieurs les Juges,
Consuls et Jurats soubsignés, estant ensemble M" Ciil-
let, Goure p''^«^ et curé de Balleyssagues, M<= Merle p'"'
et curé de Savignac, M»^^ Jehan Coudert p'>^<= faisant pour
yi* Thomas Coudert p''^^' et curé de Lubersac, les au-
tres sieurs prieur et curés de la près, juridic. ne s'es-
tant assemblés duhement advertis, a esté propoze par
lesd. sieurs Consuls l'ordre que on doibt tenir pour la
subvention des pauvres en la distribution des fonds
qu'ils auront pour leur subvention pourte Tarrest donné
en la Cour de Parlement de Bourdeaux le dix septième
Septembre dernier passé (1630) et qu'il est nécessaire
d'y pourveoir du premier jour a cause que les pauvres
de la près, ville et jurid. périssent de faim, par plura-
lité des voix a esté arresté que dans mercredy prochain
heure de dix heures du matin lesd.;sieurs prieur et curés
delà jurisd. apporteront roUe et desnombrement de
leurs pauvres lesquels roUes sen feront avec les per-
sonnes quy seront cy appres nomé et députe pour y pro-
céder et chascune d'icelles ensemble feront estât du
nombre des habitants desd. paroisses quy peuvent con-
tribuer a la subvention desd. pauvres de quoy aussy Ils
feront estât suyvant la faculté d'ung chascun par esgard
au nombre desd. pauvres ; pour ce fait et rapport y
estre pourveu ainsin que de raison et pour la parroisse
ii8
de Ste Colombe et Auzac est depparti M» Pierre Noble
O"', pour la parroisse d'Esclotte M""* les Joen et M"" E.
Haulan ; pour Baleyssagues, M"" le lieutenant ; pour
Savignac, M""* Sauvignac et Goure ; pour St-Sernin, M""
Allain Navarre ; pour Lubersac, M"" Rouyre ; pour St-
Front, Beaulieu avec M"" Yzaac Navarre et M>^ Yzaac
Mercat ; pour la ville, St-Eyrard et Ste-Foy la Petite,
M« Mathieu, Beaume, Barthe et Beaulieu (i).
(i) Signé : Terras, Juge et Jurât; J. Joan, Jurât ; Merle, Jurât ;
CoNSTANS, Jurât;
Goure, phre sans tirer
à conséquence ; Charbier, Jurât ;
Barthe ; Mathieu, Jurât ;
J. Janicon ; ROYRE, Jurât.
Descsugn ATS, Jurât ;
Beaulieu, Jurât.
RÉSUMÉ
DE LA DÉLIBÉRATION DU l8 FÉVRIER
(Duras)
MM"^ Terras Juge et Laulan avocat en Parlet appor-
tent le rôle qu'ils avaient fait la veille. Quoique requis,
M« Pierre Cales ? p'"^*= et curé de la paroisse n'y voulut
assister, bien que somme par Sergent Royal et autres
diverses personnes. Pierre Noble, Consul fut obligé de
faire le rôle en l'absence du curé de Ste-Colombe et
Auzac, comme Jehan Beaulieu en l'absence du curé de
St-Front, Mathieu Sauvignac et M» ? Merle, curé de
Savignac : Jean Royre, assisté de M« Thomas Coudert,
curé de Lubersac, remit les rôles entre les mains du
Consul Noble. Le prieur de Duras et le curé de la
paroisse ne parurent pas à lajurade malgré la notifica-
tion de l'acte de la veille. M« Jean Barthe, procureur
du Roi au siège de Castelmoron, assura qu'ils étaient
portés de bonne volonté. Cependant l'absence des
« sieurs eccleziasticques » empêchait de pourvoir à la
subvention générale des pauvres de la juridiction jus-
qu'à ce qu'on en connut le nombre. On décida
cependant qu'on enverrait le s"" Barthe à Bordeaux pour
emprunter « somme notable ». Messieurs du consis-
toire et habitants de la pr. ville seront priés de distri-
buer selon leurs pouvoirs aux pauvres de St-Eyrard et
de son annexe, sans leur permettre l'entrée de la ville
à cause de l'infection. Dans les autres paroisses il sera
par provision pourvu a la distribution en l'absence ou
en la présence des sieurs ecclésiastiques jusqu'à ce que
120
les rôles touchant le nombre des pauvres seront faits.
Lajurade néanmoins chargea les Consuls de convo-
quer « assemblée généralle desd. eccléziastiques et de
« tous les peuples ». Comme M** Ysaac Mercat avait
négligé d'apporter les rôles de la par. d'Auriac, de
même que le Consul M"^ Jehan Mercat pour la paroisse
de Baleyssagues «suivant sa députation », lajurade les
condamna « en la somme de trois livres envers les pau-
€ vres... en paiement de laquelle ils seront contraints
« par toutes voies dheues et raisonnables » .
Le même jour, lajurade, en attendant le règlement
de l'afifaire, exhorta les habitants de la ville à contri-
buer « selon leur puissance aud. entretien et qu'à ces
« fins les s""^ Noble, Consul, Janicon, Laulan, Barthe,
« Constans et Royre, suivront touttes les maisons pour
« les disposer à adjouter à ce qu'ils ont cy devant pro-
« mis par sepmaine, parce que leur charitte se treuve
« trop petite pour le grand nombre des pauvres qu'il y
« a •, ensemble que les sieurs Prieur et curé donneront
« de leur libéralités suyvant et conformément ù Tinten-
« tion de l'arrest gênerai de Nosseigneurs de Parlement
« et de leurs propres promesses faictes de leur part par
« ledit sieur Barthe quy a ces fins est prié de bailher en
« aumosne deux boisseaux du bled pour led. s"^ Prieur
« pour continuer la charitte commencée puis quelques
« jours par le Consistoire, lequel avec ce quy sera rap-
« porte des libéralités desd, s""* Prieurs, curé et habi-
« tants sera prié de contribuer selon sa puissance à
« rendre parfaite la subvention ordonnée pour lesd,
« pauvres ce que led. s"" Barthe a promis faire ».
JURADE DU 26 MARS 1631
(Partie en résume — Partie in extenso)
« Aulx fins de prendre une dernière et absollue réso-
« lution pour la subvention des pauvres ». Assemblés
« M*^ ricrre Terras, juge de la pr. ville, M. Pierre
« Noble, Consul, M'= Jehan Joen et Jehan Janicon ad«
« en la Cour de Pari' de B^, W Pierre Mathieu, Ma-
« thieu de Savignac N. R., Ysaac Navarre, Jehan Royre
« M"^ Ysaac Mercat, Pierre Rey, M"= ? Morin, Jurats et
« notables habitants. Ensemble N^ Arnaud Merle p''^^'
« et curé de la par. de Savignac, M-^ Gilles Gorsse p*"^^'
« et curé de Bayleyssague et frcre Guilhem Chabrie,
« recteur de la par. de St-Front, M*"' Mathurin, Fran-
ce çois et Bernard Barthe, frères, Jehan Guamallie ?
« estant Jurât de la paroisse de Ste-Colombe, Jehan
« Graulensdit Petit Jurât de la par. de St-Sernin, Jehan
« ChapouUie Jurât de la par. de Savignat et en absence
« de Dom Pierre Peyrot prieur de la pr. ville et par.
« de St-Eyrard et M« Jehan Barihe curé de lad. pr. ville
« et susdite par. St-Eyrard, M« Laurens Meric ? recteur
« de la par, d'Auzat M* Pierre OuUière ? rect. de la
« par. d'Esclottes, M^ Cautellat et (un blanc) Dufadi
« prieur et curé des par. de Ste-Coulombe et Auzac,
« M"^ Thomas Coudert prestre et recteur de Lubersac,
« M« Geraud Fri ? recteur de la par. de St-Semin
« dhuement assigné à ces fins par de Morin serg. R.
« comme a appareu de ses exploits et aussy en l'absence
« de Pierre Pasquier Consul de par. de Bazadois et de
« François Villar Consul de paroisse d'Agenais et de
122
« plusieurs autres Jurais des susd. parroisses dhuement
« intimés par le mande de la Jurade de la pr. ville.
« Apres avoir este propoze par led. sieur Consul quil
« a diverses foys essaya d'assembler tous les susd. eccle-
« ziasticqnes, ensemble la Jurade des paroisses, pour
« pourveoir dhuement à la subvention des pauvres suy-
« vant l'arrest de Nosseigneurs de Parlement, néant-
« moings quelque dilligence qu'il ayt peu faire il napeu
■i convocquer que les troys susnommés, ny lad. Jurade
« des champs, laquelle avec les susd. eceleziastiques
« deffailhants reffusent de se joindre au reste du corps
« de la prés. Communaulte pour se soubstraire a un si
« sainct debvoir sçachant bien que sans heulx il ne
« peult estre resoleu absollumant sur ce subject, auroit
« requis la Compagnie de délibérer promptement at-
« tandeu que les pauvres deffaillent journellement par
« deffaut de charité. Par pluralité des voix a este déli-
ce béré qu'attandeu l'absence des susd. huit ecclesiasti-
« ques et des Consuls et Juratsdes parroisses il ne peult
« estre pourveu absollument aud. affaires, néantmoingts
« attandant que sera commoditte de s'assembler, attan-
« deu qu'on ne peult trouver sommes notables et suffi-
« santés pour la norriture des pauvres a esté arreste...
« que la sixiesme partye desd. pauvres de la pr. ville et
« juridiction sera subvenue et entretenue parles susd.
« eccleziasticques sellon l'ordre ordonné par le susd.
« arrest et que à ces fins. . . il en serait faict partage sur
« les rolles et denonbrement d'iceulx quy en a esté cy
<c devant faict. Pour faire lequel partage ont esté deput-
« tes lesd. s'^ Noble, Consul, Laulan et Biarn ? Jurât de
« la pr. ville, les sieurs Pierre Gorsse curé, Barthe,
« prieur et curé et M^ Arnaud Merle... '
4 Et les cinq sixiesmes partyes restants du nombre
« desd. pauvres sera subvenue par tous les habitants de
« la pr. ville et jurisd. capables de lad. subvention
"3
« chascun scllon leurs facilitez et en suyvant le partage
« et distribuôn quy en sera fuict par les sus nommés.
Terras, Juj^e et Jurât.
J. jANicioN, Jurât.
Laulan, Jurât.
ROYRK hab'.
liEAULliiU, Jurât.
DE Mur AT, Jurât.
DE MoZNE, hab'.
JURADE DU 38 AVRIL 1631
(Répotise à l'arrêt du Parlement du 24 Avril)
En Jurade tenue a Duras le vingt huictiesme Apvril
« 1631 a laquelle ont assiste les Jurats soubsignes, sur
« la proposition qui a este faicte de par les sieurs Con-
« suis tendant a ce qu'ayant este faict certaine démons-
« tration fausse et artificieuse ou imputation à Monsieur
« le Procureur Général que les Jurats de la pr. ville
« faisoient refus de distrivuer les aulmosnes aux pau-
« vres de la Religion Catholique Romaine et autres
« choses concernant ce contenues en l'arrest donne par
« la Cour de Parlement le 24 du présent mois a la
« réquisition dud. Seigneur Procureur Général dont
'i lecture a esté faicte en la présente compagnie, la
« compagnie a arreste que les sieurs Merlault et Laulan
« conféreront avec le s^" Roche proc. en la chambre (i)
« pour prendre l'ordre qu'il faudra tenir pour se deffen-
« dre en lad. chambre et sur ce qui sera résolu led. s""
« Merlault envoyera homme expert ou yra en personne
« sellon quil aura este treuve expédient en la ville
« d'Agen pour obtenir l'expédition nécessaire a nostre
« deffance et que led. s"" Merlault advancera les frais
« nécessaires aux despans du public.
Signé : Laulan, Jurât ; J. JANICON, Jurât;
Charriere , Jurât \ Beaulieu ,
Jurât; de Beaume, Jurât; Des-
CRUGNATs , Jurât ; Merlault ,
Cousul ; Beyre, Consul.
(i) Chambre de l'Edit.
125
Les dissentiments entre catlioliques et protestants
continuôrent, car par une lettre du marquis de Duras,
la Jurade se réunit le 30 Mai 1631.
r Item en la mesme Jurade (30« May 1631) ayant esté
« représente parMi'Pierre Noble, C'"', avoir rcpceu une
« lettre de Monseigneur le Marquis du présent lieu es-
« cripte de Lorges du quinziesme du présent moys par
« laquelle il mande qu'il luy a este bailhe advis que
« les ausmosnes quy se font en la présente ville ne se
« font à tous générallement quoique les habitants
« catholiques y contribuent, a esté arreste, lecture
« faicte de la lettre de Monseigneur le marquis qu'il
« sera faict response au nom du publicq par M"" Laulan
« quy a esté prie d'en prandre la peyne (i).
Dans cette même Jurade, on prit la délibération suivante, relative
aux deux pippes de maïs que le marquis de Duras (i) avait données
pour les pauvres.
(1) Guy Aldonce de Durfort, marquis de Duras, comte de Rozan
(1605-1665), maréchal de camp en 1637, père de Jacques Henry de
Durfort, duc de Duras, maréchal de France.
JURADE DU 30 MAI 1631
Aussy en la mesme Jurade (30e May 1631) a este
arreste que les deux pippes de bled milhet qu'il a pieu
à Monseigneur le Marquis du présent lieu donner pour
ausmones auxd. pauvres de la prés, ville et jurisd. géné-
rallement sera vandu, pour l'argent qu'il en proviendra
estre distribué auxd. pauvres, led. milhet ne se pouvant
estre distribue en bouilhie, à cause de l'infection et
malladye contagieuse quy est par la juridiction, la-
quelle distribution se faira par le sieur Ro3're, conseul
au premier jour et a chascung pauvre ung sol par jour,
tant que l'argent quy proviendra du milhet durera (i).
(1) Arch. C" Duras 1356. (Aux Arch. D'<=-), pp. 316, 317, 318, 320
EXTRAIT DU MORTUAIRE
DE
N.-D . DE PiNEL ET DE Ste-CATHERINE D'H AUTERIVE ( 1 )
Le Judi Sainct vingt et huict Mars 1630 fut treuve
mort Tounion Dugols dans le bois de Baliarguet et
mourut de faim (2).
Le 8^ Octobre 1630, ay enseveli lehan Espinasol dict
le Cuisinier, âgé de soixante ans et mourut dans l'écu-
rie de M"" d'Hauterive.
Premier D(?cembre 1630 plus ie enseveli Guilien
Villeneufve fils de Thoni Villeneufve dit Thoniet et de
Jeanne Andrau et a este mis dans le cimetière de Pinel
âge de vingt-trois ans et mourut de fain.
FiLHOLLY.
le enseveli un petit garsoun del Parou dans le cime-
tière d'Hauterive qui est mort de fain.
(i) Canton de Monclar d'Agrenais.
Sur la couverture en parchemin, on lit : Registre acommancer en
l'année 1620 jusqu'à l'année 1640.
Mais un autre intitulé a précédé ce dernier. On n'en voit que la trace,
l'encre en étant presque effacée et presque illisible sauf les premiers
mots : Cest livre
^2) Je ne publie pas les décès de Septembre, Octobre et Novembre
1630, quoiqu'ils soient dus certainement à la lamine, parce que la
cause du décès n'y est pas expressément indiquée par le vicaire
FilhoUy.
128
Plus ie enseveli deux petits enfants et une petite rilie
des Boriquets de Blanchou et sount morts de fain et
sount este mis dans le cemitiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, Vicaire.
Plus ie ansevel}' un petit anfant et une petite filie des
Gorgi Vimals qu'ils sount morts de fain ^t les ay anse-
vely dans le cemitiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, Vicaire.
Plus ie ansevely deux petits anfants dans le cemitiere
de Pinel fils de feu Guiral Horadou et sount morts de
fain, du village de Pasture.
FiLHOLLY, Vicaire.
Plus se truva morte une pobre filie tout près du
vilage de Lemousi et fut ansevelie au cemitiere de
Pinel, elle estoit du vilage de Coste filie de feu Pierre
Felie âgée de quinze ans et mourut de fain 1631.
FiLHOLLY.
Plus ie anseveli un petit anfant de Biguier dans le
cemitiere d'Hauterive qui avoit nom Thoni âge de qua-
tre ans mort de fain .
FiLHOLLY.
Plus ie anseveli une petite filie del Faurat dans le
cimetière d'Autherive et morte de fain.
FiLHOLLY, Vicaire.
Plus est morte de fain dans le Biar (i) la famé del
Piel Rouge de Reginac.
Plus et mort de fain dans le Biar un fis de lespagnol
de Boutoric.
Le 18 Décembre 1630 a este anseveli Arnaud Lan-
drivie âge de sincquante ans du village de
(i) Le Béarn.
129
Coste a este truve mort dsns la grange du Sei-
ne» (l) gneur U'Authcrive et a este mis dais le cemi-
tiere d'Autherive par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le vingt et sincquiesme de Décembre jour de la
Noël fut ansevelie Mounde Soulage vefbe de
rien feu Grabielot agee de quatre vingts ans fr.t
mise dans le cemitiere d'Autherive par moy.
FiLHOLLY.
Et le mesme jour de Noël 1630 a este ansevelie
Graviele Ponthie filie de feu Giraud Ponthie
rien et de Jeanne Fraichenge agee de trente ans et
fut mise dans le cemitiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY.
Le vingt et six Décembre 1630 a este ansevelie
Jeanne Ponthie filie de feu Franciliou Ponthie
rie>i agee de quinze ans et fut mise dans le cemi-
tiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le 6"^« Janvier 1631 ay ansevelie Jeanne Chau-
bart vefbe de feu Esteve Ponthie agee de soi-
rien xante et dix ans et a este mise dans le cemi-
tiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le traiziesme lanvier 1631 ay ansevelie Jeanne
Lalebre vefbe de feu Pierre Felie du vilagc de
rien Coste agee de sincquante ans et morte de
.famine et fut mise dans le cemitiere de Pinel
par moy.
FiLHOLLY.
(I) Ce mot rien doit se rapporter au casuel. Le vicaire indique
qu'il n'a rien touché pour les funérailles.
130
Le i6« lanvier 1631 ay ansevelie Anthonie Felie
vefbe de feu lehan Borne agee de soixante ans
rien et a este mise dans le cemitiere de Pinel et
morte de famine l'cfice a este faicte par moy .
FlLHOLLY, vicaire.
Le 17e lanvier ie anseveli Guillen Dufour et a
rien este mis dans le cemitiere de Pinel par moy et
mort de famine âge de soixante ans.
FlLHOLLY, vicaire.
Le vingt-et trois lanvier 1631 le ansevelie Marie
Lacounque famé Leonart Borne dit Bricou du
rien vilage de Coste agee de trante ans et a este
mise dans le cemitiere de Pinel par moy.
FlLHOLLY, vicaire.
La de Finete et morte de famine.
Le vingt et quatre lanvier 163 1 ay anseveli
lehan Borne fils de Leonart Borne et de Marie
rien Laconque et a este mis dans le cemitiere de
Pinel. Conte deux cens (i).
FlLHOLLY, vicaire.
Le trantiesme lanvier 1631 a estee ansevelie Marie
Fraichange famé de Coine agee de trante ans morte de
fain et fut mise dans le cemitiere de Pinel par moy.
FlLHOLLY, vicaire.
Le dernier lanvier 1631 a este anseveli lehan Sirven
fils de feu lehan Sirven et de leanne Fraichanges âge
de sine ans et a este mis dans le cemitiere d'Autherive
et est mort de fain.
FlLHOLLY.
(l) Ce compte des morts comprend les morts de 1627, 1628, 1629 et
1630. Les années 1627 à 1629 ont été des années de pest«. Les pestifé-
tès n'y sont pas compris : on les enterrait sur place par terreur de la
contagion et leurs noms ne figurent qu'exceptionnellement dans les
Registres Paroissiaux.
131
Le quatriesme Fcbvrier 1O31 ie ansevelie CMarete
Escairac velbe de feu Estébé Péri sarj^an roial a^ee de
sincquante et sine ans et fut mise dans le cemitiere
d'Autherive par moy.
FlLHOLLY, Vicaire.
Morte de misère.
Deux cens. — Le septiesme Febvrier 1631 ie anseveli
lehan Laconque âge de sincquante et sine ans et a este
mis dans le cemitiere de Pinel et mort de fain.
FlLHOLLY, Vicnire.
Le nufiesme Febvrier ie anseveli dans le cemitiere de
Finel Oulivou del Four lis de feu Guilien del Four et
de leanne ^lachefer âge de vingt ans et mort de fain.
FlLHOLLY, vicaire.
Le mesme jour nufiesme ie anseveli Guilien la Con-
que dans le cemitiere de Pinel âge de trante et sine
ans et en mesme tams Ion vint dire que soun frère
Pierre estoit mort vers Pauliac (i) ils sount tous deux
morts de fain.
FlLHOLLY, vicaire. *
Le dishuictième Febvrier 1631 a este ansevelie lane
Chopi famé de lelian Villenufbe agee de crante ans et
fut ansevelie dans le cemitiere de Pinel et ausi mourut
une siene petite filie de sine ans et sount mortes de
fain et sount estes ansevelis a Pinel.
FlLHOLLY, vicaire.
Et le mesme iour fut anseveli Pierre Pontie fils de
feu landilie Pontie et une siene petite filie et sount estes
ansevelis dans le cemitiere de Pinel et sount morts de
fain il pouvoit avoir crante ans.
FlLHOLLY, vicaire.
(i) Pauliac (château de). JuriJ. Je Casseneuil, paroisse de Ste-Li-
vrade. ChAteau des sieurs de Cours de Pauliac.
Isa
Et le mesme iour ay ansevelie dans le cemitiere
d'Autherive Marguete Pers vefbe de feu Blasi Romex
forniere de la dame du presant lieu (i) et morte de fain
an foi de ce ay signé .
FiLHOLLY, vicaire.
Le vingtiesme Febvier 1631. le anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel lehan Pontie fis de Pierre Pontie qui
mourut ausi le dis huictiesme du presant mois âge de
vingt ans et mourut de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Plus le vingtiesme Febrier 163 1 le anseveli Bernad
Leornat Borne dans le cemitiere de Pinel âge de crante
ans il mourut de fain.
FiLHOLLY.
Plus le vingt et uniesme Febrier ay anseveli dans le
cemitiere de Pinel lehan Filiol fis de feu Pierre Filiol
et mère Estrugue Horadou âge de douse ans et mort
de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le vingt et quatre Febrier 1631 ie anseveli Helis
Auseral vefbe de ifeu Thoniet Felie (2) âge de soixante
et quinse ans et a este mise dans le cemitiere de Pinel
et morte dans le vilage de Garigou l'ofise a este faict
par moy.
FiLHOLLY.
Le vingt et sincquiesme Febrier 163 1 ie anseveli dans
le cemitiere de Pinel lannie Coste dict Auseral du vi-
lage de Dantou âge de soixante et quinse ans et mort
de fain lofice a este foict par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
(1) Anthoinette de Rance, dame d'Hauterive, femme de Philippe de
Raffin, baron d'Hauterive, mort en 1614 à Agen.
(2) Feille.
i3^
Le vingt et six Febrier 163 1 ie anseveli deux petis
anfans de Pierre Pontic du village de Belmoun qui
sount morts de fain et sount este mis dans le cemitiere
de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le vingt et septiesme Febrier ie anseveli dans le ce-
mitiere de Pinel lehan Chanet dict lou Marsalairc qui
et mort de fain âge de sincquante ans.
Plus le mesme iour ie ansevelie dans le cemitiere de
Pinel Margueritte Berdier vefbe de feu lehan Daurat
dict lehan de Mette âge de sincquante ans morte de
fain.
FiLHOLLY.
Plus ie anseveli au mesme iour lehan Delbrel fis de
Mase Delbrel et de leanne Fraichange âge dun an et
demi a este anseveli dans le cemitiere et Pinel et par
moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le dernier Febrier 1631 ie ansevelie Caterine Pou-
mie famé de Ramound Mathieu dict de Founpeirade
dans le cemitiere de Pinel agee de crante et sine ans et
a este mise dans le cemitiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le premier de Mars 163 1 ie anseveli dans le cemi-
tiere dAutherive Guiral Parrot fis de Guiral Parrot et
la mère Thonie Fraichenge âge de quinse ans et mou-
rut de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le secound Mars ie anseveli lehan Perie metadier de
Monsieur Landrivie dans le cemitiere de Pinel âge de
soixante et dix ans.
FiLHOLLY, vicaire.
Î34
Le mesme iour ie anseveli dans le mesme cemitiere
lehan Lapeire fis de Andrieu Lapeire âge de vingt ans
et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Dus cens vingt.
Le quatriesme Mars iour de mardi gra^; 1631 ie anse-
velie leanne Villenefbe feme de lehan Ravanel dict
Fournie dans le cemitiere de Pinel agee de crante ans
par moy.
FiLHOLLY.
Plus le mesme iour ie ansevelie une petite filie de
Guilien Guitoun esclopie(i)dans le cemitiere dAuthe-
rive et sa mère leanne Fromen et morte de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le sincquiesme lourde Mars premier iour de Caresme
ie anseveli dans le cemitiere de Pinel Thonie Ficliart
filie de Thonie Fichart et de Guilianete Laporte âge de
vingt ans morte de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le sisiesme iour de Mars i63iie anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel lehan Fraichange fis de feu du thalieur
de Sedfouns (2) âge de vingt ans et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le septiesme Mars 163 1 ie anseveli Robert Velbisi
âge de vingt et deux ans dans le cemitiere de Pinel fis
de laque Velbisi et de Françoise Boe par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Et le mesme iour et mesme hure ie ansevelie Mar-
gueritte Coste agee de sine ans filie de lehan Costa et
mère lanne Cabasut.
FiLHOLLY.
(i) Sabotier.
(2) Lieu de Septfone, juridiction et paroisse de Ste-Livrade.
135
Le nufiesme Mars 1631 ie anseveli dans le cemitiere
de Pinel lehan Marchiliac dict lean de la lanne aj^e de
soixante et dix ans.
FiLHOLLY, vicaire.
Le dixiesme Mars 1C31 ie anseveli dans le cemitiere
de Pinel lehan Garri fis de François Gari et de Vidale
Blanchou âge de sine ans et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le dougiesme Mars 163 1 ie ansevelie Philipe Croze ?
famé de Leornat Horadou dit Vidau âge crante ans et a
este mise dans le cemitiere de Pinel et morte de fain.
Et le mesme iour et mesme hure que desus ie anse-
veli au mesme cemitiere (en blanc).
Le tregiesme Mars 1631 ie ansevelie dans le cemi-
tiere d'Autherive Guiraude Felie agee de six ans filie
de lantei Felie et mère Magdelene del Souc.
FiLHOLLY, vicaire.
Le quatorsiesme Mars 163 1 ie anseveli Pierre Four-
caude dit Dandoie âge de sincquante ans et a este mis
dans le cemitiere dewPinel et mort de fain.
Plus a mesme iour et mesme hure ie anseveli lehan
Lascases âge de vingt ans fis de Pierre Lascases et mère
lanne Hauradou et mort de fain a este mis dans le
cemitiere de Pinel par raoy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le quingiesnie Mars 1631 ie ansevelie leanne Cariere
dans le cemitiere d'Autherive famé de Pierre Sartigues
ticeran agee de soixante et quatorse ans et morte de
fain,
FiLHOLLY, vicaire.
Le cesgiesme Mars 163 1 ie anseveli dans le cemitiere
136
de Pinel lehan Marsiliac âge de deux ans tis de Gui-
lieu Marsiliac et Cebelie Alboret.
Filholly, vicaire.
Le dis et septiesme de Mars 1631 ie ansevcli dans le
cemitiere de Pinel Anne Houradou filie de feu Guiral
Ouradou et mère Anne Glaunes agee de douse ans et
morte de fain.
Plus au mesnie iour et raesme hure et au mesme ce-
mitiere ie anseveli Guilien Lascases fis de Pierre Las-
cases et mère lanne Houradou âge de trois ans et
mort de fain.
Filholly, vicaire.
Le dis huictiesme Mars 1631 ie ansevelie Bernede
Mauriel famé de lehan Sales dit Couret agee de soi-
xante et dis ans et a este mise dans le cemitiere de
Pinel et morte de fain.
Filholly .
Le dixcenufiesme Mars iour de Sainct Joseph ie anse-
veli dans le cemitiere d'Autherive Bartholemi Guitoun
et de lanne Fromen (sic) âge de sept ans et morte de
fain.
Filholly, vicaire.
Le mesme iour que desus ie anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel Pierre Bedrines âge de crante ans et mort
de fain.
Filholly, vicaire.
Ledict Pierre ce tenet au vilage de Perroti.
Deux cens crante.
Le vingtiesme Mars 1631 ie anseveli Mathias Deldon
fils de Filipou Deldon du vilage de Blanchou âge de
douse ans et fut dans le cemitiere de Pinel et mort de
fain.
Filholly, vicaire.
137
Le vingt et uniesnie Mars 1631 i& anseveli une petite
tilie de douse ans filie del Barbe blanc de Perouti dans
le cemitiere de Pinel et morte de fain.
Filholly, vicaire.
Plus le vingt et deux Mars 163 1 ie anseveli Thoni
Ouradou âge de dix ans fis de Filip Ouradou et mère
Marie Ferand et a este mis dans le cemitiere de Pinel
et mort de fain.
Filholly, vicaire.
Le vingt et trois de .Mars 1631 ie ansevelie lanne
Delfour dans le cemitiere de Pinel lilie de feu Guilien
Delfour et de Janne Mâchefer agee de vingt et sine ans
par moy.
Filholly, vicaire.
Et le mesme iour ie ansevelie Catarine Rcgé agee de
crante ans famé de lantou Lapeire par moy dans le ce-
mitiere de Pinel.
Filholly, vicaire.
Plus Thoni Fichart dit Tuste Case (i) et mort de
faim au pais de Biar estant du vilage de Baliarget.
Le vingt et sincquiesme Mars jour de la Nonciatioun
de la Vierge 163 1 ie ansevelie Louise Toiset agee de
sincquante ans famé de Thonie Coste dict lou Cap Gros
du vilage de Pasture l'otice est faict dans la glice (2)
de Pinel et ansevelie dans le cemitiere de Pinel.
Filholly, vicaire.
Le vingt et septiesme Mars ie anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel Bertrand Coste âge de huict ans fis de
lehan Coste et de lanne Cabesut,
Filholly, vicaire.
(I) Fichart dit Frappe Chêne, mort au Béarn.
(a) L'Eglise.
138
Le dernier ,de Mars 163 1 ie anseveli lan Siferas âge
de sincquante ans dans le cemitiere d'Autherive et cet
truve mort dans la grange de la dame du presant lieu
et mort de fain.
FiLHOLLY.
Plus ie anseveli Marguanthoine Guari âge de deux
ans dans le cemitiere de Pinel et mort de misère.
FiLHOLLY .
Plus le secound iour d'Avril 1631 ie anseveli Thonie
Coste dit Auseral âge de vingt ans dans le cemitiere de
Pinel et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le septiesme Avril 1631 ie anseveli dans le cemitiere
de Pinel Vetrix Landrivie agee de sine ans morte de
fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Plus le mesme iour et hure ie ansevelie lanne Guari
agee de trois ans dans le cemitiere de Pinel morte de
fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Et le mesme iour ie anseveli Anthoine Delfour dans
le cemitiere de Pinel âge de quinse ans mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le huictiesme Avril 1631 ie ansevelie Peire F'ioret
vefbe de feu lanot Ferminiac dict le Boriguet âge de
soixante et dix ans et a este mise dans le cemitiere de
Pinel et morte de fain du vilage de Blanchou. .
Plus le mesme iour et au mesme cemitiere ie enseve-
lie lane Girol agee de vingt ans du vilage de Viget et
morte de fain .
FiLHOLLY .
13^
Plus au mesme iour et dans le cemitiere d'Autherive
ie anseveli Guillien Villcneufbe a^c de sine ans et
mort de fain.
FiLHOLLY.
Le nufiesme Avril 1631 ie ansevelie lane Parrette
vefbe de feu lannc Costc dict Auseral qui mourut le
sincquiesme Febrier a este mise dans le cemitiere de
Pinel et morte de fain (i).
FiLHOLLY, vicaire.
Plus le mesme iour et mesme hure et au mesme cemi-
tiere ie ansevelie lane Daurat famé de Cablan de Bel-
mount et morte de fain.
FiLHOLLY .
Le digiesme Avril 163 1 ie anseveli dans le cemitiere
de Pinel lehan Fichart âge de vingt et sine ans et ausi
ie ansevelie Catarine Fichart sa seur agee de vingt et
trois ans et sount este mise dans une mesme foce.
FiLHOLLY, vicaire.
Deux cens soixante.
Le dix septiesme Avril 163 1 ie anseveli Pierre Blan-
chou âge de trante ans et hoste de Pinel (2) et fut mis
dans le cemitiere de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Et le mesme iour ie ansevelie dans le cemitiere d'Au-
therive Toniete Delpoun vefbe de feu Louis Fraichan-
ges dit Pouchice et morte de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le vingt et uniesme Avril 163 1 ie ensevelie Elisabet
(1) S'il n'y a pas d'erreur de dates, Jeanne Pariette serait restée
deux mois sans sépulture.
(2) Hôtelier de Pinel.
140
laDaliguade agee.de soixante et dis ans a este mise
dans le cemitiere de Pinel et morte de fain,
Filholly.
Plus a este ansevelie Pierre Falmoun fis de Falmoun
dit lou Trouvât âge de quatre ans et mort de fain et a
este mis dans le cemitiere d'Autherive par moy.
Filholly, vicaire.
Le vingt et trois Avril 163 1 ie anseveli dans le cemi-
tiere d'Autherive François Belmoun dit lou Cap blanc
qui mourut tout près de la mesoun de Vedrines au mi-
lieu du chemin en allant a Sainte Livrade la ou Made-
moiselle d'Autherive (i) lanvoia cherser et lui valia un
linsun (2) pour le plier et mourut de fain.
Filholly .
Le vingt et huictiesme Avril 163 1 ie anseveli dans le
cemitiere de Pinel Tlioni la Rousilie âge de dix ans et
mort de fain.
Filholly, vicaire.
Le premier iour de May 1631 ie anseveli dans le ce-
mitiere de Pinel lehan Rabanel dit Poumier âge desinc-
quante ans a este anseveli par moy.
Filholly, vicaire.
Et le mesme iour que desus ie anseveli lehan La-
peire âge de vingt ans et a este mis dans le cemitiere
d'Autherive et mort de fain.
Filholly, vicaire.
Le segound de May 1631 ie ansevelie dans le cemi-
tiere de Pinel lanne Villeneufbe dict lehan de la Guil-
liame agee de dix ans et morte de fain.
Filholly, vicaire.
(1) Anthoinette de Ranse, veuve de Philippe de Raffin. (ut suprà).
Elle signe au registre Thoinettc de Ranse.
(2) Un drap ou linceul.
14*
Le neufviesme May ie anseveli Pierre Laconque fis de
feu lehan Laconque et de Lisoune Felie âge de dix ans
et a este mis dans le cemitierc d'Autherive et mort de
fain.
Fu.HOLLy, vicaire.
Longiesme May 1631 ie anseveli dans le cemitierc de
Pinel lehan Crosil dict lou Magre du village de Biget
âge de trante ans et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le tregiesme May 1631 ie anseveli dans le cemitierc
d'Autherive lehan Reine âge de dix ans tîs de lehan
Reine dit Reniere et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le quingiesme May 1631 ie ansevelie lanne Parot
famé de lacques Bloy âge de vingt ans et a este anse-
velie dans le cemitiere d'Autherive et morte de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le mesme iour que desus escript ie anseveli dans le
cemitiere de Pinel Pierre Delfour âge de XV ans et
mort de fain.
FiLHOLLY.
Le cegiesme May 1631 ie ansevelie lane Fichart dans
le cemitiere de Pinel agee de huict ans et morte de
fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le 19* May 1631 ie anseveli dans le cemitiere de
Pinel un valet demurand chez Pierre de la Mondine qui
se desoit estre de la terre de Cancon qui ce nommet
Guillien âge de crante ans.
FiLHOLLY.
Le vingt et uniesme May 163 1 ie anseveli dans le ce-
mitiere de Pinel Thoni Gourde dict Tounigue âge de
crante ans et mort de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
142
Plus le mesme iour que desus escript et au mesme
cemitiere ie anseveli Guiraud Garigou âge de un an
ris de Thoni Garigou et de feu Anne Vedrines.
Filholly, vicaire.
Deux cens quatre vins.
Le vingt et deux May 1631 ie anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel Guilianete Laporte famé de feu Thoni
Fichart agee de sincquante ans ledict Thoni Fichart
mari de la presante defounte et mort au Biar ausi un
fis qui estoit avec lui ce noumoit Pierre âge le père
sincquante et sine ans et le fis vingt ans moururent
tous de fain.
Filholly, vicaire.
Le vingt et trois May 1631 ie anseveli Pierre Ouradou
dans le cemitiere de Pinel âge de trante ans fis de
Thoni Ouradou metadier de Messieurs de |Bourran del
Poux (i) l'ofice a este faict par moy.
Filholly, vicaire.
Le vingt et sincguiesme May 1631 ie anseveli dans le
cemitiere de Pinel Guilien Rabanel âge de deux ans
naiant ni père ni mère et mort de misère.
Filholly, vicaire.
Le vingt septiesme May 1631 ie anseveli Margarite
Garigou rilie de Guilien Garigou agee de dix ans et a
este mise dans le cemitiere de Pinel et morte de fain.
Filholly, vicaire.
(l) La famille parlementaire des Bourran possédait de grandes pro-
priétés à Roger, près Villeneuve d'Agenais, au Poux (aujourd'hui
Barguillati dans la commune de St-Etienne-de-Fougères, à Arfcillc et
à Bourran dans la même commune, à Borne, près du même bourg,
propriété que M« Jean Baptiste de Bourran, président à la Cour des
Aides de Guyenne donna au Couvent des Ursulincs de Ste-Livrade.
Le président, avait dans ce couvent trois filles religieuses et deux
postulantes. (Voir J. de Bourrousse de Laffore. Nobil.de Guyenne
et de Gascogne. T. III, p. 383-384).
M3
Le vingt et nufiesme May ie anseveli dans le cemi-
tiere de Pinel lean Fraichcnges dit lou Bras court du
vilage de Lemosi âge de soixante dix ans.
FiLHOLLY,
Le mesme iour que desus ay ansevelie dans le cemi-
tiere de Pinel lanne Mathieu dit Fonpeirade agee de
vingt sine ans et morte de fain .
FiLHOLLY, vicaire.
Le trantiesme May 163 1 ie ansevelie dons le cemi-
tiere de Pinel Anne Messine famé de lehan Ficliart du
vilage de Baliarget agee de trante et sine ans et morte
de fain .
FiLHOLLY, vicaire.
Le dernier de May 1631 ie ansevelie dans le cemi-
tiere d'Autherive Catarine Felie famé de lehan de
Mouli agee de crante ans et morte de fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Plus au mesme jour ie ansevelie (un blanc) Lascases
dans le cemitiere de Pinel agee de dix ans et morte de
fain.
FiLHOLLY, vicaire.
Le premier iour de lun 1631 ie anseveli dans le ce-
mitiere de Pinel lan Lasclotes âge dun an lis de Bernât
Lasclotes dit la Palise et de Françoise Gasau.
FiLHOLLY, vicaire.
Le segound iour de lun ie anseveli dans le cemitiere
de Pinel lan Brel du vilage de Perouti âge de trante
ans et mort de fain .
FiLHOLLY, vicaire.
Le nufiesme lun ic anseveli dans le cemitiere d'Au-
iherive Barthelomi Laurans dit la Goyne âge de trante
ans par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
44
Le dougiesme lun 163 1 ie ansevelie dans le cemi-
tiere de Pinel Françoise Viget vefbe de feu Thoni Roche
agee de soixante dix ans et morte de fain.
Le tregiesme lun 1631 mourut la famé del Felie de
Monclar (i) et fut aportee a Monclar et morut au vilage
de Grengot agee de trante et sine ans.
FiLHOLLY.
Le quingiesme lun 1631 ie anseveli Ramound Costes
dit du Matras metadier de Roquepiquet (2) âge de sinc-
quante et sine ans et a este anseveli dans le cemitiere
de Pinel par moy.
FiLHOLLY, vicaire.
Le quatriesme lulliet 1631 ie ansevelie dans le cemi-
tiere de Pinel Bertrande Poupnorat et ausi une sienne
filie et soun mari mourut dans le pais de Biar tous
soun morts de fain estant du vilage de Perouti ladite
Bertrande estoit agee de trante ans et soun mari dautan
et sa petite filie de huict ans.
FiLHOLLY, vicaire.
Le dougiesme lulliet ie anseveli Guiraud Chalie âge
de trois ans fis de lehan Chalie dit les Carpiole et mère
lanne Sirvens et a este mis dans le cemitiere d'Authe-
rive par moy.
FiLiiOLLY, vicaire.
Le tregiesme lulliet 1631 ie ansevelie Margaeritte
Perri dans le cemitiere d'Autherive farue de Leonart
Guéri agee de soixante ans.
FiLHOLLY, vicaire.
(i) Monclar d'Âgenais.
(3) Canton de Monclar d'Agenais.
145
Le is'' liiUicl i()3i ic anseveli dans le ccniitierc
d'Aullicrive Iclian liuiiaut dict ( îoulinidu a<^c de quinze
ans.
l"ii.ii()i.i.Y, vicaire.
Le second de Septembre 1O31 ie anseveli dans lé^^lice
de l'inel un peti lis de Monsieur Villeneufhe marchant
aj^e de six nu)is qui mourut de la petite vérole.
Le quatriesme Septembre 1631 ie anseveli Tli(mi
Mouratier dans le cemitiere de l'inel aj^e de quatre
vingt et dix ans par mo}'.
l'^ILHoi.LY, vicaire.
Trois cens.
Le vin<,rt et quatre Septembre ie anseveli ouilien
Gariy;ou âge de crante ans et a este mis dans le cemi-
tiere de l'inel par nioy.
FiLHOLi.Y, vicaire.
Le quingiesme Octobre 163 1 ie anseveli Mar<>-;irite
Molin vetT^e de feu Roquet l'arrot du village de Bardet
paroisse de Sainct Estiennc de Faugeres agee de qua-
tre vingts ans.
FiLHOLLY, vicaire.
Plus est mort au Biar en demandant Taumosne Ar-
naud Poujade. . .
Plus y et mort la Maroune. . .
Plus y et mort la Gravielle de Kaschet.
Plus y et mort Larnausiade et soun lis.
146
Ici se termine le Mortuaire de la famine.
La famine cessa à la récolte, en Juillet 1631.
Les morts qui suivent ne paraissent pas être morts de faim : le
vicaire ne le mentionne pas.
Après cette date du 15 Octobre commence le Mémoire concernant
la mortalité de la peste qui succéda immédiatement ;'i la famine. Nous
le publierons ultérieurement.
Au 30 Novembre 1631, le vicaire ajoute ces simples mots : Il i a
trois cens sincquante mûrs iusques an presant fuliet.
Que restait-il dans cette juridiction si complètement fauchée ? Kien,
si ce n'est la solitude et le désert ! (i).
(l) La population actuelle de la commune de Pinel et Hauterive
est de 380 habitants. J'estime que cette communauté, par l'étude que
j'ai faite de ses Registres Paroissiaux, possédait au moins 700 habi-
tants au XVII^ S. Comme la moyenne des enfants était de six à sept
par famille, on peut juger des vides qui existent en Agenais depuis
cette époque, vides qu'en ce temps la natalité comblait, en dépit de
la famine, de la peste et de la guerre qui ravageaient régulièrement le
Pavs.
ASSEMBLÉE DU PAYS
(TIERS ETAT D'AGENAIS)
(29 Dec. 1631) (i).
Dans la Maison Commune de la Ville et Cité d'Af^en,
ce jourd'hui vingt neufviesme du mois de Décembre
mil six cent trente un, y estans assembles Messieurs
M'= Géraud Grimard, Guilhaume Katicr, Jean de La-
borde, advocatz en la Cour, noble Bertrand de Bechon,
escuyer, sieur de Caussade, Jean Roussel, docteur en
médecine et Raymond Boyer, procur. en la Cô Prëâllc,
Consuls de lad. ville, quy y auroient convoqué et as-
semblé les Consulz et depputtez du Bays d'Agenois
suivant la permission qui leur en a este donnée par
Monseigneur le Duc d'Espernon pair et colonel giïâl de
France, gouverneur et lieutenant général pô le Roy en
Guienne ou se seroient trouves maistre Jean de Brezets,
ad' en la Cour et depputte de la ville de Marmande (2)
M« Simon Sarrasin aussy ad' en la Cour (3), Consul, et
Anthoine Lacoste doct. en médecine, depputte de
Penne, Jean Démons, Consul de Puymirol, M« Jean
Ytier, ad' C^"' et Pierre Fort, jurât et depputte de
Monflanquin, qui ont dit acister a l'Assamblée sans soy
(1) Arch. d'Ajfen. CC. 185.
(2) Un de Brezets était en 1605-1607 Juge de Marmande. (O'Gilvy
T. I, p. 408).
(3) Est-ce ce Simon Sarrasin qui, lieutenant civil à At,'en, avait eu
un conflit avec les Consuls d'Agen pour l'exercice de la Justice cri-
minelle ? (FF. 22, 23).
148
prejudicier à la préséance qu'ils prétendent avoir avant
les Consuls dudit Puimerolz et aux protestations par
eux faites aux précédentes assemblées (i), M" Geraud
m Ces questions de préséance étaient àprement discutées entre les
Consuls des Communautés et surtout entre les douze villes d'Agenais.
C'était pour les Consuls une question aussi brûlante dans un pays si
fortement hiérarchisé que celle du tabouret entre les Duchesses à la
Cour du jjrand Roi. Aux Etats du Pays d'Af,'cnais du 6 Février 1635,
on li> dans le préambule qui contient les noms des députés des Etats
d'Agenais : « .... Noble Jacques d'Escouralhc, escuyer, sr de St-
». Cruelle, et M" Guilhaume Monlau, no''« royal, Consuls de Ville-
« neufve d'Agenois, M« Pierre Dalbiguet, advocat en la Cour, et Jean
« Gallaup depputt^ de la ville de Marmande, quy ont dict acister a
t l'assamblee et prendre plasse appres les Consulz de Villeneufve
« sans préjudice de la préséance quils prethendent aux Assemblées
€ avant eux et pour ne retarder les afFeres qui doivent estre propo-
t sees en icelle, M^ Jacques de Labat, juge de Moncuq, consul de
€ Ste-Foy ; Jacques de Neymet, s'' de Tantare et M« Anthoine Lacoste,
« doct. en médecine, consulz de Penne; Noble Nicolas de Pontazon,
« s'^ de La Chapelle-Trenteil, consul de Monflanquin, qui a prins
« plasse appres lesd. consulz de Penne ; a quoy M»; Rollant Fonfrede.
« doct. en médecine, et Pierre Foures, consulz de Puimerolz se sont
€ opposez, disant estre en pocession de précéder les consuls du dit
« Monflanquin quy nont rang aux assemblées du pays qii'appres les
€ consulz de Tournon, lesquelz les consulz dud. Puymirol précèdent
« en vertu d'une ordonnance par Mons"" de Boissonnade président et
« juge maige d'Agen etitre les consulz dud. Puytnerol et Tournon
« en l'assemblée du Pays du VI" avril 1628 par laquelle sur sembla-
« blés contestaôns arrivées entre iceux Csulz de Puimerol et Tournon;
« appres que lesd. consulz de Tournon eurent faict entendre leurs
c raisons fust ordonné que sans préjudice du droit des parties, pour
€ raison de quoy ils se pourvoieroient ainsin quilz verroient estre
c affere, lesd. Consuls de Puimerol précéderont ceux de Tournon.
« C'est pourquoy les s'^ Fonfrede et Foures disent quils doibvent
T précéder lesd. Consulz de Monflanquin et quil doibt estre ordonnée
•« que led. sf de La Chapelle, Consul de Monflanquin, leur cédera la
€ plasse, protestant en deffaut de ce de n'acister en lad. assemblée et
€ de ne contribuer en rien a ce quy sera propose et délibère en icelle;
« a quoy led. s^ de La Chapelle ayant incisté et représenté quil a prins
» la plasse qui appartient ausd. Consulz de Monflanquin privative-
149
Vinhier, bourgeois et depputte de Castilhonez, Gratien
Gautier, Consul ,de Monclar, noble Louis de Lafon,
escuycr, sieur de Cujola, Gonsul de Cleyrac, Jean
Bayle, Consul de Lesignan, Jean Boudet, (Consul de
Nicolle, Jean Kousier, depputlc de Gontaut, M" Jean
Senegon, juge de l'uymiclan depputte dud.lieuetde
Londres, M*^ Martial b'iorct, depputte de Seysses, Ks-
cassefort, La Chapelle et Saint l'arduu, Jean Chabrol,
Consul de Miramont, Yves Fauct, depputte de Lauzun,
Pierre Laville, depputte de Verteul, Bertrand Imbert,
Consul et Benoist Tasquct, depputte de La C^enne, M"
Jean Farinel, ad' en la Cour, depputte de Puiols, fean
Lafeulhade coUect. et depputte de iNJonsegur, Jean
Jacomy, Consul de Las Treilhes, M<= Jean Albenque,
t ment avant les Consulz Je Tournon et Puiiiurul, Jont ils sont en
t pocession de tout temps et anciennette et que les Consulz dud. l'uy-
t mirol ont tort de contester ci^ste préséance contre eux et a laquelle
€ ils doivent estre maintenus par Monsieur le Président et Ju^e Maij^e
« bas nommé, prést M. le Procureur du Roj', a este ordonne que sur la
€ prcceance prétendue par lesd. Consulz de Monflanquin et Puyme-
€ roi ils ce pourvoiront ainsin quils verront estre affere et que pour ne
t retarder l'assemblée et expédier les atferes quy y doibvent estre pro-
« pozees, lesd. Consulz de Puymerol prandront un banc qua ces fins
« leur a este mis a part, ce quils ont faict avec protestation de ne se
t prejudicier aucuriemcnt a la préséance qu'ils ont avant lesd. Con-
« sulz de Montianquin ; et appres lesd. Consulz de Monflanquin, ont
€ prins plasse M" Jean Philipot, net. roj'al, depputte de Castiltionnez;
« Guilhaume Menoyre de Fclhade et M'^ Jean Broussard, consulz de
c Ste-Livrade ; M"^^ Gérard Belot, adi en la Cour Consul et Daniel
« Bouyer, Jurât du Port Ste Marie quy ont de mesme proteste de ne
« soy prejudicier aux préséances quils ont ez assemblées du Pays;
€ Mathieu Quoy Coasul de St-Pastour et Jean Fieuzal, Consul de
« Golfech, auxquels sieurs depputez sus nommes par led. s' Ducros
« premier Consul de la prés, ville et en prés, de Messieurs M» An-
€ thoine de Boissonnade conseilher du Roy en ses Conseils d'Estat et
€ Privé, président et juge maige en la senechcée d'Agenois et Lau-
€ rens de Redon, aussy cons"-' etproc. du Roy en lad. sencée ont este
a laictes les propozitions qui s'ensuivent... >. (Arch. d'Agen CC. 192)-
procur. d'office et depputte de St-Front, Jacques Boudet
de La Salle, depputte de Monbielh, Aîonbalnis et Puy
Dautin, M* Simon Chabrieres, depputte de Preyssas,
M« Jean Fieuzal, Consul de Golfech, ? Vernhes, dep-
putte de Valance, Mathieu Reynaud, C^"' de Goudour-
ville et M^ Anthoine Roquier, procur. en la Côprëâlle,
depputte de la Sauvetat de Saveres, ausquels susdits
sieurs Consulz et depputtes lesdits sieurs Consulz
d'Agen par l'organe dud. s'" de Grimard, premier G''"'
en prîîce et assistance de Messieurs M^ Anthoine de
Boissonnade, cône"" ^u Roy en ses conseils d'Est at et
prive, président et juge maige en la seneschaucee d'A-
gennois, et Laurans de Redon, con^'" et proc. de Sa
Ma'^'" en lad. sen^'"^e, ont represante et faict les proposi-
tions que ensuivent sur lesquelles ils prient lad. assem-
blée vouloir mûrement opiner et desliberer au plus
grand bien et soulagement dud. pais quils advizeront.
Propositions faictes par Messieurs les Consulz
d'Agen en l'assamblee du pays d'Agenois tenue le
(29 Xbre) 1631.
RepTîtent premièrement lesd. sieurs Consulz quils
ont este assignes il y a huit ou dix mois au C^^'' a la
requeste de quelques villes voisines de Montauban les-
quelles demandent l'indempnite de pertes et domaiges
interests quelles ont soufferts pendant le degast de
Montauban (i) et pô l'entretenem' de l'armée du Roy
soubz la conduitte de Monseigneur d'Espernon gou-
verneur de la Province.
Nous avons envoyé a Monsieur Sicre n'^ ad' au C^"
l'exploict d'assignaôn avec mémoires, pièces justifica-
tives pu fere voir que nous avons entretenu et paye le
reg' de Monsieur de Foncaude, suivant l'ordre et dis-
tribuûn de Monsieur le Prince (2) et qu'ainsy ils ne peu-
(i) Dégâts de 1621 et de 1629.
(2) M. le Prince de Condé.
»5i
vent reiecter aucuns fraix sur nous aultre que nous avons
souffert et supporte plusieurs perles pendant le siège
de Nerac, Cleyrac et Monhur (i) sans que les Com'«
voisines de Montauban ayent rien contribue pour nous,
neantmoingz nous avons advis que le procès se doibt
juger et que nous avons besoing de nous deffendrc.
Monsieur Relhery, ad' du Koy aux Esleus.a eu le soing
de ceste affere a nostre recommandation.
Led. sieur Relhery et led. s'' de Sicre, n'*^ ad' au (>•'
nous ont aussy donne advis que Mons"^ de Sarrau,
cons"'^'" en la Cô preâlle, poursuit le procès au Conseil
pour fere restablir le seau présidial, lequel auroit este
supprime de son consantement moyennant deux cens
livres par an et que le pays lui promit, dont il n'a point
este paie et c'est la cause de la poursuitte, a quoy il est
besoing de remédier, car le restablissement du seau
coustera au Pays tous les ans plus de six mile livres (2).
Monsieur de Loubatery, C"*^"" en la Cour des Aydes,
nous poursuit aussy comme syndic du pays et demande
que les griefs qu'il dict avoir souffert, par la closture
de nos derniers comptes soient reparez et faict revenir
ses demandes a dix huict mille livres ou environ (3).
(1) An 1621.
(2) Sarrau (Jean) et Jacob son frère étaient possesseurs du gretTe
civil et criminel de la Sénéchaussée d'Agenais. Cette constitution de
rente annuelle avait été consentie au nom du Pays d'Agenais en 162 1.
(Arch. d'Agen CC. 159). A la date du 15 Janvier 1628, on lit dans le
Journal des Consttlsl « Led. jour Monsieur Jacob Sarrau, greffier,
€ nous a faict assij^ner en la Cour du Parlement do Bordeaux sur la
« reqie civile par luy obtencue contre l'arrest de règlement des droictz
« du greffe de la Cour preTlle et de la Sénéchaussée d'Agenois. •
(BB. 51, p. 7 V.) Ils étaient fils de Jean de Sarrau, H' Consul de Mon-
tlanquin en l6lo et sieur de Boynet, de Gibel et de Néris, mort en
1628. Jacob de Sarrau, 4- fils de Jean, était greffier en chef au Pré-
sidial.
(3) Ce procès était relatif aux dépenses faites'par Florimond de Lou-
batery, syndic du Pays d'Agenais et pour le compte dud. pays. Le
152
Ce procès est pendant a la Cour des Aydes parce que
M"" de Cieutat, ayant faict exécuter les Consulz de
Monclar pu quelque reste de la somme de Iniict cens
livres et intherests, qu'il (le sieur de Loubatery ) presta
au Pays en Tannée 1600, lesd. Consulz de Monclar nous
appellerent e;i garantie, comme syndicz du Pays, et
nous, ayans trouves que lesd. huit cens livres et inthe-
rests avoient este imposes, levés et reçus par led, s'"
de Loubatery en l'année XVI*^ vingt deux et qu'insi il
estoit tenu a la garantie, nous l'appelâmes en assis-
tance de cause et la dessus il donna req'*^ pour la refor-
mation et revision de ses comptes (i).
Et par ce que MM'* de la Cour des Aydes ont este
règles au Conc'i g^ le Seneschal de Bazatz constitué
leur juge (2) en plaine instance et par appel le Parh de
Grenoble, nous avons demande le renvoy devant led.
Sen»' de Bazatz dont nous avons este déboutez et la
dessus nous nous sommes pourveusau Con^'i pour estre
règles de juges.
Pour un quatrie'' tout le Pays est assez informe de la
nouvelle création de greffiers de tailles en chaque
jurisdiction avec attribuôn d'un soûl pour livre pour
Conseil d'Etat termina le dilTérend en mettant les parties hors de
cause sans dépens {1639). (Arcli. d'Agen CC. 199). Le s' de Louba-
tery, s' de Bellecombe, avait été syndic du Pays de 1618 à 1622, et
probablement avant. Aux Etats d'Ag'enais de 1622, il proposa au
Pays de verser 3000 livres entre les mains du trésorier du Domaine
pour la répression de hriffandaffc. (GC. 159).
(i) Les Consuls de Monclar, Piîrre Born et consorts.
Le procès se termina en 1639. La Cour des Aides de Bordeaux,
condamna les Consuls d'Ajçen à payer 900 livres et 8 écus à la dé.
charge de la Communauté de Monclar d'Afjenais, (Arch. d'Agen CC.
'99)-
Voir aussi, Arch. d'Agen FF. 174.
(2) L'hostilité du Parlement de Bordeaux contre la Cour des Aydes
était la cause de cette évocation.
153
chacun, car quoy que le triennal ne soit pas encore
rempli, neantmoinfjs l'Edict est veriffie a la Cour des
Aydes et ceste année prochaine ses droictz seront levés
et faut remarquer qu'en l'année 1619 lesd. oHiciers fu-
rent erijTcs soubz le nom deC'ons^^" de tailles, rembour-
ses par la (iuienne, moyennant cinq"" mil escus, el sup-
primes ; et néantlemoin<rs ils sont à pr'" remis sans
aucun desdomagement et avec des droictz excessifs (i).
De plus il appert par les comptes arrestes en Tannée
XVI*^ vinjjrt huict que le Pays doibt à nostre villj la
somme de vin<;t cinq mile livres dont despuis nous
avons paye l'intherest oultre les fraix dtspuis faicts qui
reviennent a notable somme, de sorte que la ville
debvant d'ailleurs pour ses particulières afferes plus de
trente cinq mil livres est tout à faicts accablée.
Mesmement a cause de la difficulté d'obtenir lettres
d'assiette pour impozer et lever les sommes deues, car
sur la fin de l'année XVIl- vin<^t neuf, M'" Dauree, ad^ et
lors Consul, fut depputte a la Cour exprès pour avoir
permission d'impozer ce que le Pays et la ville deb-
voient dans certaines années, mais il demeura quatre
mois sans rien obtenir à cause de la necessitte de l'Es-
tat. Ceste année, suivant le (Conseil du Pays et princi-
(l) On lit dans Ir Journal des Consuls: < Le quinzicsnic duJit mois
€ (de Janvier 162S). M. Duburj; nous a fourni coppie de l'Edict de
« création des Receveurs et Collecteurs de tailles, ensemble la reqtc
€ présentée par nos devencicrs sur leur opposition à la vcrilication
» dud. Edict, pour nous servir d'instruction....» (BB. 51 p. 71.
Au verso, il s'agit bien « des Collecteurs des paroisses •.
Le 2" d'Aoust, nous avons formé opposition par devant M" des
Aydes a ce qu'ils ne vérifiassent deu.x Edits, l'un pour i'olfice de l'eii-
voy des mandes, l'autre p"" la vérification donnée aux Receveurs des
tailles, taillon et trois j^retTiers de l'Fllection. La requeste en opposi-
tion a este presante à Mi^ de Villa mon et a respondeu qu'on se pour-
voyra devant le Roj-.
(Arch. d'Agren, BB. 51 (16301, p. 152 v.)
154
paux Juratz, nous avions promis recompense honneste
a ung homme (i) quy promit de nous fera obtenir lad.
permission, mais ayant manqué, nous avons employé
Monsieur de Relhery qui a tire parolle de l'obtenir et
en a fait de grandes instances. Il est tout a fait besoinsi
de pourvoir a ceste imposition et a ses tins fere veriftier
nos debtes devant Monsieur de Vertamont envoyé avec
ceste authoritte.
Nous vous disons pour la tin que pour nous deffandre
contre Monsieur Loubatery, nous avons este contraints
d'avoir recours a Monsieur Lavergne par ce qu'il y a
quatre ou cinq ans que led. s'' de Lavergne poursuivoit
led. S"" de Loubatery devant les Esleus au Parlt de
Bourd^ et au Con"^^'' pour fere représenter ses comptes,
ot^Vant fere voir plusieurs malversations, mais appres
une longue procédure fomentée par quelques particu-
liers qui supportoient led. s'' de Loubatery et tirent
dezadvouer led. Lavergne, lesd. s'' de Loubatery et
Lavergne saccordarent moyennant six cens livres que
led. S"" de Loubatery bailla et promit aud. s'' de Laver-
gne de ne rien demander de ses despances, domaiges,
intherestz.
Ledit S'' de Lavergne nous a fourni de lad. promesse
en original et des pièces pour justiftier que le procès
avoit este distribue affin de le retirer et nous lui avons
baille cent livres au cas que le pays approuvât nû con-
vention. C'est a l'assamblee a desliberer la dessus.
Il est aussy vray que led. s'' de Relher}' estant aile
pour quelques particulières afferes à Paris, nous l'avons
par occasion employé pour les afferes du Pays dont il a
eu beaucoup de soing et a faict quelques fraix, il nous
aescript plus de vingt fois. Cest pourquoy il est juste
quil soit rembourse de ses fraix, suivant ce quil mon-
trera avoir faict, et recogneu de ses peynes.
(I) Le sieur Jean de Laborde ?
155
Ce fait led. s' de Boissonnade, président et juge
maige, a représente a l'assemblée que le jour d'hier il
luy fust rendu une lettre de mond. Seigneur le Duc
d'Espernon par laquelle il luy mande quil trouveroit
bon que le Seigneur de Puiols fust depputte par l'as-
samblee pour la poursuitte des afferes du pays, de la-
quelle lettre led. s"" président a présentement faict lec-
ture a lad. assemblée aux fins de sa descharge envers
mondict Seigneur.
Deliberaïïns et resoluôns prinses en l'Assamblée sur
tous les atïeres a eux cy dessus proposes.
Sur lesquelles propositions a este deslibere par lesd.
sieurs Consuls et depputtes quil faut deffandre contre
les Communauttez voisines de Montauban et cmpes-
cher le reject quils veulent fere sur nous par les raisons
qui ont este dites par led. s"" Grimard que l'assemblée
juge pertinentes pour obtenir notre relaxance.
Comme aussy il faut empescher par tous moyens quil
sera possible l'establissement du seau presidial et con-
tenter sil se peut led. sieur de Sarrau tant pour les
arrérages passes que pour l'establissement de deux
cens livres qui luy ont este promises par an et a ses fins
ceux quy seroient depputtez pour l'audiUn des comptes
desd. s'"'' Consulz d'Agen conféreront avec led. s"" de
Sarrau et si l'accommodementne réussit on sedeffendra
au Con'^''.
Pour le procès contre le sieur de Loubatery l'assem-
blée a approuve le procède desd. sieurs Consuls
d'Agen et l'obligation contractée avec le s'' de Lavergne
sur ce subject a la charge que led. s"" de Lavergne nous
fournisse de pièces du procès par luy intenté contre
led. s' de Loubatery ou nous donne le moyen de les
recouvrer. Néantmoings si led. s"" de Loubatery se
veut accommoder a lamiable, le.s mesmes audit"^ de
comptes pourront conférer avec luy.
156
Pour les grefliers des tailles l'assemblée a juge très
important den poursuivre la suppression sy ce peut ou
du moins le règlement et retranchement des droictz
excessifs quilz lèvent sur le pays (i).
Qu'il est assez nécessaire de demander à Sa Majesté
le règlement contre les Esleus, de fere valoir les arrests
cy devant obteneus contre eux en la Cour de Parle-
ment de Bourdeaux, attandeu que le contract faict avec
lesdits Esleus n'est pas esmologué et qu'il intervint à
un temps qu'on n'ozoit ce plaindre contre eux, joint
qu'il est grandement presjudiciable au Pays (2).
Et a ladicte assamblee approuvé ce que lesd. s"
Consuls d'Agen ont faict et negotié pô led. pays, mes-
mes les emprunts et obligations par eux faictes selon
ce que sera jugé et accorde par lesd. auditeurs de
(1) Un arrêl du Parlt de Bordeaux, avait défendu aux Elus d'im-
poser sur ie pays les gages attribués aux Greffiers des tailles. (CC.
176.)
(2) 1623. Contestations entre les Consuls d'Agen et les Elus, au su-
jet d<; la véritication des rôles des tailles. (Arch d'Agen CC. 161). 1624
Procès intenté par les Consuls d'Agen au nom du Pays, sur la répar-
tition des tailles opérée par les Elus et sur les droits excessifs qu'ils
perçoivent, tels que 16 deniers par livre (CC. 166). Les Consuls les
accusaient de prélever des sommes plus fortes que celles portées sur
les rôles et de faire saisir les animaux de labour des insolvables, (CC.
172). Les Consuls avaient déjà protesté contre leurs exactions en 1609,
1610 (CC. 133).
Un arrêt du Parlt de Bordeaux avait défendu aux Elus de prélever
leurs droits de vérification des tailles sur les paroisses, mais seu-
lement sur les juridictions (CC. 167). Un arrêt du Conseil d'Etat le
leur accorda (CC. 171). 1627 Contrat de transaction entre les Consuls
ft les Elus: On suivra les usages anciens, on répartira les tailles par ju-
ridiction, on no rejettera pas les tailles d'une juridiction sur l'autre
(CC. 177 et 180). Les auditions et la clôture des comptes consulaires
que les Elus prétendaient vérifier (BB. 49) se feraient comme par le
passé (CC. iSo). Mais on voit parla résolution ci-dessus qu'en 1631,
on n'avait pu obtenir encore un règlement d'attributions concernant
les Elus.
157
comptes que lad. assamblee a presen' nommé, scavoir:
led. sieur de Brezets, depputte de Marmande, Sarrazin,
consul de Penne, d'Vtier, consul de Montlanquin, Dé-
mons, consul de Puymerol, de Lafon, depputte de Clay-
rac, et de Farinel, depputte de Pujols, auxquels lad. as-
semblée a donne pouvoir d'ouir et clorre lesd. comptes
que de conférer avec lesd. S" de Loubaiery et de Sar-
rau ; et lesd. comptes estant clos lad. assemblée cousant
que lesd S"^ Consulz d'Agen taschent d'obtenir lettres
d'assiette, suivant Tordre porté par l'ordonnance de mon
dit sieur d'Hspernon sur la req'*^^ a luy portée pour la
convocation de la près, assemblée et ce tant pour les
debtes cy devant reco«j;nues par le pays suivant le der-
nier compte que p5 les sommes que se trouveront estre
dues auxd. S" Consuls d'Agen en principal et intherests
despuis le dernier compte.
Et pour l'expédition des susd. afferes a este juge par
lassemblee d'envoyer deux depputtez en Cour et apprez
que chascun a eu nomme a son rang, la plural itte de
voix est thunbee sur led. s"" de Caussade, consul d'Agen,
et de Brezets, depputte de Marmande, auxquels lad.
assemblée a donne charge de fere voyage à la Cour et
poursuivre les susd. afferes, le tout néanmoings soubz
le bon plaisir de mondit Seigneur d'Espernon, desclai-
rant lesd. S'* de Caussade et de Brezets n'accepter lad.
depputaûn qu'a condiôn que mondit Seigneur l'agrée ;
et a ses fins lad. wssemblee trouve bon que lesd. depput-
tez ou l'un d'eux luy fassent entendre lad. depputtaôn
et le supplient très humblement de l'avoir agréable,
autrement lad. assemblée n'entend que lad, depputtaôn
tienne et audit casque lesd. depputtez fassent le voyage,
lad. assemblée leur donne pouvoir d'emprunter les
sommes nécessaires à la charge d'en rendre compte.
A este aussy deslibere que le S"" de Relhery sera re-
lis
cognu de ses peynes et la grattiiicaon arbitrée par lesd.
audif"* de comptes et ses fraix rembourses.
Et a lad. assemblée continué M'^ Marc Leydet, secré-
taire desd. sieurs Consuls, en la charge de greffier dud.
pays aux gaiges de cent livres par an, M* Guilhaume
Descayrat, procur. en la Cour de Parlement de Bourd''
aux gaiges de soixante livres et Raymond Fumaderes,
imprimeur, aux gaiges de cinquante livres, a la charge
d'imprimer les lettres quy seront cy appres envo3'ees
aux communauttez sans sallaire, en luy fournissant le
papier, lesquelz susd. gaiges lad. assemblée veut et con-
sant estre imposes et levés sur led. pays et payes par
lesd. sieurs Consulz d'Agen ou par le recev quy en
fera la levée. Et ainsin que dessus a este resollu et ar-
reste par lad. assemblée dont et du tout a este octroyé
acte par led, s"" Président et juge maige, led jour et an
que dessus. Ainsin signes : de Boissonnade, juge maige,
Grimard, C*"' d'Agen ; Katier, Consul ; Roussel, Con-
sul d'Agen ; Boyer, Consul et autres , Consulz et dep-
puttez dud. pays et commissaires nommes au prest
acte.
Collationne sur l'original par nous greffier du pais
d'Agennois soubs"«.
Leydet (i).
(l) Voici ce qu'on lit dans \t Journal des Consuls au sujet de l'As-
semblée du Tiers Etat d'Agenais tenue le 6 Avril 1628 et jours sui-
vants : « Led. jour (8 Avril) les comptes du Pays ont este ouys, clos
« et arrestes et c'est trouve que le pays doibt a la ville d'Afjen vingt
€ cinq mille trois cent septante sept livres, quinze sols, six deniers,
« après que led. compte (a esté) signe des Csuls de Villeneufve, Mar-
« mande, Tournon, Penne, Le Port, Tonneins Dessoubs et Clayrac,
» deputtes ».
(Arch. d'Agen. BB. 51, p. 30, v.)
CRÉANCIERS
DE LA VILLE IVAGEN ET DU PAYS D'AclENALS
J'ai relevé les noms des créanciers de la ville et cité
d'Agen et du Pays d'Agenois dans VEstat des Dehtes
présente et affirme véritable par Pierre de Mêja^
coMs"*""" du Domaine d'Agennois et de Gascogne, con-
sul et dcppxitte de la ville d'Agen, siiyvant l'acte de
Jurade et Assemblée du Pays d'Agenais du 6" Febvrier
i6]^ aciste de M' Pierre Dulaitretis, jurât de lad.
ville. (Faict à Bourdeaux le X« jour de Febvrier
1635) (I).
— Je résume le document dont s'agit, document an-
nexé à l'arrêt du Conseil d'Etat du 25 Octobre 1634.
Les dates qui accompagnent les noms indiquent l'é-
poque des obligations consenties par lesConsuls d'Agen
soit au nom de la Communauté, soit au nom du Pays
d'Agenais, comme syndics de ce Pays :
Anthoine Kaignac, advocat . . M IIIL U
(Obligations d'Avril 1625 et
Janvier 1626).
Bernard de Faure advocat . . IIL 11
(Juillet 1627^.
(l) Arch. d'Agen ce. 192. Consuls d'Agen en 1635. Amanieu Ducros,
avocat à la Cour Frcsidialc, premier consul. Sieur Anthoine Buard,
Bourgeois et Intendant des Rivières; Pierre Méjà, Conseiller du Koj- au
domaine d'Aj^^enais; Isaac de Landaz, Ecuycr ; Pierre Groussou,
Avocat en la Cour ; Jean Cancer, payeur des gages de Messieurs les
Présidiaux.
i6o
Feu M*^ François Bertrand C"='
au siège présidial .... IX»^ Il
(^Décembre 1626),
De Suduirault C"'' du Koi en la
Cour de Parlement de Bor-
deaux, 5CXX) 1. et Cancer, ad-
vocat, 1877 1. pour paiement
final de Canat, concessionnaire
deM-^odeGondrin. . . . Vl'" VllI^ LXXVII 11
(Janvier 162^).
Nicolle de Vaurs, veuve du s'' de
Sevin (i) XIX^XXll
(Février 1628).
Bernarde de Marcon, veuve de
feu Bernard Gardes. . . . lllm 11^ L
(Mars 1628).
Noble François d'Estrades sieur
de Bonneil (2) II'" II.
(Août 1628).
F'rançois de Vives, advocat . . VI^ IX 11.
(Août 1628) (3).
Condamnation des Consuls d'A-
gen comme syndics du Paj's
envers les Consuls de Monclar
par la Cour des Aides, . . IX-^ XLV 11
(Juillet 1634).
(i) A sa mcrt, Nicolle de Vaurs, légua yooo livres au Coliéye des
Jésuites pour fonder une mission (BB. 210).
(2) Il ne reste du Château de Bonnet qu'une tour hcxafjonc qui
flanque un bâtiment d'exploitation rurale; le bâtiment est situé sur le
bord et à l'O. de la route Dép'« d'Agen à Cahors, entre cette route et la
voie ferrée. Tout à côté, sur la .Masse, se trouve le Moulin d'Estrades.
(3) Trésorier des deniers de la .Santé en 1628.
|6|
Dû par les dits (ionsuls aux l'è-
res Jésuites et C'.oUc^^e (1). . 1111'" IX. I. 11.
(Mai iTkdi).
Noble Pierre de Secondât de Ro-
ques IX II
(Octobre 1624) (2).
M*-" Arnauld Delpecli, lieuti cri-
minel XVlll 11
(Juin 1625).
M*^ François de Vives. . . . VI'" IIll" XIX 11
(Août 162.S).
Uames Reli<jjieuses de N. D. de
la ville d'.\<;en IIII' 11
(Juillet i627">.
Hoirs de feu Haltliazar (le'as,
grand archidiacre .... M 11
(Novembre 162S) (3).
Antboine Raignac llm 11
(Septembre 162s).
M'- Arnaud Delpecli, Lieu< (>'. VI' 11
(Juin 1625 et Janvier 1627).
S"- de Villas ....... Mil
(Janvier 1629 1.
Robert Fournier, advocat et sa
femme Louise de Poix. . . IX' LVIII 11
(Janvier 1629).
M"'" de Nort XV' 11
(Février 1629).
(1) Les Consuls d'Amen appelèrent les Jésuites en 1582.
Les lettres patentes Je la Reine Marj;uerite de Valoia du 23 Fév.
15S4 assignent aux professeurs une pension annuelle et perpétuelle de
500 livres à prendre sur les plus clairs deniers d^ ses revenus. (Pli.
Lauzun. Revue de l'Agenais. T. XXIX, p. 103).
(2) Marié à Anne de Pontac.
(3) Frère de l'Evèquc Claude de Gelas, qui mourut le jour de la
Noël 1630.
l62
Eleonor de La Uaiîuc.lemme du
s"" Desmases MVII. LX 11
(Février 1629) (i).
Jean de Laborde, avocat. . M 11
(Mars 1629),
S' d'Estrades MXLII 11
(Mars 1629) (2).
S»- d'Estrades VI« XL 11
(Février 1629).
S'- d'Estrade Ville l 11
(Mars 1629).
S'' de Gardes, C"'-"'' au siège Prés. XV*^ 11
(Mars 1624"^.
Président Daffis VI'" IIIIc U
(Mars 1629J.
De Massip, C""-'' au Pari' de Bor-
deaux Vieillie 11
(Avril 1629).
Jean Ménoire vieux, marchand
de Villeneuve Ilm 11
(Avril 1629).
Jean Ménoire jeune, marchand
de Villeneuve Ilm 11
(Avril 1629).
D"^ Marie de Goudailh, veuve
du sr de La Tour (3) . . . IX-' XV 11
(Mai 1629).
(1) Eléonor de La Dague de la Cassaijjne (Jurid. de Layrac). Son
mari, noble Pierre de Sej'ras, ccuyer, s' des Mazes.
(2) Jehan Canteloube, prêtre, prieur de (>amboc, procureur de noble
François d'Estrades, loua 400 livres la maison de ce dernier aux Con-
suls pour la translation de la Chambre de l'Edit à Affen.
(3) La Tour, s^ de Fontirou. Pierre de La Tour mourut avant I626.
Marie de Godailh, fille de Loys de Godailh, Conseiller au Présidial,
et de Constance de Durfort, avait épousé le s"" de Fontirou le 5 Sep-
tembre 1593.
iCi
[cMU lidiilo, V. liiriir^icii de l.i
pcslc VI l.ll 11
(Novembre i()2t)i
Martre C.aslcts, veuve a leii
l'ienc Blai y, eliir. de la peste. 111' il
(Décembre l()2(j).
Hoirs de feu S' Oescliamps . . \'lll 11
(Janvier 1630).
Marf^ucritc de Sevin, femme de
M' le Présideut Du Hernet 11) XI !• Il
(oblio;é du XIX lYvrier 1630)
Hoirs de feu l'rau^ius de (!ap-
(l'iLcaA Mars if»2S, on avait emprunte à M"" de Sevin 1020 I ,
prises et reçues par le s'" Corne, receveur des tailles, t pour employer
M au payement des poudres, plomh et mèches ordonnés pour le ma-
« f^jazin par Moiisei;j:neur d'Kspernon.. » (BB. 51, p. 23, v.)
Mar;jueritc de Sevin, fille de Guillaume de Sevin, s'' de Laqrardf,
Beaure;jard et autres places, (mort, d'après le Rciî. Par. de C^asse-
ncuil, le S Juillet I(')I4), et d'Antlioinette de Rance, femme en premiè-
res noces de Jacob de Secondât, b.inm de Montesquieu, Goulard.Cas-
telnoul)el et Mérens, qu'elle avait épousé en 1610. Elle épousa en se-
condes noces, le 5 Février i''>.,3, le président de la Glia:nbre de Tiédit,
séant à A;;en, Joseph Du Bernet. (O. Gilvy. Nob. de Guyenne et de
Gascogne. T. II, p. 257. J. Bourrousse de L.ilTore. T. III, p. 350).
l'ne autre j;^rande dame, Paule de Bellejjarde de Gondrin, veuve
d'Anthoine Armand de Pardailhan, avait obtenu un arrêt du C^)nseil
Privé condamnant, en la personne des Consuls d'Asfen, le Pays d'A-
ii^enais à lui payer iznoolivres. (Arch. d'Asfen. FF. 204. An 1^124-1629).
Le 2janvier 162S, les Consuls avaient reçu commandement de payer
un cessionnaire de .M""" de GonJrin. î Le mesme jour (2 Janvier
« 1628) Jehan Canac, marchant de Toulouse, comme cessionnaire de
« M"'" de Gondrin nous a faict faire le second commandement de
* payer la somme de si.\ mille deux cens trente et quelques livres
« deubs parle Pays. L'e.vploict est à la liasse •. (BB. 51, p. 1 v.i
Le 4, ou décida un emprunt immédiat. On emprunta à M^ de Sudui-
rault, cons"»f en la Cour de Parlement de Bordeaux, 5000 I. (6 Jan-
vier), (p. 4). Enfin, toujours pour le Pays, l'avocat Cancer prêta A la
ville 1S77 livres. (V. plus haut p. 160).
i64
derme et Jeanne Pantarolle, sa
femme IIIIc XL II
(Mai 1630).
M"-- Guilhaume Ratier, advocat. 11"> CXXXIII 11
(Mai 1630).
Jeliane de Solier, veuve de feu
M'" Pierre Laplaignes, procu-
reur VMl
(Septembre 1630).
Bertrand Gippoulou et Jeanne
Coudrade, sa femme . . . Vll^ 11
(Octobre 1630),
Hoirs de feu Marc Bertoulieres. 111'= IX 11
(Novembre 1630).
Bertrand Berty, advocat, tuteur
des enfants de Jacques Boudou IX^ 11
(Décembre 1630).
Pierre Queusse, m^ . . . . V^~ 11
(Octobre 1631).
Jean de Faure, march^ ... C 11
(Octobre 1631).
Bertrand Baratet, march^ . . CXXX 11
(Octobre 1631).
Bertrand Mathieu, marchai . . XXX 11
(Octobre 1631).
Pierre Girle, march-^ .... CIIII''^ X 11
(Octobre 1631 1.
Bernard Daubas, mardi'' . . C 11
(Octobre 1631).
Jean Rougier, bourgeois. . . XX 11
(Octobre 1631).
Bernard de Faure, avocat . Vc 11
(Décembre 1631).
Chapitre de la cathédrale de
Condom Illm 11.
(Décembre 1631).
i65
D»-' Marie tle Goudailh. . . Xlh' XXVII 11
(Juin 1633).
Syndic des pauvres de l'hôpital
d'Ajren » VII'" V^ 11
(Décembre 1633).
Raymond Gayral, mardi'' de
Toulouse ex 11
(Avril 1634).
Koiimancy et Jayac, inarclv'"' de
Limoges CL 11
(Novembre 1631).
LETTRE
DE M^jEAN BARBIER DE LA SERRE
A MESSIEURS LES CONSULS D'AGEN (i).
Messieurs ^
Vous m'escrivistes que, suivant la résolution du
Bureau, vous feriez nourrir et penser ceste pauvre
femme (2) et voyant qu'elle estoit icy tous les jours a
crier qu'elle mouroit de fain i'en ay donne advis à
Monsieur Delpech (3) qui m'a faict responce que c'es-
tait a moy a la nourrir et qu'il ne fallait pas rejecter
mes charges sur autruy. le ne scaj' si ceste respunce a
procède de V»^ commune délibération. Si cela est ie
serai contrainct de vous dire — pardonnez-moi, s'il
vous plaist — qu'elle a este très mal contrôlée, car ie
ne suis pas teneu de nourrir des pestiférés. Il est bien
vray que vous m'ayant donne quatre pauvres, deux
d'iceulx estans veneu infects, a ma prière vous mistes
en leur lieu ceste pauvre femme à laquelle a mon des-
part d'Agen ie donnay cinq quart d'escu et une barri-
(II Arch. d'Agen. GG. 256.
(2) Il s'agit d'une femme appelée La Coutre. Le 3 Mai, M. Barbier
de La Serre écrivait aux Consuls qu'un de ses fils venait de mourir de
la peste, que l'autre ne passerait pas le jour et que la mère était ex-
trêmement malade. (GG. 258).
(3) M' M" .\rnaud Delpech, lieutenant criminel, i "^ consul d'Agen,
l'an 1629.
i67
que de deniy vin fort hon, moyennant quoy elle estoit
payée jusqucs a la lin de may — , fors trois quarts d'escu
que ie lui debvois encore fournir ; et pour les autres
deux, ie leur donnay huict quarts d'escu et une
autre barrique de vin , moyennant quoy ils «ont
payes jusques a la tin de may. Néanmoin}; je n'ay lais-
sé de bailher charitablement à ceste pauvre femme et
pain et lard, huille, sel et autres choses jusques a ce
que m'avez mande que la nuurrire. Cl'est pour vous
dire que ie reiecte pas mes charj^es sur autruy . le doibs
nourrir deux pauvres et vous voulez que ie nourrisse
cinq pestiférés a scavoir ceste femme et quatre enfans
qu'elle a. Ex cuzes moy, s'il vous plaist, si je vous dis
que c'est a vous a faire et que vous avez l'argent public
destine a cela et prenez garde que vous n'accumuliez
de plus en plus l'ire de Dieu et sur la ville et sur vous
de refuser aux pauvres malades ce qui leur est deub,
ayant reiecte par deux fois ceste pauvre misérable sans
la voloir recevoir dans les huttes et l'ayant laissé dor-
mir sur un fumier aux portes de V'' ville sans luy vo-
loir f'^ donner un morceau de pain. Prenez aussy garde
a la sorte que vous avez traicte et moy et les autres
concitoiens de nous avoir renvoyé cette femme et ses
enfans, les avoir chasse de la ville lorsque les avez sceu
malades. Et en passant ie vous donne encores advis
qu'un autre de vos pauvres que vous avez aussi chasse,
lils d'un nomme Bernard Lomio, voisin d'icy, est mort
entre les mains de sa mère, l'estant aile recevoir aux
portes de la ville, tellement que nous voila encores
exposes. D'un autre coste que si vous voles que les
habitans de ceste parroisse contribuent aux frais des
malades et de toute la despence, pourquoy n'en doib-
vent-ils pas jouir, pourquoy ne les voles-vous recevoir
et pourquoy les renvoyés a vos eonjurisdictionels p'
infecter tout le pays. Voyez si Dieu et le public sont
servis en cela et si la charité sy trouve. Il faut donc
i68
nécessairement que vous recevies les malades de ceste
parroisse, que vous nous estiez et nourrissies les infects
ou que vous nous declaries que vous ne prétendes lever
aucuns deniers sur les habitans pour raison des biens
scitues dans ceste parroisse. Je crois que les plus des-
raisonnables trouveront ceste raison sans responce.
C'est pourquoy vous nous y feres, s'il vous plaist, jus-
tice, sans que nous s()yons contraincts de l'aller cher-
cher ailleurs. En mon particulier l'ai grande occasion
de me pleindre de ce que m'avez escript et promis de
la nourrir. Et maintenant vous me dictes que c'est a
moy a faire.
J'ay tous les jours icy plus de quarante pauvres aux-
quels il faut que ie donne. J'ay donne et paye ceste
femme et neantmoins pour vous dire encores que ie ne
veux pas f"""^ porter mes charges et que ie les veux dou-
blement porter, donnes moy deux autres pauvres et ie
leur feray fournir dans Agen les quatre solz. Mais de
nourrir des pestiférés, c'est chose a laquelle vous ne
debviez pas avoir pense. Pardonnes mo}' et assures vous
qu'il n'y a habitant qui veuilhe mieux porter ses char-
ges que moy, ni qui honore plus les charges publicques
que vous ne voyez que ie fais, sachant trop mieux
qu'elles sont establies de Dieu, lequel a peu vous con-
server,
Messieurs,
en santé et longue vie. De La Serre, ce i*^' de May
1629 par
Votre très humble serviteur
Jean Barbier (i).
(l) Jean de Barbier était un homme considérable en Amenais et par
sa fortune et par ses alliances. Il était né à Virieu en Forez vers 1570
et était avocat au Parlement de Paris, lorsqu'il fut appelé à Agen,
Si vous trouvez ceste lettre de quelque considération,
vous me ferez, s'il vous plaist, un mot de responcc que
j'attendray.
par son frùrc, Balthazar de Barbier, abbc Je Gondon et vicaire nèné'
rai Je l'EvOquc C^lauJc de Gelas i-t chanoine de St-Capr.iis. En 1612
il acheta à Jean Hopil l'office de Receveur des décimes d'Aj^enais
pour la somme de 12570 fr. et peu après la scigr.eurie de La Serre,
dans la paroisse d'Artij;ues, seigneurie voisine des terres de Lafont
de Cujuia. Jean i"'' de Barbier mourut lieutenant principal de la sé-
néchaussée d'Agcnais en Avril 1632. (V. J. Je Bourroussc de LatTore.
Nob. de (iuyentte et de Gascof^ne. T. IV, p. 152-154).
La Serre se trouve situé au N. d'Afjen et à l'O. d'Artijjucs sur un
plateau qui domine la rive droite du ruisseau de Se^one.
LEVÉE DES SOMMES DUES
PAR LES HABITANTS D'AGEN POUF^ LES
AVANCES DE GRAINS
FAITES PAR LES CONSULS EX 1629 (i)
Nous soubzs""-'-'* avons reçu de Messieurs les Consuls
de la présente ville ung livre couvert de parchemin in-
tituUe : Rolle des bleds, froment, mesture et febves quy
a este preste aux habitans de la ville d'Agen, suivant
Tordre du Bureau de la santé de l'année mil six cens
vingt neuf, escript en cent dix sept feuillets de papier
avec un arrestat et liquidation faicte des sommes conte-
nues dans led. livre et cayer faict par les divers Consuls
de l'année dernière du trantiesme décembre audit an
signé: Delpech, Corne, Lavergnie, Cunolis, de Roquier
Consuls, de la somme de cinq mil deux cens trante trois
livres sept soûls neuf deniers, y ayant aussy au pied
dud, cayer ung estât de la lepvee faicte par led. s"" Corne
de ceux qui ont paye lesd . bleds empromptes dud. jour,
trantiesme décembre de luy signe, escript en trois feuil-
lets et demy papier, et duquel livre nous sommes et
demeurons charges pour faire la levée desd. sommes
ainsin que promettons faire et en rendre bon compte
auxd. sieurs Consuls, à toutes réquisitions, sans extor-
quer ni fere aulcune indue vexation auxdits habitans
à peyne de tous despans, dommages et intérêts. Et pour
(ï) La pièce n'a pas de titre. Le titre nous appartient.
171
cest eftaict lesd. sieurs Consuls donnent pouvoir de f"'
contraindre le débit"* au payement desd. sommes, et
moyennant ce lesd. sieurs Consuls ont accorde et pro-
mis pour nos peynes et vacquations qui seront par
nous employées a la lepvee desd. sommes unj; soûl po'
livre quy sera prins sur icelle •. et en foy de ce nous
sommes soubz"*"".
Faict audit .V^a-n dans la .Maison Commune de lad.
Ville, le sixiesme juillet mil six cens trante.
P. Mespoui.ii:. H.\i.i..\n. ( n
(i) Arch. d'A^'cn BU 51 P- '44-
DÉCLARATION DE M^ BIENASSIS
l'ai reçu de Messieurs les Consuls les pièces soubzes-
crites servant au procès de la ville contre Monsieur
d'Agen et le syndic du chapitre de St-Etienne. Précisé-
ment une coppie descrept en parchemin donne entre le
syndic dud. chapitre et Messire Anthoine de Rovère,
Evêque d'Agen (i) en date du siziesme septembre mil
cinq cens trante, plus cinq pièces en cahier ? Toutes
cinq concernant (les revenus) que le sieur Evesque d'A-
gen devoit tirer sur les bénéticiers de son diocèse,
toutteslesd. pieses vidimées par feu Chatellet, notaire.
Plus une copie d'arrest donne entre lesd. syndics du
chapitre et sieur Evesque d'Agen et des sieurs Consuls,
en datte du i8 Mars 1622. Plus une coppie de lettre
faict par Monsieur Sauveur aud, sieurs Consuls, pour
exécuter l'arrêt dudit jour 13 Mars 1622 et signifié par
Dufour notaire, plus un exploict d'assignation donne à
Messieurs les Consuls à la requeste dud. syndic du cha-
pitre, le second Octobre 1629 ; plus deux requestes et
(I) Antoine de la Rovére succéda à son oncle, le Cardinal Léonard
de la Rovère. Il fut institué par le Pape Léon X, le 23 Mars 1519. Lors-,
qu'il entra à Agen le 13 Avril 1521, les quatre hauts barons, qui de-
vaient le porter sur leurs épaules jusqu'à St-Etienne, pour une ques-
tion de préséance, tirèrent l'épée. A cause du Jubilé, il y avait à Agen
cent mille personnes. L'évèquc chanta sa première messe sur le pont
de Garonne (Livre de raison des Daurèe, p. 99). L'évêque acheva la
construction de la tour de Hautefage, qu'avait élevée son oncle Léo-
nard.
»73
autres pièces attachées ensemble contenant saisie des
fruicts de Messieurs les Ecclésiastiques de Tannée 1629,
lesquelles dictes pièces j'ai prins pour m'en servir et
produire audit procès.
Enfoi de quoy me suis signé ce jourd'hui dans Agen,
unziesme juillet mil six cens trante.
BIENASSIS.
En marge on lit : « Receu de .\U Bienassis des piesses
« qu'il a prises de la Maison de Ville, pour le procès de
« M"" d'Agen. (i)
(i) Arch. d'Ajjen BB. 51, p. 143. /Juin ? 1630). Le 16 Août 1631. Le
sieur Guilhaumc, procureur au Grand Conseil avisait les Consuls de
l'exploit d'assignation donné à la requête du syndic du clergé d'Agen
06 Août 1631). Quant à l'affaire de la distribution des pauvres entre
les Chapitres de St-Caprasy et de St-Estienne, l'assij^nation donnée
aux Consuls devant la Cour de Parlement de Bordeaux est consignée
A\x Journal des Consuls à la date du II Mars 1631. (BB. 51, pp. 151
v. et 164 V.)
TABLE
Prkfack 5
CHAPITRE ^^
La miijcre en Agenais de 1600 à 1629. ... 7
CHAPITRE II.
La misère en 1629 13
CHAPITRE III.
La Grande Famine 37
CHAPITRE IV.
La mortalitc de 1630-163 1 46
CHAPITRE V.
Les ventes de terre 5'
CHAPITRE VI.
Valeur des terres et des grains <)0
CHAPITRE VII.
Les secours. — Les approvisionnements et leur
organisation 6}%
CHAPITRE VIII.
La situation tinancière de la ville dW^en et
du Pays d'Agenais. — Les emprunts. — La
liquidation 9'
176
PIÈCES JUSTIFICATIVES m
Jurades de Duras 115-126
Mortuaire de Notre-Dame de Pinel et de Ste-
Catherine d'Hauterive (1630-1631) .... 127
Assemblée du Tiers-Etat d'Agenais (29 Dé-
cembre 1631) 147
Créanciers de la ville d'Agen et du pays
d'Agenais 159
Lettre de Jean Barbier de la Serre aux Consuls
d'Agen 166
Levée des sommes dues par les habitants
d'Agen pour avances de grains en 162 9 . . 170
Déclaration de M^ Bienassis 172
ERRATUM
Page 10. LiiTiie ^. Lire : Snoitrnn au lieu de Miron.
La E^ibKoth^que
Univf^rsité d'Ottawn
Echéance
1
~~r
P.E.B./I.L
NOV 2 1 20(
J
The Library
University of Ottawa
Date Due
Il
a : 3003 00 I 308 7S7b
r
DC
061 l
.A16C84 1902
COUYBA, L,
MISEPE Fh; AGtMAlS OE 1600
1431
I 1
C
21'5